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Mis à jour 2018- le 25 juin. Image associée au texte : La grande paix de Montréal en 1701, détail (source : Videanthropca).

Illustration par Francis Back

Traité de la Grande Paix de Montréal en

1701 & le Traité de Paris en 1763

-1701-06-15. Instructions de M. de Callières au Père Bruyas envoyé avec MM. Le

Moyne de Maricourt, de Joncaire et autres chez les Onnontagués, pour avertir les

Iroquois de ne pas manquer de descendre à Montréal avec leurs prisonniers tel

que convenu pour y rencontrer les Sauvages d'en haut, afin de faire tous

ensemble l'échange des prisonniers. 15 juin 1701.

-1701-08-04 : Traité de la Grande Paix. paix conclue par toutes les nations autochtones dont les

Iroquois, et les Français. Grande Paix de Montréal. Ratification de la paix conclue entre les

Français, leurs alliés autochtones et les Iroquois. Signatures de chefs iroquois, outaouais, hurons,

abénakis, algonquins, sauteux, etc, sous forme de dessins représentant l'animal totémique de leur

tribu. La ratification par les signatures des nations amérindiennes s'est déroulée par la suite en

août et septembre. Ce document est connu sous le nom de Traité de la grande paix de Montréal de

1701. Archives nationales d'outre-mer (ANOM, France), COL C11A 19/fol.41-44v aux mots Grande

paix

En mars 1700, une première conférence avait été organisée en territoire iroquois, à Onontagué. En

septembre de la même année, une paix préparatoire est signée à Montréal avec les Cinq nations

iroquoises. Treize marques amérindiennes figurent sur le traité. À la suite de cette première

entente, il a été convenu qu'une invitation serait portée à toutes les nations des Grands Lacs pour

les inviter à se rendre à Montréal à l'été 1701 afin d’y ratifier l’entente générale. Trente nations ont

envoyé au total 1300 délégués pour discuter pendant plusieurs semaines, à grands frais pour leurs

hôtes français, des conditions de l'action collective. Le protocole iroquois de la cérémonie des

condoléances, l'échange de cadeaux et l'échange de prisonniers précédèrent la « signature »

solennelle des accords en vertu desquels plusieurs nations s'engageaient entre elles à vivre en

paix.

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Le document original du Traité de la Grande Paix, semble avoir disparu. Celui ci-dessous est une

copie calligraphiée par le secrétaire du gouverneur de la Nouvelle-France, quelques jours après la

ratification. Les pictogrammes des nations signataires ont été fidèlement reproduits.

La Grande Paix de Montréal en 1701 (Source : Videanthropca).

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Illustration par Francis Back, cpyright : La grande paix de Montréal en 1701. jeuxpac.net et lesbeautesdemontreal.com

« RATIFICATION DE LA PAIX faite au mois de septembre dernier, entre la Colonie de Canada, Les Sauvages ses alliez, et les iroquois dans une assemblée généralle des chefs de chacune de ces nations convoquée par monsieur le Chevalier de Callières gouverneur et Lieutenant general pour le Roy en la nouvelle france.

A MONTREAL, le quatriême aoust 1701. COMME il ny avoit icy l'année dernière que des deputez des hurons et des outaouacs lorsque je fis la paix avec les Iroquois pour moy et tous mes alliez, je jugeay qu'il estoit necessaire d'envoyer le Sieur de Courtemanche, Et le R. P. Anjalran, chez toutes les autres nations mes alliez qui estoient absents pour leur apprendre ce qui s'estait passé, et les inviter a descendre des Chefs de chacune avec les prisonniers iroquois qu'ils avoient affin d'ecouter tous ensemble ma parolle.

Jay une extreme joye de voir icy presentement tous mes enfans assemblez, vous hurons, outaouacs du Sable, Kiskakons, outaouacs sinago, nation de la fourche, Sauteurs, p8te8atamis, Sakis, puants, folles avoines, renards, maskoutins, Miamis, Ilinois, amikois, nepissingues, algonquins, temiskamingues, Cristinaux, gens des terres, kikapoux, gens du Sault, de la montagne, Abenakis, et vous nations iroquoises et que m'ayant remis les uns, et les autres vos interets entre les mains il puisse vous faire vivre tous en tranquilité; ie ratiffie dont aujourd'huy la paix que nous avons faitte au mois d'aoust dernier voulant qu'il ne soit plus parlé de tous les coups faits pendant la guerre, et Je me saisy de nouveau de touttes vos haches, et de tous vos autres instruments de guerre, que je mets avec les miens dans une fosse sy profonde que personne ne puisse les reprendre, pour troubler la tranquilité que je retablis parmy mes Enfants, en vous recommandant lorsque vous vous rencontrez de vous traiter comme freres, et de vous accomoder ensemble pour la chasse, de maniere qu'il n'arrive aucune Brouillerie les uns avec les autres, et pour que cette paix ne puisse estre troublée, je repete ce que j'ay desja Dit dans le traité que nous avons fait, que s'il arrivoit que quelqu'un de mes enfans en frapast un autre, celuy qui auroit esté frappé ne se vangera point, ny par luy ny par aucun de sa part, mais il viendra me trouver pour que je luy en fasse faire

