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- 25 - III. FonctIon germInAle et endocrIne de lA Femelle A. Fonction germinale La fonction germinale de la femelle regroupe le stock- age des ovocytes formés pendant la vie embryonnaire, la croissance folliculaire et la libération d’un ovocyte fécondable, puis la formation du corps jaune et la pré- paration de l’utérus à l’implantation. Les ovogonies se développent à partir de la multiplica- tion des cellules germinales primordiales qui ont migré. Elles donnent pendant la vie fœtale des millions d’ovocytes primaires. Le stock d’ovocyte est à peu près constitué à la naissance. On constate même une involution dès la fin de la vie fœtale par diminution du nombre d’ovogonies et d’ovocytes primaires. Une couche de cellules folliculaires entoure les ovocytes primaires et l’ensemble forme les follicules primor- diaux. Généralement il ne se forme pas de follicules primordiaux après la naissance. L’involution continue après la naissance et concerne les follicules primor- diaux. Vers la puberté, le nombre de follicules peut tomber à quelques centaines, il correspondra au nom- bre d’ovocytes destinés à ovuler. Contrairement au spermatozoïde, l’ovule restera une structure très peu différenciée hormis dans un sens qui est celui de l’augmentation de la taille. La méiose s’ac- compagne ici de la formation de cellules qui arrêtent leur destinée germinale, les globules polaires. C’est une diminution du rendement qui contribue à ce que le stock soit très inférieur à celui des gamètes mâles. La seconde division méiotique de l’ovocyte reste bloquée. Elle ne reprendra que lors de la fécondation. Figure III.1. Représentation schématique d’un ovaire 1-Développement et maturation folliculaire Le développement et la maturation folliculaire aboutis- sent à la production d’ovocytes aptes à la fécondation. Ils incluent la maturation de l’ovocyte, mais celle-ci sera traitée à part dans le paragraphe 2. Étapes de la folliculogenèse C’est la croissance et la maturation du follicule entre la réserve constituée par l’ovogenèse et l’ovulation qui correspond à la rupture du follicule. La première partie de cette évolution a lieu au cours du développement, dans la gonade prépubère. La seconde partie corre- spond à la maturation folliculaire observée lors de l’ac- tivité cyclique. La réserve est constituée des follicules primordiaux regroupant d’un ovocyte primaire entouré de cellules aplaties. Au début, ces follicules primordiaux sont dis- séminés dans tout l’ovaire, mais après la naissance, ils se localisent à la périphérie du cortex sous l’albuginée. Le follicule primordial va grossir et donne un follicule primaire qui contient un ovocyte développé et une couche de cellules cuboïdales, puis un follicule sec- ondaire dans lequel on observe deux couches de cel- lules de la granulosa, puis un follicule préantral, puis un follicule tertiaire (ou cavitaire ou à antrum débu- tant), et enfin le follicule mûr (ou de de Graaf, ou préovulatoire) (Figure III.1 et 2).

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I I I . F o n c t I o n g e r m I n A l e e t e n d o c r I n e d el A F e m e l l e

A . F o n c t i o n g e r m i n a l e

La fonction germinale de la femelle regroupe le stock-age des ovocytes formés pendant la vie embryonnaire,la croissance folliculaire et la libération d’un ovocytefécondable, puis la formation du corps jaune et la pré-paration de l’utérus à l’implantation.Les ovogonies se développent à partir de la multiplica-tion des cellules germinales primordiales qui ontmigré. Elles donnent pendant la vie fœtale des millionsd’ovocytes primaires. Le stock d’ovocyte est à peuprès constitué à la naissance. On constate même uneinvolution dès la fin de la vie fœtale par diminution dunombre d’ovogonies et d’ovocytes primaires. Unecouche de cellules folliculaires entoure les ovocytesprimaires et l’ensemble forme les follicules primor-diaux. Généralement il ne se forme pas de folliculesprimordiaux après la naissance. L’involution continueaprès la naissance et concerne les follicules primor-diaux. Vers la puberté, le nombre de follicules peuttomber à quelques centaines, il correspondra au nom-bre d’ovocytes destinés à ovuler.Contrairement au spermatozoïde, l’ovule restera unestructure très peu différenciée hormis dans un sens quiest celui de l’augmentation de la taille. La méiose s’ac-compagne ici de la formation de cellules qui arrêtentleur destinée germinale, les globules polaires. C’estune diminution du rendement qui contribue à ce que lestock soit très inférieur à celui des gamètes mâles. Laseconde division méiotique de l’ovocyte reste bloquée.Elle ne reprendra que lors de la fécondation.

Figure III.1. Représentation schématique d’un ovaire

1-Développement et maturation folliculaire

Le développement et la maturation folliculaire aboutis-sent à la production d’ovocytes aptes à la fécondation.Ils incluent la maturation de l’ovocyte, mais celle-cisera traitée à part dans le paragraphe 2.

Étapes de la folliculogenèse

C’est la croissance et la maturation du follicule entre laréserve constituée par l’ovogenèse et l’ovulation quicorrespond à la rupture du follicule. La première partiede cette évolution a lieu au cours du développement,dans la gonade prépubère. La seconde partie corre-spond à la maturation folliculaire observée lors de l’ac-tivité cyclique.La réserve est constituée des follicules primordiauxregroupant d’un ovocyte primaire entouré de cellulesaplaties. Au début, ces follicules primordiaux sont dis-séminés dans tout l’ovaire, mais après la naissance, ilsse localisent à la périphérie du cortex sous l’albuginée.Le follicule primordial va grossir et donne un folliculeprimaire qui contient un ovocyte développé et unecouche de cellules cuboïdales, puis un follicule sec-ondaire dans lequel on observe deux couches de cel-lules de la granulosa, puis un follicule préantral, puisun follicule tertiaire (ou cavitaire ou à antrum débu-tant), et enfin le follicule mûr (ou de de Graaf, oupréovulatoire) (Figure III.1 et 2).

