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Puget et la peinture L'élude des peintures de Pu get, depuis qu'on l'e nvisage à nouveau, mullipli e les points d'interrogation (attributions, dat a tions, oe uvres dispa- rues ... ). En atlendant le cata log ue scientifiqu e souh a ité pa r M. Hcrdin g, n Olis proposons simplement ici une approche styli sti lJu e. Approche à reprendre eL à compléter l, nOLI S n'cn ùoutons pas. mais qui permettra pcut- êt re une première mise en place de la peinture de Puget. face à son lenlps et fa ce à nOli S, el sa ns dou te a llssi une réévaluation. Mais d'abonl à qllel moment la fortune du peintre s'cs t-ell e séparée de celle du sculpte ur el de celle de l'arc hit ecle ? Quand a-l-on di ssocces trois express ions d'ull même génie da ns les quell es probablement Puge t. t'omme l'a écr it Lagl' a nge, « ne voyait qu e les cana ux d'un e même pens('e, les insll'lIll1enb docil es do nl la même main deva it savoil' se sel'vi r lour à lO:lr », qu a nd a-t-on sac ri fié la pei nture ùe Puget 1 Une é tud e attentive d es tex tes nOli s répo ndra it avec précision, mais qu elqu es son dages rapid es suffisenl à prouver qu 'cn pit d'une gra nde tendresse de Lagra n ge pOUl' Pu get, cc sont esse nti ell emen t les jugements emba rrassés de cet a ut eur (1868), qui - sc héma ti sés plus tard dans Uil sens franch eme nt n éga tif par " l'Encyclopédie des Bouches-du-Hhône" - ont été à l' origin e ùe l'a ltitud e de déd ai n, restée ha bitu ell e, face à cette pa rti e de l'oeuvre 2, La gloire du L La présente ana lyse porLe essentiellement sur les tableaux du Musée de Marseille qui sont à la fois les plus connus, les plus sûrs et les plus critiqués . 2. Une chronologie sommaire de.:> textes permet déjà d'esquisser une courbe d'appré· ciation de la pe int ure de Puget : 1679 : P.-J. DE HAITZE, (Les curiosités les plus ramarql/ables de la ville d'Aix) .- « ... l'Annonciat ion, .est du brave Monsieur Puget, de Marseille. C'est tout dire en disant qu'il sort de la mam d'Lm si savant homme, qui n 'excelle pas seulement dans la peinture mais aussi encore dans la sculpture et l'architecture. 1700 : F. LECOMTE (Cabinet des singularités ... ) : « ... un Chri st avec les Anges, ce que l 'on estime comme du Guide n.

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Puget et la peinture

L'élude des peintures de Puget, depuis qu'on l'envisage à nouveau, mulliplie les points d'interrogation (attributions, data tions, œ uvres dispa ­rues ... ) . En atlendant le cata logue scientifique souh a ité pa r M. Hcrdin g, nOlis proposons simplement ici une approche styli sti lJu e. Approche à reprendre eL à complé ter l, nOLI S n'cn ùoutons pas. mais qui perm ettra pcut­être une première mise en place de la peinture de Puget. face à son lenlps et face à nOli S, e l sans dou te a llssi une réévaluation.

Mais d'abonl à qlle l mom ent la fortune d u peintre s'cs t-ell e séparée de celle du sculpte ur el d e celle de l'architecle ? Quand a-l-on di ssocié ces trois expression s d'ull même géni e dan s lesquelles probablement Puge t. t'omme l'a écrit Lagl'a nge, « ne voyait qu e les cana ux d'un e m ême pens('e, les insll'lIll1enb dociles donl la même main d evait savoil' se sel'vi r lour à lO:lr », qu a nd a-t-on sacri fié la pei nture ùe Puget 1 Une é tud e attentive d es tex tes nOli s répondra it avec précision, m ais qu elqu es son dages rapid es suffisenl à prouver qu 'cn d épit d'une grande tendresse d e Lagra n ge pOUl' Pu get, cc sont essenti ell emen t les jugem ents embarrassés de cet a uteur ( 1868), qui - schémati sés plus tard dans Uil sens franch eme nt néga tif par " l'Encyclopédie des Bouches-du-Hhône" - ont été à l'origin e ùe l'a ltitude d e déd ain , restée h a bituell e, fa ce à cette pa rtie de l'œuvre 2, La gloire du

L La présente ana lyse porLe essentiellement sur les tableaux du Musée de Marseille qui sont à la fois les plus connus, les p lus sûrs e t les plus critiqués.

2. Une chronologie som mai re de.:> textes permet déjà d'esquisser une courbe d'appré· ciation de la pe inture de Puget :

1679 : P.-J. DE HAITZE, (Les curiosités les plus ramarql/ables de la ville d'Aix) .­« ... l'Annonciat ion, .est du brave Monsieur Puget, de Marseille. C'est tout dire en disant qu'il sort de la mam d'Lm si savan t homme, qui n 'excelle pas seulement dans la peinture mais aussi e ncore dans la sculpture et l'architecture.

1700 : F. LECOMTE (Cabinet des singularités ... ) : « ... un Chri st avec les Anges, ce que l'on estime comme du Guide n.