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raison, vous declarant que si l'offençant refusoit d'en faire une satifaction raisonnable, je me joindrois avec mes autres alliez a l'offensé pour l'y contraindre ce que je ne croit pas qui puisse arriver, par l'obéissance que me doivent mes enfans qui se ressouviendront de ce que je vais donner a chacune de vos nations affin que les anciens les fassent executer par leurs jeunes gens, je vous invite tous a fumer dans ce calumet de paix ou je commence le premier, et a manger de la viande et du bouillon que je vous fais preparer pour que j'aye comme un bon père la satisfaction de voir tous mes enfans reunis.

Je garderay ce calumet qui m'a esté presenté par les miamis affin que je puisse vous faire fumer quand vous viendrez me voir.

Apres que toutes les nations cy dessus eurent entendu ce que monsieur le Chevalier de Callières leur dit, ils repondirent comme il Suit.

Le Chef des Kiskakons

Je n'ay pas voulu manquer mon père ayant Sçû que vous me demandiez les prisonniers des Iroquois, a vous les amène en voilà quatre que je vous presente pour en faire ce qu'il vous plaira. C'est avec cette porcelaine que je les ay déliés et voicy un calumet que je presente aux iroquois pour fumer ensembles quand nous nous rencontrerons. Je me rejouy de ce que vous avez uny la terre qui estoit bouleversée, et je souscrit volontiers a tout ce que vous avez fait.

Les Iroquois,

Nous voilà assemblez nostre pere comme vous l'avez souhaité; vous plantates l'année derniere un arbre de paix Et vous y mîtes des racines et des feuilles pour que nous y fussions a l'abry; nous esperons presentement que tout le monde entend ce que vous dites, qu'on ne touchera point a cet arbre, pour nous nous vous assurons, par ces quatre colliers que nous suivrons tout ce que vous avez reglé; nous vous presentons deux prisonniers que voicy et nous vous rendrons les autres que nous avons. Nous esperons aussy presentement que les portes sont ouvertes pour la paix, qu'on nous renvoyera le reste des nostres.

Les Hurons,

Nous voila icy comme vous l'avez demandé, nous vous presentons douze prisonniers, dont cinq veullent retourner avec nous, pour les sept autres vous en ferez ce qu'il vous plaira, nous vous remercions de la paix que vous nous avez procurée et nous la ratifions avec joye.

Jean leblanc outaouac du Sable,

Je vous ay obey mon pere aussy tost que vous m'avez demandé en vous ramenant deux prisonniers dont vous estes le maistre; quand vous m'avez commandé d'aller à la guerre je l'ay fait, et a present que vous me le deffendez jy obey, je vous demande mon pere par ce collier que les iroquois dellient mon corps qui est chez eux, et qu'il me le renvoyent, C'est a dire les gens de sa nation.

Sangouessy outaouac Sinago

Je n'ay pas voulu manquer a vos ordres mon pere quoique je nusse point de prisonniers. Cependant voilà une femme et un enfant que j'ay racheptée dont vous feréz ce qu'il vous plaira; et voila un calumet que je donne aux iroquois pour fumer comme frères quand nous (reverrons ?).

Chichicatalo, chef des Miamis

Je vous ay obey mon pere en vous ramenant 8 prisonniers Iroquois pour en faire ce qu'il vous plaira. Si j'avois eu des Canots, je vous en aurois amené davantage, quoy que je ne voye point icy des miens qui sont chez les iroquois, je vous rameneray ce qui m'en reste, si vous le souhaitté, ou je leur ouvriray les portes pour qu'ils s'en retournent.

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Onanguisset pour les Sakis,

Je ne fais qu'un même corps avec vous mon Pere, voila un prisonnier Iroquois que j'avois fait a la guerre. Souffez qu'en vous le presentant je luy donne un calumet pour emporter chez les Iroquois et fumer quand nous nous rencontrerons. Je vous remercie de ce que vous eclairez le soleil qui estoit obceure depuis la guerre.

Onanguisset Chef des Sotrouatamis.

Je ne vous feray point un long discours mon pere. Je n'ai plus que deux prisonniers que je mets a vos deux costez pour en faire ce qu'il vous plaira. Voila un calumet que je vous presente pour que vous le gardiez, ou que vous le donniez a ces deux prisonniers afin qu'ils fument dedans chez eux. Je suis tousjours prest a vous obeir jusqu'a la mort.

Mis8ensa Chef Ontagamis.

Je n'ay point de prisonniers a vous rendre mon pere, mais je vous remercie du beau jour que vous donnez a toute la terre par la paix; pour moy je ne perdray jamais cette clarté.