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Figure III.2. Histologie des follicules

a-follicule primordial (x1000)

e-follicule tertiaire (x330)

d-follicule préantral (x380)

c-follicule secondaire (x540)

b-follicule primaire(x1000)

f-follicule de deGraaf (x85)

Croissance et différenciation du follicule

• Recrutement, croissance, sélection, dominance

Le recrutement correspond aux follicules qui vont sor-tir de la réserve et entrer en phase de croissance. Il sefait donc sur pool quiescent à partir de la naissance. Ilimplique pour les follicules recrutés une croissance etprolifération des cellules de la granulosa. La mutationspontanée du récepteur à FSH chez la femme et lessouris knock out pour le gène de la sous-unité ß FSHont mis en évidence le fait que le recrutement était sousdépendance de FSH. Le nombre de cellules quittant la

réserve varie selon les espèces (1 à 3 par jour chez labrebis) mais aussi selon l’âge (15 par jour chez lafemme de 20 ans contre 1 à 40 ans).La croissance folliculaire basale conduit du folliculesecondaire au follicule à antrum qui sera sélec-tionnable. Elle est caractérisée par une augmentationde la vascularisation thécale associée à une surproduc-tion d’un facteur angiogénique, le VEGF, une augmen-tation de l’activité aromatase par les cellules de lagranulosa et donc de la production d’oestrogènes. Elleest principalement sous dépendance de facteurs decroissance comme l’IGF1 ou l’EGF.L’existence d’une sélection du (ou des) follicule qui va

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ovuler pose la question de savoir quels critères perme-ttent cette sélection. La destruction de tous les fol-licules de plus de 5 mm chez la vache à l’exceptiond’un seul choisi au hasard, induit le développement dufollicule restant et son ovulation. Cette constatationmontre qu’il n’existe pas de follicule prédestiné. Lesfollicules sélectionnables présentent une hétérogénéitédans leur niveau de prolifération, et dans leur taux destéroïdogenèse et de facteurs de croissance. Cettehétérogénéité est liée à des variations dans la date d’en-trée en croissance, dans la position dans l’ovaire, dansla vascularisation, et dans l’exposition auxgonadotropines. Le démarrage du développement ter-minal est associé à une augmentation des taux d’œstra-diol et d’inhibine qui vont inhiber respectivement LHet FSH. Le follicule sélectionné sera probablementcelui le plus adapté à ce nouvel environnementendocrinien limitant et plus précisément celui le plussensible à FSH donc possédant notamment plus derécepteurs.La dominance correspond à la sécrétion par le folliculesélectionné d’une “follicular regulatory protein” (FRP)qui va supprimer la réponse des follicules sélec-tionnables aux gonadotropines. Le follicule dominantva de plus avoir des besoins en FSH réduits grâced’une part à l’IGF1 qui va amplifier la réponse à FSHet d’autre part à la présence de récepteurs à LH, cesdeux éléments assurant une production élevéed’AMPc.

• Transition prolifération - différenciationLa maturation des follicules est d’abord fortementdominée par une phase de croissance associée à uneprolifération importante des cellules de la granulosa etde la thèque. C’est le follicule sélectionné qui va com-mencer à subir une véritable différenciation concomi-tante de l’augmentation de la taille de l’antrum. Lesfonctions sécrétoires subissent alors une augmentationd’activité synchrone permettant l’augmentation de laproduction d’androgènes par la thèque et de l’aromati-sation par les cellules de la granulosa assurant ainsi laproduction d’œstradiol (Figure III.3).

• Le follicule préovulatoireIl est caractérisé par une taille maximum (8 mm chezla brebis) et un nombre de cellules de la granulosamaximum mais avec un taux de mitoses faible. Onconstate une concentration d’œstradiol élevée dans leliquide folliculaire, la présence de récepteurs à LH surla granulosa, de nombreuses communications intercel-lulaires de type gap, et un flux sanguin élevé.L’expansion du cumulus est sous dépendance de FSH,elle correspondant à la production d’une matrice vis-coélastique riche en acide hyaluronique. Le cumulusfournit des métabolites et transmet des signaux versl’ovocyte, il favorisera le détachement du complexecumulus-ovocyte et sa capture par le pavillon pendantl’ovulation (Figure III.4).

Atrésie folliculaire

Elle correspond à l’involution des cellules de la granu-losa puis de la thèque.

• DescriptionHistologiquement, des images de pycnose apparaissentdans la granulosa, les follicules à antrum subissent laperte de jonctions perméables, une fragmentation de lalame basale puis une diminution de la taille du folliculeet de la vascularisation thécale (Figure III.5).Fonctionnellement, l’activité aromatase est la premièretouchée brutalement, puis la production d’androgèneset la réponse aux hormones gonadotropes (FigureIII.6). Au sein du follicule, on constate une

Figure III.3. Prolifération et différentiation

Figure III.4. Représentation d’un follicule préovulatoire

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hétérogénéité dans la mort cellulaire. Il semble que lescellules les plus différenciées survivent mieux. Eneffet, les cellules produisant moins d’hormonesstéroïdes meurent les premières, et les cellules prochesde la membrane basale qui sont les cellules les plus dif-férenciées résistent mieux. L’existence d’une compar-timentation cellulaire dans les cellules de la granulosa,permet une continuité de production d’œstradiol pen-dant la mort cellulaire.