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114 M,·CI·I, GLOTON

sculpteur a crù tandis qu e décroissait cn proporlioll in\'cl'sc cell e dll pcinlrc. Une partie considérable de l'œuvre de Pierre Puget a é té tenlle jusqu'à LiIlC

date lrès récente il pOlll' qu a ntité négligeable.

Une approche nouvelle peut être tentée à la lumière de di"ers regrou­pem ents : de peintures de P uget d 'abord, d éconcertantes si on les consi­dère isolément mais qui s'éelairent l'une ('au tre lors«u'on les rapproche; ensuite, de peintures réalisées en France, en Ilalic, dans les Flandres, dans un passé plus ou moins récent; enfin de créalions exactement contempo­raines qui offrent aussi des points de comparaisons avec la peinture ùe Puget. La confrontation ùe ces œuvres fail ressortir à la fois la variété de la culturc visuelle ùe l'arliste, son aùhésion sans résel'ye à son époque - dont il pa rle le langage, usant du mème yocabulail'c - et sa pel'manente originalité.

1717 : J. TOURNE:;ORT (Relation d'un voyage au Levant) 1744 : P.-J. MARIEnE (Recueil des plus beaux tableaux dll Cabinet de Messire

J.-n. Boyer et Abecedario) 1752 : J . BOUGElŒL (d'après Dedicu) (Mémoires ... ) 1807 : E~tERIC-DAVlD (Discours). 1812 : Z. PONS (Eloge .. ) 1823 : EMERIC-DAVID (BIOgraphie lhtiverselle). 1847 : Ph. DE CHENNEVIERES-POINTEL (Recherche ... )

LagraJ~~,sc:o~~ïta ég~~es~~~J la fue~~:u~e u~~ ~~g~~ejé~~d~à 01~ul~en:iV~~iltdtd~~lés;r~~at~~~ étouffe trop souvent la vérité des faits» (L.<\GRANGE, p. IX ).

1868 : L. Lagrange dans son irremplaçable Pierr~ Pllget paraît so~ve~t embarrassé, constamment partagé en tre son admiration et ses princIpes (voir ~n particulier p. 44 e l 78). C'est que mé~Jant, comme ses contemporains, à l'égard de la pemture bamquc et dt:: son chef de file Pierre de Cortone (p. 11), Il fonde son jugement SUI- des critères académiques

~~n~rifi~~:~I~~l~:~~F,~jtll~jfi~?j;ii~j!~:~~~~:;;;;,;~;~:,;~ ~~;~;;~~~t;i:~;:::: que deux pages impersonnelles sur cent vingt quatre au total

1930 : M. BRION (Pierre Puget, Plon) se montre plus sensib le à l'art du peintre

~bi:e i~u~o~~~~ ~~~~r~r~êtion~a~~~ 11~~:~e~u;i~t~s ,(~~s27)~intures de Puget ne méritent 3. A travers Pierre de Cortone. l'historien italien Giuliano Briganti incite en 1962

à réévaluer la peinture de Puget « che varebbe la pena meltere in giusta lucc » (Pietro

~i'/dl~~~OI~a[~~~i~L~~;·k~~l, 23i~, etM~~i~I~ , H;~d~ïj) ee"n l~~âlif~nn~lutla un;ei~~~r-!e 3~ud~u~~~ ~:œ~&~~~Si';~od'a~~~~fun~~nf'~tu~ d'~~~ee p~:~~~~~~n~~~~ ;fl~a1~o~~~~q(~~irdepl~ahsae~ltlf

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Ils

Parmi d'innombrables points d'interroga tion deux certitudes (qui ne l'ont pas toujours été). Première certitude : Puget a peint toute sa vie '. Il n'y a pas d·a .... èt brusque de sa production picturale en 1663. La chrono­logie des œuvres le prouve suffisamment. Il faut voir dans la fameuse for­mule de la leUre à Louvois (1683) la figure d'un style qui s'emporte un peu sous l'effet de l'exa ltat ion. Puget n'a peut-ètre plus réalisé de grandes commandes. lrop absorbé par ses entreprises de sculpture et d·architecture. mais il continue de peindre pOlll" lui ou pour des intimes 5. C'est alors même qu'il semble \Taiment m ailre d e son inspiration picturale.

La seconde certitude c'est l'empreinte de Pierre de Cortone qui révèle la peinture à Puget, empreinte qui marqu e fortement ses premières œ uyres . Sur les chanLiers du Palais PHli - où l'on trava ille vers 1642-43 aux salons de Vénus et de Jupiter - il est probable. comme le suppose M. Briganti ". que Puget collabore d'abord comme sculpteur et s tucaleur. Peu à peu il se risque à la peinture, à la peinture telle qu 'on la pratique sous ses yeux: une peinture à la fresqu e qui nécessite une technique rapide, parfois hâtive. qui interdit les minuties. une peinture lal'ge qui fixe l'essen tiel et qui cher­che l'ilnpact décora tif avant la correction du détail. La tach e de couleur compte ici plus «ue le ùessin ; une nuée, une dra perie animeront un vide. D~s types définis, d es altitudes frappantes reviendront sans effort, néces­saireluent, sous le pinceau.

4. LAGRANGE n'a pas écr it le contra ire (p. 32·35) ct K. H EROING le confirme dans J'~rticle cité plus haut (note 2). Ajoutons qu'un acte notarié du 30·10-1669 qualifie Pierre Puget de "peintre".