Les Maskoutins

Je ne vous amene point d'esclave iroquois par ce que je n'ay pas esté en party contre eux depuis quelque têms, m'estant amusé a faire la guerre a d'autres nations, mais je suis venu pour vous (obeir ?) et vous remercier de la paix que vous nous procurez.

Les folles avoines

Je suis seullement venu mon pere pour vous obeir et embrasser la paix que avéz faite entre les Iroquois et nous.

Les Sauteurs et les Puants

Je vous aurois amené mon pere des Esclaves iroquois sy j'en avois eu, voulant vous obeir en ce que vous m'ordonnerez. Je vous remercie de la clarté que vous nous donnez et je souhaite qu'elle dure.

Les Nepissingues

Je n'ay pas voulu manquer a me rendre icy comme les autres pour écouter vostre voix. J'avois un prisonnier iroquois l'année passée que je vous ay rendu. Voila un calumet que je vous presente pour le donner aux iroquois si vous le souaitter affin de fumer ensembles quand nous nous rencontrerons.

Les Algonquins

Je n'ay point de prisonniers a vous rendre mon pere; l'algonquin est un de vos enfans qui a tousjours esté a vous, et qui y sera tant qu'il vivra; je prie le maistre de la vie que ce que vous faites aujourd'huy Dure.

La Mikois

N'ayant point d'autre volonté que la vostre j'obey a ce que vous venez de faire.

L'Abenakis

Quoy que je parle des derniers je ne suis pas moins (a vous ?) mon pere; vous scavez que je vous ay tousjours esté attaché; je n'ay plus de haches vous l'avez mise dans une fosse l'année derniere et je ne la reprendray que quand vous me l'ordonnerez.

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Les Gens Du Sault

Vous n'ignorez pas vous autres Iroquois que nous ne soyons attachez a nostre pere nous qui demeurons avec luy et qui sommes dans son sein; vous nous envoyaste un collier il y a trois ans pour nous inviter a vous procurer la paix; nous vous envoyasmes un, en réponse; nous vous donnons encorre celuy cy pour vous dire que nous y avons travaillé; nous ne demandons pas mieux qu'elle soit de Durée faite aussy de vostre costé ce qu'il faut pour cela.

Les Gens de la Montagne

Vous avez fait assembler icy nostre pere toutes Les nations pour faire un amas de haches et les mettre dans la terre, avec la vostre; pour moy qui n'en avoit pas d'autre, je me rejouy de ce que vous faites aujourd'huy, et J'invite Les Iroquois a nous regarder comme leurs freres.

Copie du traité de paix de 1701. (Le document original du traité de paix de 1701 est conservé aux Archives nationales d'outre-mer de la France.) « Pictogrammes des nations signataires : 1. Ouentsiouan représente la nation iroquoise des Onontagués et signe un échassier. 2. Pour les Tsonnontouan, c'est Tourengouenon qui appose la signature de la tortue. 3. Pour les Onneeiouts, la signature représente une fourche au milieu de laquelle se trouve une pierre. 4. Chez les Goyogouins (« peuple de la grande pipe ». 5. La marque de Kondiaronk, dit le Rat (un rat musqué), figure sur le traité de 1701. Un autre chef huron a pu apposer cette marque au nom de ce grand chef, mort deux jours avant la signature du traité. 6. L'ours, la signature du chef Kinongé, dit le Brochet, pour les Outaouais du Sable. 7. La marque des Abénaquis de l'Acadie, par le chef Mescouadoué. 8. L'ours, la marque des Outaouais Sinagos. 9. Pour les Gens du Sault, l'ours également, signature apposée par Haronhiateka. 10. La signature du chef des Gens de la Montagne est un chevreuil. 11. Le chef Kileouiskingié signe d'un poisson pour les Outaouais Kiskarons. 12. La fourche représente le lieu où vivent les Outaouais de la Fourche, à la confluence de trois rivières. 13. Représentés par Onanguicé, chef pouteouatami, les Mississagués (nation ojibwée) signent d'un oiseau-tonnerre. 14. Les Amikoués apposent la marque du castor. 15. Pour les Sauteux (Ojibwés), le chef Ouabangué appose la marque d'une grue. 16. Chez les Algonquins, on trouve deux signatures : un échassier ou une grue et, à côté, un être humain. 17. Une perche surmontée d'un scalp sert de signature pour le village des Pangichéas (Piankashaws). 18. La marque de Chichicatalo, chef très respecté chez les Miamis, regroupe deux symboles, dont une grue. 19. La marque du chef Outilirine pourrait représenter les Cris. En langue Crie, le suffixe -irin signie « homme ». 20. Représentés par Onanguicé, les Koueras Koueatenons (groupe illinois) signent d'un arc et d'une flèche. 21. La marque du village des Peorias (nation illinoise) est une tortue à longue queue. 22. L'emblème des Tapouaroas (groupe illinois). 23. L'emblème des Monisgouenars (nation illinoise), établi à la rivière des Moines. 24. Le village des Marouas (groupe illinois), signe d'une grenouille. 25. Pour les Pouteouatamis, la marque d'un chicot et trois racines. 26. Pour les Kaskaskias (nation illinoise), une plume encochée. 27. La marque du village des Ouiatanons (nation miamie) est une carrière. 28. L'esturgeon est la marque des Sakis (Sauks). 29. Chez les Outagamis, ou Renards, la signature est celle du… renard. 30. L'oiseau-tonnerre représente le symbole clanique des Puants. 31. La marque des Malominis (Folles Avoines) est celle d'un oiseau-tonnerre tenant une tige de folle avoine. 32. Le chevalier de Callière, Bochart de Champigny, et autres.» (Notes tirées de : Alain Beaulieu et Roland Viau, La Grande Paix, Chronique d'une saga diplomatique, Montréal, Éditions Libre Expression, 2001, pp. 109-111.)