Figure III.5. Modifications histologiques de l’atrésie

Figure III.6. Modifications fonctionnelles de l’atrésie

Figure III.7.Mécanisme simplifié

perméabilité mitochondriale, active une voie antioxy-dante et a un effet protecteur de l’apoptose à l’inversede bax (Figure III.7). Des expériences récentes ontmontré que les souris knock out pour le gène de Bcl-2présentaient une diminution du nombre de folliculesprimordiaux et une apparition de follicules sans ovo-cyte. Inversement des souris surexprimant le gène Bcl-2 sont caractérisées par une diminution de l’apoptosedes cellules folliculaires et une diminution du nombrede follicules atrésiques. En revanche ces sourisdéveloppent des tumeurs des cellules germinales et fol-liculaires.

• Modulation de la survie des cellules de la granulosa.L’apoptose spontanée des follicules préovulatoires enculture est supprimée par un apport de FSH et LH.Outre ces hormones, des facteurs stimulants de lasurvie folliculaire ont été identifiés comme l’insuline,l’IGF1, l’EGF. Inversement il semble exister une bal-ance avec des facteurs inhibiteurs comme le TNFα oul’IL6.

L’ensemble de ces mécanismes de maturation et sélec-tion suggèrent que l’ovaire ne fonctionnerait pas aumaximum de ses capacités mais selon une adéquationavec la capacité utérine et le nombre de mamelles.

• Mécanisme impliqué dans l’atrésie : l’apoptose.Des molécules caractéristiques de l’apoptose sontexprimées par les cellules de la granulosa. Très sché-matiquement des caspases dégradent les laminesnucléaires et la PARP poly(ADP-ribose) polymerase,qui est une enzyme de réparation de l’ADN, ellesactivent aussi des endonucléases à l’origine des rup-tures dans la chaîne d’acides nucléiques. Bcl-2 règle la

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2- Maturation de l’ovocyte

C’est l’acquisition de la capacité à assumer la féconda-tion et à supporter le développement embryonnaire.Par maturation de l’ovocyte, on entendra les modifica-tions du noyau intervenant à la reprise de la méiose lorsde la croissance terminale, les modification cytoplas-miques conséquentes, et les mécanismes de reprise dela méiose.

pulsion du premier globule polaire.Le blocage méiotique est assuré par l’OMI ou “oocytemeiotic inhibitor”. L’OMI est une molécule d’originefolliculaire synthétisée grâce à une coopération de lathèque et de la granulosa, et qui transite par le cumulus.La reprise de la méiose ne peut advenir que pour unetaille minimum de follicule correspondant à une crois-sance du cytoplasme, une différenciation des mitochon-dries, une synthèse et un dépôt de vitellus et des ARNs,et une disparition des centrioles. La reprise de la méio-se est conditionnée par l’augmentation de LH qui induitune rupture des jonctions perméables unissant l’ovocy-te au cumulus et l’arrêt de transmission de l’OMI àl’ovocyte. La corona reste liée à l’ovocyte et permet lepassage de facteurs de maturation. La décharge gona-dotrope induit aussi une déphosphorylation de résidusthréonine et tyrosine du M-phase promoting factor (oumaturation promoting factor, MPF). Cette molécule estalors activée, puis auto-entretient son activité. Elle par-ticipe à la synthèse de cyclines nécessaires pour laméiose, possède une affinité pour des lamines, des his-tones et des protéines associées aux microtubules, per-mettant ainsi la condensation des chromosomes et desremodelages du cytosquelette (Figure III.10).Le nouveau blocage méiotique à l’ovulation sera con-ditionné par un facteur cytostatique, le CSF

Figure III.8. Maturation de l’ovocyte

Modifications du noyau

Pendant la vie fœtale, l’ovogonie entre en méiose. Unblocage méiotique survient dans l’ovocyte I en propha-se I au stade diplotène (Figure III.8). Ce blocage estmaintenu à partir de la naissance pendant la croissancefolliculaire, et la reprise de la méiose n’interviendra quechez l’adulte en réponse à LH lors de la croissance ter-minale du follicule conduisant à l’ovulation. Cetteméiose associée à une maturation du noyau reprend etpasse par les stades de métaphase I, anaphase I, télo-phase I jusqu’en métaphase II où survient un nouveaublocage méiotique qui cette fois ne sera levé qu’à lafécondation (Figure III.9).Il existe des différences interspécifiques dans les struc-tures impliquées dans les différentes phases successivesde la méiose et dans la chronologie des modificationsnucléaires. Chez les ruminants et les rongeurs, l’expul-sion du premier globule polaire, qui a lieu en métapha-se II, survient juste avant le blocage méiotique à l’ovu-lation. Chez la chienne, l’ovulation à lieu avant l’ex- Figure III.9. Maturation de l’ovocyte

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Modifications du cytoplasme

La dislocation du complexe golgien conduit par unemodification de la couche d’actine à la concentrationdes granules corticaux à la membrane plasmique, gran-ules qui interviendront contre la polyspermie.On observe un rassemblement de mitochondries enzone périnucléaire et une forte synthèse d’ARN pen-dant la croissance ovocytaire avec stockage puis uneaccumulation de protéines de réserve dans le nucléoleformant une masse dense, puis une chute des synthès-es. Un contrôle traductionnel s’exerce et permet d’aug-menter spécifiquement la synthèse de protéines derégulation de la méiose, de protéines membranaires,d’activateurs tissulaires du plasminogène, et de fac-teurs permettant la décondensation de la chromatine.