5. Citons après 1663 (cf. chrono logie de K. H ERDING, op. cit .) : v. 1663, Sainte Famille (château de Fonscolombe). v. 1664, projet pour le décor du dôme de San Siro à Gênes. v. 1670, Autoportrait (Aix·cn·Provence , musée Granet).

: fo~~~r~i~ J~istci~~~~~1etiBt;c~~~rfJj~:'~~île, musée Longchamp - attribution contestée, voir plus haut communication dc K. HERDING)

1671 , David (Quéhcc). ap. 1672, Les Parques (Toulon, plafond sur toile détruit). v. 1685, L'Education d'Achille (musée Longchamp). Se trou vait au pavillon de

Fontgate à la ~ort de Puget. 6. Op. CIl., p. 239. On manque de certitudes absolues sur les dates des séjours

de Puget à Florence. Sans reI'!trer dans le détaV des hypothèses diverses nous admettons la datc de 1643 ct la possibihté d'un $ccond sejour entre 1646 et 1649 (correspondant au décor des salons de Mars eL d'Apollon du palais Pitti).

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116 M.~CH . GLOTON

C'est celle techniqu e d écorative, adaptée a ux grandes surfaces, que Puget rapporh> en Pro\'en ce Yers l643. Trop tôl pour la prali<Ju er à l'('ehc ll c mon umen ta le: le grand décor baroque ne s'épanouira en Pro\'cncc CJu'après la 11Iorl ùe Varel (1668), enlre 1670 cl 1725. On com mande à Puget des ta bleaux de chevalet : non sans UI1 peu de d éeep tion, il , 'U appliquer a u petit cl moyen format la technique en levée du déco rat eur, suÎ\'anl en cela l'exempl e pl'csligi clix du BerrcUini (fig. 61 et 62) . Mais dès la Saillie Cécile (datée 1651), le la ngage corton es«ue. se transforma nt de ma ni ère indéfinis­sable, prend on ne sa it qu oi d' inquiétant : un lieu étrange, fermé comme un e scène, ull e ~,a jnlc Cécile appliquée. en costume d'Opéra, «u'on obscr\'(_~

enlre des balustres. Le Baptème de Cons/an tin (1652) ( fi g. 65 ] pré.scnl e UIl C

frallehis e de louch e, un e rudesse même T qui para it à l'étroit comm e l'en­semble de la composition, dans le formaI réd uit <Ill tableall (1 m 58;0,88) . La louch e, le rapport ùes couleurs, des détails de la composition ra ppe llent Pi erre de Corton e)o!, mais l'a isance presque mondainc du ma itrc fail place ici à un e tension, à un e contrai nt e scnsibles dans Ics form es e f Ics allilwles qui marqu ent tout l'Œuvrc dc Puget : ri en n'cst simple, ri en n'est ais(! pOlir lui. D'ol! sa ns doute ta nl de senl.iments contrad ictoires aussi ch ez Ic spectateur ... Puge t n'est jamais académique: il bouscule toujours son mo­d èle, fût-il romain. Les Illu scles la rges, les t ra its robustes, pres(lu c ndgail'cs d es visages d e Constantin , <J e l'offi cier (Hg. 66 ) sont ce ll x d e l'Hercule (Jautois (fi g. (7) ou d'Alexandre regal'dant Diogène. Pourquoi ferail-on grief a u

7 .. D'après la facture (LAGRANGE, p. 363 ) les res~aurations de Serre (j ui,lle t 1724) furcnt IInpo rt antes. Il faut admettre pourtant quc Michel Serre resta fidèle a l 'œ.uvrc de Puget car on ne reconnaît pas la technique fondue c t tra.nsparente de ce pemtre dans Ics touches contrastées du Baptême de Constantin en particulie r. Se rre a peut·être p!us n;tarqué le SalValOY Mtmdi qui lui ressemblait d.avantage . . Une étude de la b~rato ire a ld.eraJt sans. doute à retrouver sous des restaura tions ulté n eu res . e t ma ladrO ites les att itudes origlnclles d u pape Sylves tre e t d e Cons tan tin . I l semble blcn que de sa main gauche le pal?e .bénissalt le souvera ~n, comme saint Rémi , e l que l'empereur pouvait prendre appuI différemment su r sa Jambe droite ..

B. De mal]ière Irès précise :. po~r la technique voir en particulier le labl~au

~~f~g:vtB~;~,~~t,~:r~;.n.~~.~e~a~~~ I~~~~ ~~VI[4~ ' Pb~ir s~ i~~fff~:~c~ceRbmFa ~~e~aSutén~c~â~'~ci~~~ vOir le Serment de SenllyamlS (fig. 62), de 1620·24 e.nvirol] .. de la co.llec tlOn Denis Mah?n (BRIGANTI, cal. n~ 6). Pour la composition : Anama guenssa111 saIlli Paul de la cécIté (1631, Santa Man a de ll a Concezione, Roma). Ce tab leau tout de suit e rcnommé a é té plusieurs fois gravé { BRI Gi\NTI! ça!: !}" 42).