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2018, le 25 juin

LE CANADA CÉDÉ À LA GRANDE-BRETAGNE

QUAND ? APRÈS LES PREMIÈRES NÉGOCIATIONS QUI ONT

MENÉ AU TRAITÉ DE PARIS DE 1763 ET NON PAS LORS DE LA

DÉFAITE DES PLAINES D’ABRAHAM EN 1759 NI LORS DE LA

CAPITULATION DE MONTRÉAL EN 1760 APRÈS LA GUERRE DE SEPT ANS

1 - AVANT LE TRAITÉ DE PARIS DE 1763 :

Présentation de plusieurs mémoires ainsi que les

négociations (ou troc) de 1761-1762 entre la

France et la Grande-Bretagne.

Les conquêtes militaires ne sont pas définitives car elles ne sont que des

gains territoriaux temporaires en vue du grand troc des négociations

ultérieures dont un traité de paix est l’aboutissement. Les belligérants

s’échangent pour des raisons économiques des territoires conquis

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militairement : c’est ainsi que le Canada déficitaire a été échangé,

abandonné et cédé pour des raisons économiques et stratégiques lors d’un

échange et de négociations.

« Un grand marchandage se préparait entre la France et la Grande-

Bretagne sur la valeur d’échange des possessions acquises par l’un aux

dépens de l’autre. Les positions françaises en Allemagne valaient-elles le

Canada ? La valeur sucrière élevée de la Guadeloupe, prise par

l’Angleterre, devait-on l’échanger contre un retour du Canada à la France ?

Un tel exercice impliquait évidemment que chacune des parties dispose

d’une grille détaillant la valeur économique et stratégique de chacune des

possessions. La dimension économique était prioritaire dans la plupart des

calculs effectués de part et d’autre. » Mais la dimension stratégique était

également omniprésente. Source : Michel Brunet, La France impériale et la Nouvelle-France Un

regard neuf sur 1759, Septentrion 2013, p.220.

La position chimérique

de Bougainville ou Capellis en 1758

Un mémoire prônant la transmigration des Canadiens vers et en Louisiane.

François de Capellis a fait carrière dans la marine française. En 1757 il a

participé à l’infructueuse campagne navale vers Louisbourg et Québec. En

1758 il était en Martinique et dans l’île de St-Domingue. Il aurait

recommandé aux stratèges français d’abandonner le Canada, de récupérer

l’île de Terre-Neuve (en vue de ses marins pêcheurs), d’augmenter ses îles

sucrières (en particulier St-Domingue) et de conserver la Louisiane.

Considérant que « La perte du Canada en luy mesme n’est rien pour la

France, mais celle de ses habitants est inestimable », Capellis

recommanda l’abandon du Canada, c’est-à-dire une transmigration des

Canadiens vers La Louisiane, c’est-à-dire le déplacement de la population

du Canada vers la Louisiane.

Ses mémoires auraient été adressés au Secrétaire d’État à la marine,

Berryer, puis attentivement étudiés en février 1759, notamment par le

contrôleur des dépenses de la France, Étienne de Silhouette qui en accusa

réception dans une lettre du 8 février 1759. Finalement la proposition de

transmigration fut mise de côté. De nos jours on a peine à croire que les

aînés de la population canadienne auraient pu survivre aux difficultés de

toute sorte du trajet menant du Canada à La Louisiane d’alors. Un premier mémoire sur la transmigration portait sur la retraite des troupes françaises vers la Louisiane si les Britanniques prenaient le Canada. Il aurait

été rédigé en 1758. Bougainville se chargea d’aller le soumettre à Versailles : il s’embarqua pour la France à l’automne 1758. Ce projet n’eut pas de suite. Un deuxième mémoire, de l’année 1758 mais non signé, proposait l’évacuation de toute la population de la vallée du St-Laurent vers la Louisiane en cas

que la France perdrait le Canada. L’aide de camp de Montcalm et commandant, Bougainville, qui a passé 4 années au Canada, en aurait été l’auteur.