3- Ovulation et mise en place du corps jaune

Ovulation

Elle concerne le follicule dominant qui répond à uneélévation brutale de FSH/LH par un remaniementstructural conduisant à sa rupture et à l’expulsion del’ovocyte mûr.

Les changements morphologiques commencent par lathèque externe qui devient œdémateuse, les cellules dela granulosa se détachent de la lame basale, l’arrange-ment en colonne des cellules, et les jonctions per-méables disparaissent, le cumulus se dissocie, et lescellules épithéliales meurent. La destruction des assis-es folliculaires conduit à la rupture du follicule (FigureIII.11).Les changements métaboliques ressemblent à ceuxobservés lors d’une réaction inflammatoire locale. Ladécharge ovulante de FSH et LH active l’adenylatecyclase et induit une augmentation d’AMPc (FigureIII.12). L’ovulation peut d’ailleurs être mimée parapport d’AMPc. L’AMPc induit :• la synthèse de prostaglandines et d’histamine par lescellules de la thèque et de la granulosa, molécules quiconduisent à une hyperhémie, une perméabilisationvasculaire, et un œdème. • la synthèse d’activateurs du plasminogène, de plas-mine et de collagénase qui induisent la dissociation desfibres de collagène.• la formation de lysosomes de l’épithélium et lalibération d’enzymes lysosomiales.L’ensemble de ces évènements conduit à la rupture fol-liculaire, induisant une baisse de pression hydrosta-tique, et une contraction de l’ovaire et des cellules dela thèque externe grâce à une innervation α-adrén-ergique et à la présence de protéines de la contraction.L’ensemble produit l’expulsion de l’ovule.

Figure III.10. Activité du MPF

Figure III.11. Modifications histologiques de l’ovulation Figure III.12. Modifications fonctionnelles de l’ovulation

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Formation du corps jaune (cf. fonction endocrine)

Le corps jaune s’installe dès l’ovulation terminée. Iln’y a pas d’effondrement de follicule vide, qui se trou-ve rempli rapidement car la sécrétion de liquide follic-ulaire se poursuit, il y a une hémorragie et le caillot quien résulte forme un bouchon. La progestérone limite laréaction inflammatoire, et on observe une lutéinisationdes cellules de la thèque interne et de la granulosa con-duisant au corps jaune. Les cellules de la granulosa semultiplient et leur taille augmente (multiplication par 8chez la Truie), le noyau est souvent polyploïde. Elles sechargent de pigment (lutéine, du latin luteus, jaune).Les cellules thécales restent petites et jouent un rôlevariable selon les espèces. Elles restent groupées à lapériphérie du corps jaune chez la femme alors qu’ellesse mêlent aux cellules de la granulosa et forment alorsune population dite des petites cellules lutéales répar-ties entre les grosses cellules chez la Vache et laBrebis. Globalement le tissu est plus homogène qu’a-vant l’ovulation. Du point du vue endocrine, les petiteset les grosses cellules lutéales produisent les mêmesstéroïdes.On observe la formation de travées vasculaires, crêtesqui progressent des parois vers le centre et la formationd’une structure qui a l’aspect endocrine (capillaires).La néoangiogenèse est déclenchée par la rupture de lalame basale, et le caillot central régresse.Le corps jaune est fonctionnel quand il sécrète de laprogestérone. Cette activité est en partie corrélée àl’évolution morphologique. Par exemple chez la Brebisle corps jaune augmente de taille jusqu’à J10, com-mence à décroître vers J12 et décline jusqu’à J14. Lasécrétion de la progestérone apparaît dès le 2e jour.Chez certaines espèces, la présence d’un corps jauneen fonctionnement n’est pas systématique à chaquecycle (soit parce que l’ovulation n’a pas eu lieu, oubien que le corps jaune n’est pas fonctionnel). L’entréeen activité de ce corps jaune déterminera alors unephase spéciale du cycle génital, la pseudogestation.

La lutéolyse est la régression fonctionnelle du corpsjaune. Cette interruption fonctionnelle est plus rapideque la régression morphologique. La lutéolyse marquela fin du cycle. La lutéolyse explique la baisse rapidede progestérone. Elle est induite la plupart du tempspar la libération de PGF2α. La régression mor-phologique se poursuit après la fin du cycle, sur le oules cycles suivants, pendant plusieurs semaines. C’estalors une structure inerte qui involue lentement,devient blanc “corpus albicans” ou brun pâle, tout ens’enfonçant dans la medulla ovarienne. Il présente uneallure de tissu cicatriciel.

4- Les cycles ovarien/endocrinien/génital/oestral (cf. travaux dirigés)

On n’abordera ici que les définitions des différentscycles et les caractéristiques générales, en effet cescycles varient fortement en fonction de l’espèce, ilsseront donc vus pendant les travaux dirigés sur lesétudes spécifiques.