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pei ntre d e cc <JlI e l'on accepte chez le scu lpt eur ? El pourquoi reprocherail­on à Puget ce <[u e l'on ne reproc he pas à Poussin: d e n'avoir j a mais été un d essinateur " habile" tl 1

Faisant pcnù all l a u précédent. la compositi on du Baptême de Clovis (fig. 68) , tout en r eslanl cen lrée sur la parlie m édi a n e du lableau , s'aè re, se clarifie, s'unifi e dans LIll espace maltrisé par le geste cl la lumière. Puget esl m altre de la surface du tableau: le Sacrifice de Noé (1654) [ fi g. 64 ] unil avec a isa nce li gnes. co uleurs, lumi ère dans un m êm e mouvement; la m a­tière est fluide; les masses sont fuse lées pOIlI" sui"re l'a rabesqu e directriec. com me chez Pierre de Corlone (fi g. 63) . La description de J'espace, en sur­face el en profondeur, par une li gne de force transversa le qui se retourne, r éapparaitl'a d a ns nombre d e sculptures de con ception SOllvent très proches du bas-relief HI. Mais cette maîtrise acquise, le peintre. insatisfait sans doute de cette COlHlu ète s uperficiell e, tourne le dos à la séduction ù e la couleur et des elTets d e lumière e l c'est, en 1655, l'étonnant Salva/or Mundi (fi g. 70,71) qui rejoinl les d eux Baplêmes dans l'égli se de Ja Major de Marseille. Les ronds é Jaborés, Je pillores'lue des nombreux e l petits personnages ani mant la représentati on des Baptêm es s'eflacent au profil d'un e grand e fi gure hors du temps, dépoui llée de to ut a ttribut dont le caractère JHes<J ue n éo-classique a séùuit Léon Lagrange. On pense ici à la fluidit é calme d'un Sacchi, à l'aus­térit t." du dernier Gu erchin (apr. 1632) tous d eux exacts contemporains de P. d c COI'lolle, mais pcut-è lrc es t-cc d c Hom a nclli (Iu'on csl le plus proche 11 ;

9. An t. SCIlNAPPEll, "La question Pouss in", in Illformation d'Histuire de l'Art (1961) , n ~ 3, p. 90. On pourrai t précise r le parallèle Puget·Poussin esquissé par LACRANCE el s'cn é tonner moins quc Marcel BRION : « ••• chose curieuse, Ics traces dt:! ce lte influence ( italienne sur la pe inture de Puget) sO!"t souvent semblables à celles qu'on rencontre <.:hcz Poussin,. (p. 21). Atmosphère broUillonne et un peu étrange de la Bacchanale Chigi peinte à la détrempe vers 1626, dynamisme tendu dt:! la F/lile en Egyple (1627-28 environ), vivacité de la lOuche ct de la couleur de la Sainte Famille avec Sainl Joseph lisant (1629·30 environ ), express ivité "scénique" de l'Enlèvement des Sabines, de 1635 envi ron ct s urtout du MaÎlre d'Ecole de Faléries (1637) aux att itudes et aux visages insistant s. (A. BLuNT, cataloglle POL/ssin, 1960! n"· 6, 10, 17, .41, 46). Les peintures de Poussin qui présentcnt le plus d'analogies technlqucs c t expressives avec celles de Puget correspondent chronologiquemnt à deux moments de la carrière du premier où, sous des influences dive rses, il sacrifi e aux formu les baroques (1627-29) ou opte provisoirement pour la cou leur (1635-38 ) (vo ir SCII NAPPER, op. cit. , p. 84 cl 89).

10. Le bienheureux Sauli (dont saint Ré mi peu t apparaître comme Ic prototype) Saint Sébastien, Immaculée Conœption, Pt!rsée CL Andromède ...

II. D. M,\IION, Il CI/Crci,/(}, cala/ogl/I! c ritique. Bologne, 1968. VOÎr en particulier

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IIR M.-CH. Cl.OTON

Romanelli , 'lue E. Waterhouse 12 d éfinit comIlle " the only early pupil of any marked originality » du Corlone, a joutant plus loin «somcthing of a lrunsitional figure belwecn Cortona and Sacchi » (fig. 78) .

Picrre Puget - à défaut d'être le Michel-Ange de la France - ail l'ait pu rester, en personnalisant les leçons de PiclTc de Cortone, une sorte de Picr-Franccsco Mola (1612-1666) dont le romantism e fondamental la s'appa­renle à une tendance profonde du Marseillais (fig. 77), Olt peut-être acquérir l'emportement pictural d'un Luca Giordano (1632-1705) [ fig . 75 J avec lequel il présente beaucoup d'af1ïnit és . une cu llure variée <lui va de Ribera à Véronèse cn passant par Pierre d e Cortone, Rembrandt, Rubens ... Une tech­nique de fresquiste, de "fa presto" qui sc soucie davantage de mise cn scène ct d'expression que de correction. Un sentiment dominant du rythme et du lHouvemenl. Mais Pierre Pugel. en 1(;55, s'engage plutôt Slll' une \'oie compa­rable à celle de Romanelli (1610 ? - 1662) [fig. 78J 'lui fut l'élève dll Domi­niquin avant ùe travailler avec Pierre de Cortone et qui. rappelons-le, fait un bref séjour en Provence, sur le chemin de Paris, celte mêulc année 1655. C'est dans celle voie qu'il parait rejoindre Mm'atta (1625-1713), d e cinq ans plus jeune que lui et dont il n'a guère pu subir l'influence avant 1655. Si l'on trouve dans l'A.nnonciation du lllusée des Tapisseries d'Aix (fig. 72) ou dans une Vierge à l'Enfant du musée Lonchump des échos d e Mal'atta c'est davantage le rés ultat d e recherches parallèles qu'influence directe 14,