On croit d’autre part que Capellis qui a prôné l’abandon du Canada pourrait aussi en être l’auteur. Source : Lionel Groulx, D’une transmigration des Canadiens en Louisiane vers 1760, Notes autour d’un document, Revue d’histoire de l’Amérique

française, volume 8, no 1, juin 1954. Pages 97 à 118.

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Un autre mémoire prônait la transmigration des Canadiens en Géorgie au nord de la Floride.

Étienne de Silhouette en 1759 a jugé que le Canada

devrait être cédé aux Britanniques

Silhouette fut contrôleur général des finances de mars à novembre 1759 puis répudié à

cause des mesures sévères qu’il avait appliquées pour redresser les finances du royaume.

Il avait aussi classé les possessions ou colonies françaises selon leur rentabilité : le

Canada arrivait en dernier !

« C’est Étienne Silhouette, éphémère contrôleur général des finances (mais 1759), qui, le premier, va hiéarchiser les colonies en fonction de leurs revenus. Le Canada, jugé moins rentable que les pêches et le sucre, se retrouve alors en bas de l’échelle des priorités. C’est ainsi qu’il propose la cession de tout le Canada ou d’une partie de celui-ci, au fur et à mesure des conquêtes anglaises. Source : Le traité de Paris bouleverse l’Amérique,

par Sophie Imbeault, Denis Vaugeois et Laurent Veyssière, Septentrion 2013, Introduction par Laurent Veyssière, p.19, note 14.

Avec Étienne de Silhouette le Canada est progressivement descendu dans la hiérarchie

des intérêts coloniaux à protéger. On est alors passé d’une logique impériale à une

logique purement commerciale. Source : Le traité de Paris bouleverse l’Amérique, par Sophie Imbeault, Denis Vaugeois

et Laurent Veyssière, Septentrion 2013, Introduction par Laurent Veyssière, p.19.

La capitulation militaire du Canada en 1760 puis son

abandon par la France deux ans plus tard : - 1759, le 13 septembre : capitulation de la ville de Québec.

- 1760, le 8 septembre : capitulation de Montréal et du Canada.

- 1761, mois de juin : la France cède le Canada.

Le sort temporaire du Canada en 1760 fut d’abord celui d’une capitulation, lequel Canada

devait servir de monnaie d’échange dans les négociations qui suivirent en 1761 et 1762.

La France préféra s’en tenir à l’aspect économique. C’est pourquoi en 1762-1763 elle

abandonna définitivement un Canada peu rentable pour les ressources lucratives de la

pêche dans le golfe du St-Laurent avec la possession des îles St-Pierre et Miquelon et de

la canne à sucre des Antilles (Guadeloupe etc).

En mai 1761 la France était encore déterminée à reprendre le

Canada conquis en 1759-1760 puis, le mois suivant, elle s’est

ravisée et résignée à l’abandonner et le céder par échange en

juin 1762.

En mai 1761 François de Bussy avait été envoyé à Londres par le ministre de Louis XV, Choiseul,

avec la consigne de négocier le retour du Canada contre les prises de Hanovre en Allemagne faites

par les Français. Sophie Imbeault, Denis Vaugeois et Laurent Veyssière, Le traité de Paris bouleverse l’Amérique, Septentrion 2013, p.18.

Le 26 juin 1761 François de Bussy écrit au ministre Choiseul que selon lui l’Angleterre ne restituera pas le Canada à la

France : « Il me paroist impossible d’espérer que les Anglois se portent à nous restituer le Canada puisque c’étoit l’objet de

la guerre et que sa possession a esté le but des vues de la nation et des dépenses qu’elle a faites pour le conquérir. »

La France était acculée à revoir ses priorités et donner raison à Étienne de Silhouette. Pour des motifs purement

commerciaux le ministre français Choiseul a opté pour la cession du dispendieux et déficitaire Canada et de sa

population aux Britanniques. En retour Choiseul au nom du roi a choisi de reprendre la Guadeloupe pour son sucre et la

pêche dans le golfe St-Laurent pour la morue avec les îles St-Pierre et Miquelon.

« La France restituerait Minorque* et accepterait la perte du Canada, à condition que la Grande-Bretagne lui rendit l’Isle

Royale (île du Cap-Breton au Canada). Elle était prête à démilitariser l’île en achevant la démolition de la forteresse de

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Louisbourg, et ne s’en servirait à l’avenir que comme d’une base pour la pêche à la morue. » Dull, La guerre de Sept Ans,

Histoire navale, politique et diplomatique, Bécherel, Les Éditions Les Perséides 2009, p. 288. Cet échange de territoires conquis confirme que

la France était plus intéressée aux revenus de la morue et du sucre qu’aux revenus d’un Canada déficitaire. Le ministre

William Pitt s’était montré ferme à conserver la Canada et l’île du Cap-Breton. * Minorque : une île des Baléares en Méditerranée occidentale près de l’Espagne. Références : Michel Brunet, La France impériale et la Nouvelle-France Un regard neuf sur 1759, Septentrion, année 2017 ; Edmond Dziembowski, La

guerre de Sept Ans, Septentrion 2015 ; Laurent Veyssière et Bertrand Fonck, La guerre de Sept Ans en Nouvelle-France, 2012 Septentrion, l’article de

François Ternat, L’autre bataille de Québec : sauver la Nouvelle-France par la négociation, Septentrion 2012 ; Sophie Imbeault, Laurent Vaugeois et Laurent Veyssière, La France bouleverse l’Amérique, Septentrion 2013.