Le cycle ovarien

Le cycle ovarien a été décrit dans les parties précé-dentes, il est généralement décomposé en phase follic-ulaire et phase lutéale séparées par l’ovulation. Onobserve de grandes variations dans la durée du cycle etde ses phases (Figure III.13), mais aussi dans la péri-odicité de survenue au cours de la vie (ménopause chezla femme) ou au cours de l’année.On décrit des cycles avortés ou ébauchés qui sontanovulatoires. Cela se produit autour de la puberté,chez la lapine ou la chatte, les follicules arrivés à mat-uration et n’ayant pas subi l’ovulation involuent. Chezla jument, où une maturation folliculaire a lieu pendantla gestation, plusieurs générations de corps jaune appa-raissent et subviennent aux besoins en progestérone.On décrit aussi des cycles incomplets. Le corps jaunes’installe, mais n’est pas fonctionnel. C’est le cas de laRatte, de la Souris, de la femelle Hamster. Dans cesespèces, il n’y a pas de post-œstrus, et le corps jaunefonctionnera seulement pendant la gestation ou pendantune pseudogestation.

Le cycle endocrinien

Le cycle endocrinien s’intéresse aux variations hor-monales. Il concerne les hormones gonadotropes, leshormones stéroïdes mais aussi la prostaglandine ou laprolactine. Encore une fois la variabilité interespèce esttrès marquée.

Le cycle œstral

Le cycle œstral est le cycle du comportement de lafemelle, dont les modifications les plus spectaculairessurviennent lors de l’œstrus. L’œstrus est le point derepère du cycle sexuel chez l’animal, alors que c’est la

Figure III.13. Durées des cycles dans différentes espèces

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menstruation chez la femme. Le terme d’œstrusdésigne la période, souvent très limitée dans le temps,où la femelle accepte l’accouplement. Par rapport àcette période, on distingue différentes phases qui peu-vent être mises en correspondance avec les phases ducycle de l’ovaire, qui est l’un des principaux facteurs dela cyclicité de l’état endocrinien, mais il n’y a pasnécessairement coïncidence, par exemple l’œstrus etl’ovulation ne sont pas simultanés. L’anœstrus est lapériode de repos où les ovaires et organes accessoiressont au repos, et où la femelle ne recherche pas de mâle.Le pro-œstrus marque la reprise de l’activité sexuelle lafemelle, il correspond à la phase de maturation follicu-laire et à l’imprégnation œstrogénique. Pendant l’œstrus, il y a des modifications mor-phologiques de l’appareil génital (congestion, sécré-tion, œdème), des manifestations réflexes favorisantl’accouplement, comme la déflexion latérale de laqueue, l’immobilisation par pression sur les lombes, oula prise spontanée de postures typiques, de comporte-ment de chevauchement, ou de vocalisation.Le post-œstrus désigne la période qui suit l’œstrus,mais dans laquelle existent des modifications actives del’appareil génital. S’il y a un anœstrus, il n’est pasinclus dans le post-œstrus. On distingue le met-œstruscorrespondant à un retour à situation antérieure àl’œstrus, et le di-œstrus qui est seulement une petitepériode d’anœstrus avant la reprise du pro-œstrus.

Le cycle génital

Le cycle génital correspond aux modifications his-tologiques du tractus génital. Un frottis permet, du faitdes variations histologiques marquées, de déterminerla période du cycle.

• Pavillon et trompes.Au cours du proœstrus, le diamètre tubulaire augmente,les cellules glandulaires de l’épithélium grossissent etmontrent une activité sécrétoire qui va en s’accentuantprogressivement, la fréquence de vibration des cils descellules épithéliales augmente progressivement, lamusculeuse se contracte périodiquement avec des mou-vements péristaltiques et antipéristaltiques qui aug-mentent en fréquence et en amplitude au fur et à mesurede l’évolution de la maturation des follicules. Àl’œstrus, on observe une accentuation brusque de tousces phénomènes. Les cellules glandulaires de l’ép-ithélium excrètent dans la lumière leurs produitsd’élaboration (mucoïdes, protéines), et les mouvementspéristaltiques passent de 2-8 à 12-15 contractions parminute. Cependant le transit tubaire n’est pas accélérépour autant, la jonction utérotubaire restant quelquetemps imperméable. Au post œstrus, on assiste à uneinvolution tubaire progressive touchant l’activité cili-aire, glandulaire et musculaire.Toutes ces modifications tubaires permettent la nutri-tion et la progression de l’œuf.