Il Y a d'ailleurs incompatibililé entl'e la grâce maîtrisée ùe MaraLta dans laqu e lle se retrou\'eront les préc urseurs du XVIII" siècle el la franchise plus l'ude de Puget.

les toiles (1644-45) de la chapelle Barbieri (église du Sanlissimo Rosa rio, eento, planche 77) i..'1 le Chrisi Bénissant (Brera, 1655, pl. 97),

12. E. WA!ERHOUSE, Italian Baroque Paintin/{ (Phaidon, 1962), p. 55. 13. Op. cIl ., p. 66. Le même terme de romantisme es t employé égalemcnt par

Andn: Ül.o\SH.1. à propos de Luca Giordano (L'Art Italien, II, p. 161). 14. Le muséc Longchamp conserve sous le nom de Puget une Adora/ioll des

Bergers qui est une copie de Maralta t~ t dont il serait intéressant de préciser l'histoire. Mais l'Inventai re, transcrit par L .\GRA.'lGE, ne révèle pas t race, dans les collections de Puget, d 'une œuvre de MaratLa (qui, vers 1680, es t considéré comme le plus grand peintre de son époq ue). La Madone monumentale du Musée du Vatican qui eût pu encourager Pugct dans la voie du néo-classicisme dale de 1693-95 environ.

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l'UGET ET LA. PEINTU.RE! il9

L'in flu ence de Pierre ùe Cortone pour ê lre profonde sur le peintre fran­çais ne fut pas exclusive : c'est sans ùoute pourquoi celui-ci pourra s'cn dégager de cette façon. En Italie, Pugct a vécu la peinture qui se faisait mais il a regardé aussi la peinture plus ancienne Oa sculpture et les monuments pareillemenl) : il en multiplie les citations, dans des contextes différents, comme il le fait en sculpture. Comme' l'a fait sous ses yeux Pierre de Cor­tone 15. So uvenirs de Michel-Ange et de Raphaël, attitudes et visages du Corrège e l ùe Guido Reni qui ont pu s'imprimer en lui à travers les repré­sentations du décoraleur. Son intérêt pour les Carrache dont il possédait, à sa mort, une peinlure. un dessin et deux copies, et pour Guido Reni qu'il étudie direclement I(j peut avoir la luème origine. Plus personnel apparaît son goftt pOUl' l'ad formel des maniéristes 17 qui n'exclut pas un penchant pour les procédés expressifs du Caravage ou de Ribera 18.

Lorsqu ' il travaillait au palais Pitti, il a vu au rez-de-chaussée, dans le salon de l'Argente ri e, les fresques que Giovanni da San Giovanni laissa ina­chevées à sa I110rt (163H), et peut-être aussi dans la nIême ville La Sainte Famille arrivant à t'al/berge (fig. 76) qui décorait le maître-autel de l'OI'a­toire du palais della Croce lia (transportée à la fm du XVIII' siècle dans la galerie de sculpture de l'Académie des Beaux~Al'ts ) . Il a pu trouver dans l'expression fl'aich e et vraie du Toscan un encouragement à son propre réalism e. Il y a dans l'oeuvre de Puget des accents popu laires qui ne vien­nent pas de Pierre de Cortone. Nul doule qu'il ail r egardé aussi les paysages tout neufs de Salvator Rosa (1615-1673). Lem écho résonne dans les marines tourmentées qu'il peint à partir de 1651 1".

15. R. W1TTKOWF.R, Art and Archilecllire in flaly (/600-1750), 1958, p. ]67, souligne les réminiscences de Michel·Ange (salle de Mars) non loin de tritons rubénicns (salle de Jupiter) cl les recherches à la manière de Buontalenti (salon d'Apollon cl de Vénus) à côté de panneaux antiquisants (sa lle de Mars). Ajoutons encore les visages rieurs

inspirf6. dr,[~~~ll~èl~ir~a~: ~·té~~s~'~!~ s i les copies d'après Carrache sont de Puget mais K. HEROING (arl. ciL) semble considérer que la copie d 'après II;! Guidc, qui se trouvait dans l'un des deux ate liers, a été peinte par Puget, comme celles d'après Van Dyck.

17. Voir par exemp le, au premier plan du Baptême de Clovis et du Sacrifice de Noé, les figures retournées qui suggèrent la profondeur à la façon des décorateurs maniéristes (Zuccari, Salviati ... ).

18. L'Inventaire signale la présence chez Puget d'un original (?) ct d'une copie de Ribera, et un Caravage.

19. Salvator Rosa séjourne à Florence de 1641 à 1649.

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120 M.~CH. GLOTON

Il sem ble qu e sa conn a issan ce de la peinture dll Nonl passe l'ga Ie men t pm' l'Ita li e, pa l' les HlIbens de Rome el de Gênes. pa r les S usl c l'm a ns dt' F lo­rCIl ('C. et surtout par les Va n Dycl< d e la capita le li gu re 2o, Q ua nt à sa C IlIlIl I'C

fl'an ç.a isc. elle passe a ussi d'un e cert a ine ma n-ière pa r l'lt uli c cm- c'es t des aspcd s les plus ita li ens d'un Poussin ou d'un Le Sue ur qu'on peut ra ppro­(' he r ses premières œ u vres. Des schémas u tili sés pa r Le Sueur e ncore im­prégné de Vo uet, vers 1645, se retro uvent so us le p in cea u (lu Marseillai s en Hi52 : l'im age du guerri er d rapé d e 'l'ouge de Poliphilc au bain des N ym­pJu's , s i fa mili ères au voca bul a ire ita li en, repa ra ît da ns le Bop/hue de Cons­l an t in , pal' exem ple.