Le mémoire réaliste de Bourlamaque en 1762 :

il faut conserver le Canada.

Le traité de Paris n’était pas encore signé mais les négociation s’achevaient.

Le 1eraoût 1762 en France, le général Bourlamaque, ancien commandant en troisième du défunt Montcalm, fit parvenir au duc de Choiseul un impressionnant « Mémoire sur le Canada » dans lequel il soutenait que le Canada serait une précieuse colonie pour la France si on améliorait certains aspects de son administration. Il valait la peine de ne pas l’abandonner, disait-il, même si le bassin des Grands Lacs était perdu ; la colonie avait été victime du trop grand intérêt porté à la traite des pelleteries et à la fondation des postes éloignés et du peu d’attention dont avait été l’objet l’exploitation des ressources de la vallée du Saint-Laurent.

Opinion de Voltaire

sur la cession du Canada

Voltaire était bien connu pour ses opinions parfois farfelues ou mal fondées

Une lettre de Voltaire datée du 6 septembre 1762. Elle est adressée au comte César Gabriel de Choiseul (1712-1785), qui a remplacé, en 1761, son cousin Étienne François de Choiseul au poste de secrétaire d’État des Affaires étrangères. Cette lettre est conservée dans la collection des Archives publiques du gouvernement du Canada (la pièce R6220-0-5-F). Il en existe aussi une transcription dans The Voltaire Foundation, The complete works of Voltaire, vol. 109, Correspondance XXV, 1973, lettre D10693. Cette lettre est citée dans certains manuels d’Histoire du cours secondaire au Québec.

« Si je ne voulais que faire entendre ma voix, monseigneur, je me tairais dans la crise des affaires où vous êtes. Mais j’entends les voix de beaucoup d’étrangers, toutes disant qu’on doit vous bénir si vous faites la paix à quelque prix que ce soit. Permettez-moi donc monseigneur, de vous en faire mon compliment. Je suis comme le public, j’aime mieux la paix que le Canada, et je crois que la France peut être heureuse sans Québec Vous nous donnez précisément ce dont nous avons besoin. Nous vous devons des actions de grâces. Recevez en attendant avec votre bonté ordinaire le profond respect de Voltaire. »

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2 - LE TRAITÉ DE PARIS

10 FÉVRIER 1763

Les articles 4 à 8 ARTICLE 4 - Le Canada et sa population

Sa Majesté Très Chretienne renonce à toutes les Pretensions, qu'Elle a formées autrefois, ou pû former, à la Nouvelle Ecosse, ou l'Acadie, en toutes ses Parties, & la garantit toute entiere, & avec toutes ses Dependances, au Roy de la Grande Bretagne. De plus, Sa Majesté Trés Chretienne cede & garantit à Sa dite Majesté Britannique, en toute Proprieté, le Canada avec toutes ses Dependances, ainsi que l'Isle du Cap Breton, & toutes les autres Isles, & Côtes, dans le Golphe & Fleuve S' Laurent, & generalement tout ce qui depend des dits Pays, Terres, Isles, & Côtes, avec la Souveraineté, Proprieté, Possession, & tous Droits acquis par Traité, ou autrement, que le Roy Très Chretien et la Couronne de France ont eus jusqu'à present sur les dits Pays, Isles, Terres, Lieux, Côtes, & leurs Habitans, ainsi que le Roy Très Chretien cede & transporte le tout au dit Roy & à la Couronne de la Grande Bretagne, & cela de la Maniere & de la Forme la plus ample, sans Restriction, & sans qu'il soit libre de revenir sous aucun Pretexte contre cette Cession & Garantie, ni de troubler la Grande Bretagne dans les Possessions sus-mentionnées. De son Coté Sa Majesté Britannique convient d'accorder aux Habitans du Canada la Liberté de la Religion Catholique; En Consequence Elle donnera les Ordres les plus precis & les plus effectifs, pour que ses nouveaux Sujets Catholiques Romains puissent professer le Culte de leur Religion selon le Rit de l'Eglise Romaine, en tant que le permettent les Loix de la Grande Bretagne.-Sa Majesté Britannique convient en outre, que les Habitans François ou autres, qui auroient eté Sujets du Roy Très Chretien en Canada, pourront se retirer en toute Sûreté & Liberté, où bon leur semblera, et pourront vendre leurs Biens, pourvû que ce soit à des Sujets de Sa Majesté Britannique, & transporter leurs Effets, ainsi que leurs Personnes, sans être genés dans leur Emigration, sous quelque Pretexte que ce puisse être, hors celui de Dettes ou de Procés criminels; Le Terme limité pour cette Emigration sera fixé à l'Espace de dix huit Mois, à compter du Jour de l'Echange des Ratifications du present Traité.