• UtérusAu cours du cycle, l’utérus présente une évolutionfonctionnelle intéressant la musculeuse (myomètre), etune évolution structurale intéressant la muqueuse(endomètre).La motricité a son point culminant à l’œstrus et inter-vient dans la remontée des spermatozoïdes (cf TD).Le développement de l’endomètre est maximum à la findu post-œstrus et intervient dans la nidation de l’œuffécondé. Au proœstrus, la muqueuse ne comportequ’une ou quelques assises de cellules avec glandestubulaires rudimentaires. Ces assises cellulaires se mul-tiplient progressivement, s’épaississent en même tempsque se creusent les glandes et que le nombre de cesglandes augmente. En même temps, il y a accroisse-ment de la vascularisation. Chez la chienne apparais-sent des suffusions sanguines de plus en plus abon-dantes au fur et à mesure que l’on se rapproche del’œstrus. Cela se produit par passage d’hématies autravers des capillaires dilatés. Ces écoulements sontdifférents des menstruations qui correspondent àl’élimination de la muqueuse utérine, avec hémorragievraie. De plus la menstruation survient en fin de postœstrus. À l’œstrus, les couches sous muqueuses sonttrès congestionnées. Il y a un œdème du chorion de lamuqueuse. Chez la Chienne, le passage des écoule-ments du stade hémorragique au stade “jaune paille”marque la limite proœstrus/œstrus. Les écoulements sepoursuivent (activité sécrétrice et exsudation). Chez lavache, la congestion est très marquée pendant l’œstruset persiste même un peu après. De légères hémorragiespeuvent se produire. On les observe 1 à 3 jours aprèsl’œstrus chez environ 90 % des génisses et 50 % desvaches adultes. Le sang provient de l’utérus et résultede ruptures capillaires. La moindre fréquence de cesphénomènes chez les adultes résulte du fait que lesartères utérines sont plus repliées que chez les génisseset sont ainsi moins sensibles aux variations de volumede la paroi de l’organe. Au cours de l’œstrus, danstoutes les espèces, il y a invasion leucocytaire pardiapédèse et hypersécrétion glandulaire. Au cours dupost-œstrus, l’épaississement de la muqueuse se pour-suit. La cavité ne s’agrandit pas et la muqueuse qui pro-lifère se tasse dans un espace réduit et présente de nom-breux plis, il y a apparition de glandes. L’involution del’endomètre se produit à la fin du post-œstrus, très rapi-dement avec la lyse des structures. Dans le cas général,l’érosion commence par le sommet des plis et les pro-duits de lyse sont résorbés au fur et à mesure de leurproduction sans signes extérieurs. Chez les Primates,les phénomènes généraux sont comparables, mais l’in-volution utérine s’accompagne de l’élimination de lapartie superficielle de la muqueuse avec une hémor-ragie, la menstruation.

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B . F o n c t i o n e n d o c r i n e

• Col utérinIl se produit essentiellement des modifications sécré-toires, le col est recouvert d’un épithélium mucipare. Àl’œstrus, le mucus est abondant et liquide, il permetainsi le passage facile des spermatozoïdes. L’apparitionde cette glaire cervicale à la vulve peut être un signe deschaleurs chez la Vache. Au postœstrus, le mucus estplus épais et infranchissable.

• VaginLes modifications morphologiques portent sur le chori-on et l’épithélium, sur la composition cytologique duliquide vaginal. Chez la ratte au proœstrus, l’épithéliumse stratifie, l’examen d’un frottis montre une prédomi-nance des cellules épithéliales pavimenteuses qui pren-nent les colorants basiques. À l’œstrus, les couchessuperficielles subissent une évolution analogue à l’épi-derme. Il y a kératinisation. Un frottis montre alors descellules épithéliales en grand nombre et des plaquesépithéliales sans noyau ou à noyaux dégénérés (pycno-tiques). Ces cellules kératinisées, se colorent facilement

par des colorants acides. Au postœstrus, l’épithéliumest envahi par des leucocytes et subit une involutionrapide. Dans toutes les espèces, il y a développementprogressif de cellules à mucus, puis abondante sécré-tion de mucus, puis raréfaction du mucus et apparitionde quelques leucocytes.

• Glande mammaireLe tissu mammaire présente une croissance progressivependant le cycle. Pendant le proœstrus et l’œstrus, il ya développement du système excréteur, congestion enpériode d’œstrus. La croissance se poursuit maisintéresse le système sécréteur pendant le postoestrus.Dans certaines espèces à post œstrus très long commela chienne, la stimulation du système sécréteur est con-sidérable et peut assurer une lactation sans qu’il y ait eude gestation. La durée du post-œstrus et de 2 mois, cequi est identique à la durée de la gestation. Il y a appari-tion de lait, et d’un comportement maternel, on parlepour cela de lactation nerveuse.

La fonction endocrine correspond à la productionpar les ovaires des hormones sexuelles femelles.

Elle implique l'existence d'un cycle endocrinien enrelation avec le cycle ovarien, genital et oestral. Lecycle endocrinien est globalement caractérisé par unedomination des oestrogènes dans sa première partie etune domination de la progestérone après l'ovulation.

1- Les oestrogènes

Le terme d’oestrogène provient de ce que ces sub-stances induisent l’oestrus, c’est-à-dire ce changementcomportemental des animaux qui se caractérise parl’acceptation du mâle. Il existe des oestrogènesnaturels, l’oestradiol, l’oestrone (anciennement la fol-liculine), des oestrogènes synthétiques tel que l’éthyl-nyl oestradiol (fonction acétylénique en C17 -C =CH4), sélectionné pour la conservation de son activitépar voie orale. Il existe également des oestrogènes nonstéroïdiens dérivés du stilbène, avec pour chef de fil lediéthylstilboestrol, (DES), utilisé jadis commeanabolisant chez les animaux et dénoncé pour ses pro-priétés cancérigènes en 1979. Enfin, il existe desoestrogènes végétaux, présents dans un certain nombrede plantes et en particulier des légumineuses (certainstrèfles, par exemple le trèfle souterrain, certainesluzernes). Chimiquement ce sont des isoflavones,génistéine, coumestrol. Ces molécules posent aujour-d’hui un réel problème de santé publique, car leuringestion serait en partie responsable de la diminutionrégulière du nombre de spermatozoïdes produits par

les hommes. Nous nous limiterons dans la suite auxoestrogènes naturels gonadiques.