L 'u\, id ih" de cette culture o uverte, ce lte e Ul'iosité sans prt'jugés sont " ussi ce lles du Montpelli érain Sébas ti en Bourdon (1616-1671) [fig. 69 ], tourné \Oe rs les mêm es sources:.!! el dont les eX IH' r icnces di verses ne sont l'as sans rappe lcr cell es d e Pu get 22 .

Mai s Pu gel - on le sa il depui s le S alua/ or Mundi - ne sera ni un e sort e de Luca Gio rd uno, ni un a utre Sébastien Bo urdon , ni mê me u n Pi cr-F ran­ceseo Mo!:!. ..

C'es t a u Sa /va/or A/undi qu e se r elie, en plus accompl ie, l' A nnoncia!i< Il (Ai x, lIIu sée de l'Arche\'êch é J [ fi g. 72-73] , pein te en 1658, ta blea u d'" ul eJ comm e le pr('c(' denl, peinture tenùre et fin e où le réali sme s 'alli(' ft un

20. ~uget possédai t a u mo ins cinq copies de Va n Dyck c t un po rt rait du maî tre par un pe llll re flamand (voir Inventa ire). Les rapports de Puget avec l'a r t de Van Dyck on t ék bien sou lignés par L AG R,\NGE e l confi rmés par Hr:RDI~Go D'après un lex ie du XV III" s iècle ci té p3r Léo VAN PUYVEI.OE ( Van Dyck, 1964, J)o 32) Va n Dyck pcjnt il Gènes en t re 162 1 et 1627 q ua tre-vingt-d ix·ncuf tab lcaL~x dont soixante-douze port ra it s qui é taient encore dans tout leur écla t en 1660

21. Puge t possédait un tableau d 'après "M. Bourdon " (Inventaire). D'au t re pa.-t I~ <..:D il ection de J .. B. Boyer d 'Eguille-s (1645-1709), Qui fut un ami de Puge t (Ci'IENNEVŒRES, op, dL, 1, p o 109), comporta i' plus ieurs ta bleaux de Séb~l st ien Bourdon (auprès de pein tu res :ltlribuêes aux Carrache, il Guido Ren i, Caravage, Rib~ra , Valent in, Car lo Mara lta, Va le rio Cas tello, Cast iglione, Rubens e l Va n Dyck qui tous fon t pa rt ie de la culture de Puge l ).

220 Il serai t inté ressant de I?ollvoÎr préciser les échanges qui pu~en t nvoir li eu

~n Tï66~~n C~;;'l~e Pd~~P;~f~~~r;Bii l~S~;alfiJe Ldél~C~~e ,~~~~2' :~J:2ss~~~~c t~~~~ 1111~e~rull~a?t6~9~ 1690) : « le pe in tre est mal à l 'a ise avec la gdcco (000) Il y a chez lu i tl ne sorle de rus t ic ité, un espri t de pesanteur, qui d'abo rd nc paraît pas à son avantage. ,,(1. T II UILI. IER. préface du ca ta logue Lebrun , 1965. p. XX IV ), Du Mw;i;tS Scaevola (peint en I ta lie cnll'c 1643 C i 1645, cal. nU 19), qui fa it la t ransition rlvec POllss in, ;'I ll TriulIlphe (/'l1lexamlre (v. 1665) les ra pprochements, de détails tout au moins, s 'imposen t , même si les carri èrc:; cl fin a le ment les ta lents d iffèren t abso lume nt.

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121

lyrisme évident sous la réserve apparente. La douceur et la fernleté du Guide, sensible en particulier dans le visage de Marie construit comme celui de la Vierge du Sommeil de l'Enfanl Jésus (d'après le Guide, musée Long­champ), le modelé sans volume, <flle l'on observe a ussi chez Poussin, par glissements ùe couleur plus ou moins c lai ,"c .- les passages se réduisant souvent à ùes cernes de couleur plus souten ue - s'unissent à la fluidité de Pierre de Cortone dont on l'cconnait la marque dans le type et le mouve­nlent ondoyant de l'ange. Et brusquement, en 1659, semble-t-il, après avoir atteint ce nouvel équilibre, s'affirme une orienlalion nouvelle jalonnée par la Visitalion (Aix, mus(-e Granet) [fig. 74 ] . Cette grande peinture (qui fait parLie de la même commande qlle l'Annonciation ) marque un retour au baroque mais non pas au baroque a imable de Pierre de Cortone. C'est à travers Rubens:.!J:I que Puget rejoint le baroque : il est prêt à assinliler l'expérience génoise.