ARTICLE 5

Droits de pêche accordés par les Britanniques aux Français dans le golfe St-Laurent

Les Sujets de la France auront la Liberté de la Pêche, & de la Secherie, sur une Partie des Côtes de l'Isle de Terre-Neuve, telle qu'elle est specifiée par l'Article 13. du Traité d'Utrecht, lequel Article est renouvellé & confirmé par le present Traité, (à l'Exception de ce qui regarde l'Isle du Cap Breton, ainsi que les autres Isles & Côtes dans L'Embouchure et dans le Golphe st Laurent;) Et Sa Majesté Britannique consent de laisser aux Sujets du Roy Très Chretien la Liberté de pêcher dans le Golphe S

t Laurent, à Condition que les Sujets de la

France n'exercent la dite Pêche, qu'à la Distance de trois Lieues de toutes les Côtes appartenantes à la Grande Bretagne, soit celles du Continent, soit celles des Isles situées dans le dit Golphe S

t Laurent. Et pour ce

qui concerne la Pêche sur les Côtes de l'Isle du Cap Breton hors du dit Golphe, il ne sera pas permis aux Sujets du Roy Très Chretien d'exercer la dite Pêche, qu'à la Distance de quinze Lieues des Côtes de l'Isle du Cap Breton; Et la Pêche sur les Côtes de la Nouvelle Ecosse, ou Acadie, et par tout ailleurs, hors du dit Golphe, restera sur le Pied des Traités anterieurs.

ARTICLE 6 – Les îles St-Pierre et Miquelon

Le Roy de la Grande Bretagne cede les Isles de St Pierre & de Miquelon, en toute Proprieté, à Sa Majesté

Très Chretienne, pour servir d'Abri aux Pêcheurs François; Et Sa dite Majesté Très Chretienne s'oblige à ne point fortifier les dites Isles, à n'y établir que des Batimens civils pour la Commodité de la Pêche, & à n'y entretenir qu'une Garde de cinquante Hommes pour la Police.

ARTICLE 7 – cession de territoire dans les limites actuelles des États-Unis

Afin de retablir la Paix sur des Fondemens solides & durables, & écarter pour jamais tout Sujet de Dispute par Rapport aux Limites des Territoires Britanniques et François sur le Continent de l'Amerique, il est convenû, qu'a l'avenir les Confins entre les Etats de Sa Majesté Britannique & ceux de Sa Majesté Très Chretienne en cette Partie du Monde, seront irrevocablement fixés par une Ligne tirée au milieu du Fleuve Mississippi depuis sa Naissance jusqu'à la riviere d'Iberville, & de là par une Ligne tirée au milieu de cette Riviere & des Lacs Maurepas & Pontchartrain jusqu'à la Mer; Et à cette Fin le Roy Très Chretien cede, en toute Proprieté, &

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garantit à Sa Majesté Britannique la Riviere & le Port de la Mobile, & tout de qu'Il possede, ou a dû posseder, du Coté gauche du fleuve Mississipi, à l'exception de la Ville de la Nouvelle Orleans, & de l'Isle dans laquelle Elle est située, qui demeureront à la France; Bien entendû, que la Navigation du Fleuve Mississippi sera également libre tant aux Sujets de la Grande Bretagne comme à ceux de la France, dans toute sa Largeur, & toute son Etendue, depuis sa Source jusqu'à la Mer, et nommement cette Partie, qui est entre la susdite Isle de la Nouvelle Orleans & la Rive droite de ce Fleuve, aussi bien que l'Entrée & la Sortie par son Embouchure. Il est de plus stipulé, que les Batimens appartenants aux Sujets de l'une ou de l'autre Nation ne pourront être arrêtés, visités, ni assujettis au Payement d'aucun Droit quelconque.--Les Stipulations inserées dans l'Article 4. en Faveur des Habitans du Canada auront Lieu de même pour les Habitans des Pays cedés par cet Article.

Note : la colonie de cette époque appelée La Louisiane, faisant partie de la Nouvelle-France comme le Canada, a été cédée en deux parties par le Traité de Fontainebleau en 1762 : la partie du côté « est » (oriental) du fleuve Mississipi a été cédée à la Grande-Bretagne et la partie du côté « ouest » (occidental) du Mississipi à l’Espagne.