Synthèse des oestrogènes

La formation des oestrogènes chez la femelleemprunte les mêmes voies que chez le mâle (FigureII.19). A l’intérieur de l’ovaire, les LDL parviennentaux capillaires et entrent dans les cellules via leurrécepteur spécifique. Les cellules stéroïdogènes sontles cellules de la thèque interne, munies de l’ensembledes enzymes stéroïdogènes (voir le schéma de forma-tion des stéroïdes dans le chapitre II.). Elles sont lesseules à pouvoir synthétiser les oestrogènes, essen-tiellement représentés par l’oestradiol 17β, souventabrégé en E2, en raison des deux groupement hydrox-yle portés par cette molécule. Il est important de savoirque les cellules de la granulosa ont également la pos-sibilité de synthétiser les oestrogènes. Ces cellulessoient dépourvues de de la CYP17, ce qui interromptla voie de synthèse à la progestérone. Elles exprimenten revanche la 17HSD et la CYP19 et peuvent doncreprendre le cours des réactions enzymatiques à partirdes androgènes, DHA ou androstènedione. Ces deuxsubstrats diffusent vers les cellules de la granulosa àpartir des cellules de la thèque. Lors de la croissancefolliculaire, l’augmentation de l’activité aromatase

consubstantielle au nombre accru de cellules de lagranulosa est l’élément responsable de la forte haussede concentration en oestrogènes à cette période ducycle. L’aromatisation des androgènes de la thèque par

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les cellules de la granulosa est donc d’un point de vuefonctionnel primordial.

Les récepteurs aux oestrogènes

Comme chez le mâle, on retrouve chez la femelle lesdeux types de récepteurs aux oestrogènes. Au cours dudéveloppement embryonnaire, le récepteur α estexprimé dans l’ovocyte à partir d’ARNs provenant dela transcription du génome maternel. Les premiersmessagers zygotiques sont transcrits à partir du stademorula.

Chez l’adulte, le récepteur α est exprimé dans l’ovaire,l’oviducte, l’utérus, la glande mammaire, l’hypophyse,l’hypothalamus, le cortex, les os, les vaisseaux san-guins, le muscle squelettique, la moelle osseuse. Onretrouvera avec ce patron d’expression une action spé-cifique des oestrogènes dans chacun de ces organes.Le récepteur β, plus petit que l’isoforme α, possèdeune affinité équivalente pour l’oestradiol. Il est retrou-vé par protection à la RNAse à un très haut niveaudans l’ovaire (follicules I, II, III), l’hypothalamus, lecortex et les poumons. De possibles interrégulationsexistent entre les deux récepteurs. Par exemple, leniveau de transcrits pour ER-β est significativementaugmenté dans l’ovaire des femelles mutantes pourER-α.

cellules de la granulosa. Des follicules sont observés,mais à des stades I, II ou III au stade pré-antral. Aucunfollicule ovulatoire ou corps jaune n’est observé.L’utérus des mutants est hypoplasique. Tous les typescellulaires sont présents, cellules stromales, cellulesmyogéniques, cellules de l’endomètre, toutes en faiblenombre. Les glandes utérines sont présentes, ainsi queles cellules ciliées de l’oviducte. Un test de réponseaux oestrogènes a été mis en oeuvre chez ces animaux.Il consiste à injecter des oestrogènes en sous cutané àla dose de 40 ng/g de poids vif de l’animal pendanttrois jours, et à peser l’utérus à l’issue de ces trois joursou de mesurer l’index pycnotique des cellules vagi-nales (Test d’Allen Doisy). Chez les animaux témoins,l’utérus devient hyperhémique et le poids multiplié parun facteur 3 à 4. Aucune réponse n’est observée chezles mutants. Par ailleurs, la cytologie vaginale quimontre un accroissement du nombre de cellules kéra-tinisées chez les témoins demeure inchangée chez lesmutants. Les oestrogènes exercent donc via le récep-teur α une activité de maturation sur les follicules,d’hyperplasie et de différenciation sur les cellules dutractus génital. Au niveau cellulaire, leur action estcentrée sur la réplication de l’ADN, et plus générale-ment sur la multiplication cellulaire. Cette action peutêtre mise en évidence en faisant une expérience d’in-corporation de thymidine tritiée. Si les cellules sedivisent, elles incorporent la thymidine radioactiveinjectée par voie veineuse à l’animal, et la radioactiv-ité comptée dans l’utérus après sacrifice de l’animalpermet d’en connaître l’ampleur. Après ovariectomied’une souris, un traitement palliatif à base de 20 ng/kgd’E2 (ou de placebo pour les témoins) est entrepris.Seize à 18 heures plus tard, le dosage de la radioactiv-ité est réalisé. Chez les souris traitées à l’E2, l’incor-poration est multipliée par 7. Aucune augmentationn’est observée chez les mutants. Des études ont étémenées sur des cellules cancéreuses d’un sein. Il a puêtre mis en évidence que les oestrogènes induisentl’expression de la cycline D1, responsable du contrôlede l’entrée en phase G1 de cellules jusque là main-tenues en état quiescent. Durant cette même phase, lesanti-oestrogènes (par exemple le tamoxifène, nonstéroïdien synthétique) ont une efficacité maximale. Ilssont utilisés dans le traitement de carcinomes mam-

Figure III.14. Expression des récepteurs aux œstrogènes

Actions biologiques des oestrogènes

• Actions sexuellesEn l’absence de récepteur α, les souris naissent nor-malement, sans problème majeur. Le nombre desouriceaux homozygotes nés n’est pas significative-ment différent du nombre attendu selon les Lois deMendel. Cette première constatation montre que ledéveloppement embryonnaire se déroule correctementsans l’action des oestrogènes par ce récepteur. Cela neveut pas dire que les oestrogènes ne jouent aucun rôleau cours de l’ontogenèse. Simplement, qu’ils n’enjouent pas un par ce récepteur. Le phénotype majeur deces animaux réside dans une morphologie anormale dutractus génital. L’ovaire des mutants est hyper-hémique, cystique, les follicules contiennent peu de