A Gènes, de 1661 à 1668, il s'imprègne de la technique de Van Dyck dont il exécute des copies et il conçoit une adnlÎration justifiée pour l'art de Giovanni Benedello Castiglione (1600/10-1665) [fig. 81 et 83 ] dont il possédera au moins un dessin ~ ... On nleSUfe mal encore l'importance de ce peintre dont le pinceau ll"adllÎl directement le sentiment, moins à la manière de Magnasco - dont la technique s 'apparente beaucoup au "truc" - qu'à celle de Van Gogh plus tard "'. AdmirutclIr llli allssi ùe Van Dyck, il fut

23. Voir L. MALBOs, Hommage à Rembrandt (Aix, 1970), p. 18, note 7 : « La compo­sition de la Visitation de Pierre Puget peut l'tre une réminiscence de celle de Rubens, datée vers 1606-160~ (aujourd'hui à la Villa Borghèse), reprise d~jà par Rubens dans le volct gauche du triptyque de la cathédrale d'Anvers (1611-1614). »

24. Castiglione quitte Gênes dès 1663 pour Mantoue où il meurt peu de temps après. Il est donc peu probable que François, âgé seulement de treize ans en 1663, ait pu travaillé auprès de Giovanni Benedetto Castiglione comme la tradition l'a rapporté (L. MALBOs, op. cit., p. 19, note 8).

25. La Vierge à l'Enfant lisant (fig. 80) de la collection Boyer d'Egu illes par exemple doit peut -être plus à Castiglione qu'à Corrège, Guerchin ou Reni. Voir en particulier la Vierge à l'En/wu (fig. 81), Gênes, coll. privée, n" 73 du catalogue "Pittorî Genovese a Genova nel ' 600 e nel' 700", Gênes 1969. L'auteur de la notice la date de 1645 environ et en relève les affin ités avec la technique du jeune Valerio Castello. De même, le modelé par touches parallèles, longues et fines, qui structure la surface de l'aquarelle de L'Edl/cation d'Achille (fig 82), procède directeme~l de la technique de G.-B. Castiglione (voir en partÎc~licr le nu 72 du cata logue cité, Convllo COll lin Sa/in: (fig. 83), v. 1640, et le nU 80; Crt/ciftxÎon, v. 1655-60).

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122 M.-CH. GI.OTON

admiré de peintres indépenda nts comme Sal\'alor Rosa ou Sébaslien nOIlI'­

dml, dt."j à rencontrés à propos de Puget. On yoit ainsi les chemins de hl peinture se croiser sans jamais se confondre.

Ces rencontres génoises confirment Puget dans sa nouvell e voie. La Sain le Famille de la collection du marquis de Saporta (châtea u de Fonsco­lombc) planche couleur, de IH63 environ, illu s tre la matu rité du peintre, Etrange Sainte Famille, à la fois majestueuse et famili ère. L'ampleur des figures presqu e grandeur nature impressionne. Le jeu précieux des bras dc Marie sou tenant ('Enfant contraste avec la lassitude très humaine du YÎsage.

Le froissé soyeux des plis, le modelé ùes carn a tions, pal' glacis co lOl'cs <qui est aussi celui de l'Alltoportrait du musée Granet, 1670 environ), la dislinc­lion de l'image dénotenl l'influence de Van Dyck certes, m ais Puget doil ht'3UCOUP au raffinemenl familier (l e Valerio Caslello ( 1f)24-1(;5H) [ fig. 7H J

ct d e Domenico Pi ola (162Î-1702 ), qui est J'ami inlime du pl'(.'miel'. Des témoignages anciens é\'oquenl l'admiration de Puget pOUl' Valerio Cas­tello 2 •• Quant à Domenico l'iola, il travaille en 1662 aux fresques ùe la cha­pelle Saint-Louis ùe l'Annunziata. dont Puget est le pri eur et pour la'lu elle le Marseillais aurait donné des dessins 21.

Œuvre forte, vivante, profonùe, celle Sainte Pamille SOIIS lin palmier illustre la maîlrise picturale d'un Pugel enfin lui-même, celui d e l'Au topor­

trait (musée Granet) el de l'Education d'Achille, de 1685 environ (fi g. 82). Le musée Longchamp conserve une aquarelle et L1ne peinture S UI' le mème thème. L'aquarelle seule permet d'apprécier pleinement l'expression ly riqu e, parfaitemelll synthétique, du baroq ue le plus pur, proche de l'al' t des roman-

26. «Son enthousiasme pour l'école génoise allai t si loin, qu'on le VOY<'lÎl, Ü <?c quc raconte le Ratti. rester longtemps en contemplation dev~nt les fresques de Valcn~ Castello ; e t, comme on s'en étonnait : Vraiment, répondit'll, c'est un peintre dont Il faut tout louer, jusqu'à ses imperfec tions. » ( L AGRANGE, op. cil., p. 92).

27. ~f. LA~R,\NGE, op. cil., pp. 92 et 394. Vers 1662, on s igna le (L.O\GRANGE, p. 34) la co llabora tion de Piola aux peintures du dôme de San Siro de Gênes avec Giovanni BallÎsta Ca/·lonc (1592·1677). Puget est encore en relat Îon avec ce dernier en 1672. Collaboratiol) fructueuse sans doute pour Puget e t dont l'apport reste à préciser. G.-B. Carlone senti t ,'auteur des tumultueuses Chutes de Phaéton peintes au plafond du grand sa lon du château dt: Cagnes (v. 1625) c t du sa lon du palais Lascaris à Nice (v . 1650·60).