ARTICLE 8 – Des îles restituées à la France

Le Roy de la Grande Bretagne restituera à la France les Isles de la Guadeloupe, de Mariegalante, de la Desirade, de la Martinique, & de Belle-Isle; Et les Places de ces Isles seront rendues dans le même Etat, où Elles étoient, quand la Conquête en a été faite par les Armes Britanniques; Bien entendû, que les Sujets de Sa Majesté Britannique, qui se seroient établis, ou ceux qui auroient quelques Affaires de Commerce à regler dans les dites Isles & autres Endroits restitués à la France par le present Traité, auront la Liberté de vendre leurs Terres, & leurs Biens, de regler leurs Affaires, de recouvrer leurs Dettes, & de transporter leurs Effets, ainsi que leurs Personnes, à bord des Vaisseaux qu'il leur sera permis de faire venir aux dites Isles, & autres Endroits, restitués comme dessus, & qui ne serviront qu'à cet Usage seulement, sans être genés à Cause de leur Religion, ou sous quelqu'autre Pretexte que ce puisse être hors celui de Dettes ou de Procés criminels.--Et pour cet Effet le Terme de dix-huit Mois est accordé aux Sujets de Sa Majesté Britannique à compter du Jour de l'Echange des Ratifications du present Traité.--Mais comme la Liberté, accordée aux Sujets de Sa Majesté Britannique, de transporter leurs Personnes & leurs Effets sur des Vaisseaux de leur Nation pourroit être sujette à des Abus, si l'on ne prenoit la Precaution de les prevenir, il a été convenû expressement, entre Sa Majesté Britannique & Sa Majesté Très Chretienne, que le Nombre des Vaisseaux Anglois, qui auront la Liberté d'aller aux dites Isles & Lieux restitués à la France sera limité, ainsi que le Nombre de Tonneaux de chacun, qu'ils iront en lest, partiront dans un Terme fixé, & ne feront qu'un seul Voyage; Tous les Effets, appartenants aux Anglois, devant être embarqués en même Tems. Il a ete convenû en outre, que Sa Majesté Très Chretienne fera donner les Passeports necessaires pour les dits Vaisseaux; que, pour--plus grande Sureté, il sera libre de mettre deux Commis ou Gardes François sur chacun des dits Vaisseaux, qui seront visités dans les Atterages & Ports des dites Isles, & Lieux, restitués à la France; Et que les Marchandises, qui s'y pourront trouver, seront confisquées.

Le roi de France, Louis XV, n’a pas payé ses dettes

envers les habitants du Canada en 1764

Après la conquête de 1760, beaucoup d'habitants de la colonie possédaient des billets qui équivalaient à de l'argent. Ces substituts de monnaie de papier avaient été émis par l'intendant qui manquait de véritable monnaie ou de liquidité : ces billets portaient différents noms comme Lettres de change, Billets d'ordonnance, Monnaie de carte et Certificats. Ceux qui en possédaient voulurent en 1764 en échanger la valeur contre de la vraie monnaie de France. Après de longues et difficiles négociations, le roi de France et son gouvernement abandonnèrent avec soulagement et empressement le Canada à la Grande-Bretagne et décidèrent de ne rembourser aux Canadiens que les lettres de change d'avant le 15 octobre 1759 et celles de 1760, en fait celles qui avaient servi à payer les fournitures de l'armée. Quant au reste, le roi ne remboursa que la moitié des lettres de change et le quart des ordonnances. Ce fut la consternation car les Canadiens perdirent des millions :

« Sur 83 millions, la dette immense du Canada a été liquidée avec 37 607 000 livres de reconnaissances, ce qui représente une perte de plus de 45 millions pour les quelque 8 000

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porteurs de papier. Voilà (…) qui fera dire à mère d’Youville (…) en 1770 : Vous savez tout ce que le Roi de France nous a fait perdre ». Source : Sophie Imbeault, La dette de la France, Les papiers du Canada, Cap-aux-Diamants : la revue d’histoire du Québec, no 115, automne 2013, p. 15 et 18.

Avec l'espoir d'être remboursés par le roi et le gouvernement français, les habitants du Canada avaient présenté l'état fidèle des lettres de change, billets d'ordonnance, monnaie de cartes et certificats qu'ils possédaient. Il est donc possible, grâce à ces bordereaux que les habitants ont complétés, de savoir qui étaient les plus fortunés de la seigneurie Saint-François en 1764 : voir sous l’onglet La population, dans l’article Les Plus riches, la liste des habitants à partir des plus fortunés en Billets d'ordonnance qui ne seraient remboursés que pour le quart de leur valeur et en Lettre des change qui ne seraient remboursées que pour la moitié de leur valeur, et ce pour les périodes mentionnées ci-haut, en commençant par les plus fortunés. Les Cartier figurent parmi les plus riches grâce à leur implication dans le commerce des fourrures.

Lecture recommandée : La France impériale et la Nouvelle-France, Un regard neuf sur 1759, par Michel Brunet, Ottawa 2017, Éditions Pierre Tisseyre

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