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PUGET ET LA PEINTURE 123

tiqu es. Si la technique pl'ofit e de l'exemple du plus mod erne d es peintres gén ois G.R. Castiglion e (fi g. 83), l'Œuvre ne se réfè re plus a ux modèles du passé mai s nOli s p roj ett e a u contraire dans l'avenir.

N'a-l-on pas cu honte pa rfois des pei ntures de Puget 1 Il es t temps d e r emettre ce p eintre à sa jus te place: un peintre qui a vécu pleine ment son temps, sensib le aux mouvem ents di"ers qui agit ent la peinture entre 1650 e t 16HO, a ttentif a u x expé ri ences du passé qui peuvent a ider à réso udre les pl'oblèmes du pl'ésent. Une pel'sonna lité en pel'pétu elle r echcl'che qui retlète u n tempéramen t inqui et el exigeant, un ar tiste vivant, inépuisable. Puget a va it un e passion de la d e qu i r emportait sur tout : Lagran ge l'a jus tem ent so ulign é à plusi eurs rep ri ses et en d ésespoir de cause 2 8, moins libre que nous, face a ux critères académiqucs p our juger une peinture a ussi p cu "académiqu e". E s t-ce cette passion de la vic qui lui fa it percevoir puis tra­duire l'étrangeté d es ch oses que presqu e tous ses ta bleaux, par leur am­bian ce o u pal' un détail particulier, nOli s su ggèrcn t ? Un e ombre lumineuse qui souli gne un e malicieuse presence enfantin e, derrière le pape Sylvestre, un trôn e fantas tiquc qui contraste a vec la sUhoue tte prosaÏquc de l'empe­reur, un e silh ouette difTorme qui g li sse dan s le contre jour de ba lustres d ém esurés ... E st-ce pu re coïncid en ce si on retrouve, chez Marc Chabry par exemple. le goût d'un détail soudainement étra nge? " . Puget nous étonne. Mais le grand ar t des ba roqu es n 'est-il pas ùe n Oli S obliger à regard er d'un œil neuf les formes de la vie?

M.-CIL GLOTON.

28. L\GRANGE, op. cil., p. 77 e t 78 : « Je nc défends pas Puget , je cherche à me l'expliquer et à l'expliquer au lec Leur. .. l>.

29. Vo il' pilis bas la communication (h: M. F. PEREZ.

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61. Pu ge t, Saill Ie Cécile (1651). seille, Musée des Beaux·Arts.

(CL Borel)

62. - Pierre de Cortone : 1ellt de Sémiramis (1620-24).

Coll. Denis Mahon. (Extrait de Briganti , Pietro da Cortona.)

63. - Pierre de Cortone . 10 11 de Ma rs (dé tail) - 1646.

Florence, Palais Pitti Maestri de l colore, 109 )

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Fig. 67. - Puget : Hercule gaulois (détail) .

Musée du Louvre.

Fig. 65 ct 66 : Puget, Baptême de Constan l

(1652). Marsei lle. Musée des Beaux-Arts.

(CI. Borel

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Fig. 68. - Puget, Baptême de Clovis (1652). Marseille , Musée des Beaux-Arts. (CI: Borel,

Fig. 69. - Sébastien Bourdon, Saint Pierre de Nolasque recevant l'habit de l'ordre de la Merci (v . 1660). Saint-Germain-l'Auxerrois (extrait de Trésors d'art des Eglises de Paris).

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Fig. 74. - Pierre Puget , Visitation (1658). Aix-en-Provence. Musée Granet.

Fig. 72 et 73. - Puget, Annonciation (1658).

Aix.en-Provence" Musée des Tapisseries.

(CI. Nicollas)

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Fig. 80. - Puget, Vierge lisant Marseille, Musée Longchamp.

Fig. 81. - Castiglione, Vierge à l'enfant (v. 1645) . Gênes, coll . privée.

(Extrait de Mos/ra dei Pittori Gel1ovesi,)

Fi,. 7J - Luc.s Giordano, S"jn/~ Calherin~ d'A{cJ(alldri~ /Ondllilt' ou /'1lortyrt' (1659). CathédrnJe de CapO(Hmonte

Fig. 76. - Giovanni da San Giovann i, A"jllét' dt' {a Sainft' Famillc à l 'Allbergt' (1621). Florence, Académie des Beaux-Ans

(Extraie de W:at.:dlOllse, lIafian Ba,oqu~ Pai/llingj Fig. 77. - Pier Franttsco Mala, Joseph el ses Irères (fresque, 1657)

Rome, Quirinu! (Enrait de Waterhouse, op. cil.) Fig. 78. - Romanclli, Saint Thomas d~ Ville/leu/J~ distribll(lnt des IUmI6/1 ~1

IV. 1660). New-York, Coll. privée (Extrait de Wmkowcr, Art ;/1 Tta{y ) Fig. 79. - Valerio Castello, SainU fll",iIl~

(v. 1646) G~nes, Palazzo Bianco (Extrait de " Mos/ra dâ", PiIlor; g~no/J~Ji,

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Fig. 82. - Puget, Education d'Aci/i/le (v. 1685). Marseille, Musée Longchamp.

(Cl. Bore! )

Fig. 83. - Castiglione, Repas avec WI satyre (v. 1640) . Gênes, Coll. privée.

(Extrait de M oslra dei Pittori Gellovesi.)