Figure III.15. Résultats de portées ER-α+/- x ER-α+/-

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maires ou utérins hormono-dépendants. A l’inverse,les progestagènes bloquent la cellule en tout début dephase G1. Une fois engagée dans le cycle, les pro-gestagènes potentialisent les effets des oestrogènes.Le rôle du récepteur β a été approché par les mêmestechniques d’invalidation génique. Les animauxmutants naissent, et sur des coupes histologiques d’o-vaire de souris âgées de 7 à 9 semaines, on peutobserver chez les témoins et les mutants des folliculesà tous les stades de maturation. Pourtant, on observemoins de corps jaunes chez les mutants, et un nombresupérieur de follicules atrétiques. Cette donnée est enfaveur d’une plus grande proportion de follicules dontle développement est interrompu. Bien que aptes àreproduire, les souris femelles mutantes donnent desportées plus petites que les témoins. Un test de super-ovulation conduit à un taux d’ovocytes produits trèsinférieur chez les mutants. En relation avec l’expres-sion chez le témoin du récepteur β dans les cellules dela granulosa, on peut conclure à un rôle desoestrogènes via ce récepteur dans la maturation finaledes follicules.D’une façon générale, les oestrogènes ont une actionstimulante sur les contractions de l’utérus. Cette actionest marquée à forte dose, et très vraisemblablements’opère indirectement par la stimulation de l’expres-sion des cellules du myomètre des récepteurs à l’ocy-tocine, et par la synthèse de prostaglandines PGF2α,elles-mêmes activatrices des contractions utérines. Lesoestrogènes seuls, sur cellule myométriale isolée de

ratte, ont au contraire une action inhibitrice des con-tractions par inhibition de l’ouverture des canaux cal-ciques, ce qui hyperpolarise la cellule.Les oestrogènes jouent aussi un rôle majeur dans laformation de la mamelle. L’inactivation du récepteur αconduit à l’absence de conduits galactophores et destructures alvéolaires. Les souris ER-β-/- sont allaitenten revanche parfaitement bien leurs petits. Leurmamelle est formée et fonctionnelle. L’action desoestrogènes sur le développement mammaire estdirecte, et non pas par l’intermédiaire de la prolactinecomme cela fut longtemps présumé.Enfin, le comportement des femelles mutantes est per-turbé. En l’absence de récepteur α, elles se montrentmoins disposées lors de l’oestrus. En l’absence durécepteur β, au contraire une prolongation dans letemps des comportements de rapprochement et de lor-dose. Il existe donc une coopération moléculaire entreles deux récepteurs au niveau du système nerveux cen-tral dans la réalisation des comportements de repro-duction.

• Action sur l’axe hypothalamo-hypophysaireCette partie est traitée dans le chapitre sur les régula-tions métaboliques.

• Les autres actions des oestrogènes

Actions métaboliques

L’action sur l’anabolisme protéique existe, bien queplus faiblement que pour les androgènes. Les effets lesplus marqués sont observés chez les oiseaux, avec uneaugmentation de la lipémie, un accroissement de lasynthèse des lipides et une forte élévation de la cal-cémie. Toutes ces modifications sont corrélées à la for-mation de l’oeuf.Comme chez le mâle, ils provoquent la soudure descartilages de conjugaison. Sous imprégnationoestrogénique, la peau, les muqueuses (gingivale, buc-cale), les capillaires sanguins ont une trophicitéaméliorée. La pousse des cheveux, des poils, la néo-vascularisation -et par conséquent la cicatrisation- s’entrouvent augmentés.

Action vasculaire

Cette action des oestrogènes est très importante. Ellefait l’objet de très nombreuses études car on pensebeaucoup à utiliser ces molécules dans le traitementdes maladies cardio-vasculaires. Il est un fait que lesfemmes sont mieux protégées que les hommes contrele risque de lésion athérosclérotique. Cette action estmédiée par le monoxyde d’azote endothélial (sereporter au chapitre sur les substances vasodilatatricesdans le polycopié de physiologie de l’appareil cardio-vasculaire, page 65), dont la dégradation est freinéesous action oestrogénique. Il s’ensuit une diminution

Figure III.15. Contrôle du cycle cellulaire par les stéroïdes sexuelss

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2- La progestérone

Le cycle endocrinien est globalement caractérisé parune domination des œstrogènes dans sa première partieet une domination de la progestérone après l’ovulation(Figure III.18). Après l’installation du corps jaune, lasécrétion peut être immédiate comme chez les primatesou décalée d’un ou deux jours chez les ruminants. Laprogestéronémie est généralement multipliée par 10une semaine après l’œstrus, bien qu’il y ait des varia-tions avec l’espèce et même la race (Figure III.19). Lediagnostic de gestation peut être réalisé par dosage deprogestérone 17 à 20 jours après la saillie de la brebis.Pendant la gestation, ce taux reste élevé. La pro-gestérone fait partie des progestagènes, substances pré-parant la femelle à la gestation. A la parturition, onobserve une inversion du rapport progestérone surœstrogènes. La chute du taux de progestérone peut êtreliée selon l’espèce à la lutéolyse ou à l’activation d’en-zyme placentaire transformant la progestérone enœstradiol.

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de la prolifération et de la contraction des fibres mus-culaires lisses vasculaires, ainsi qu’une diminution del’agrégation plaquettaire et monocytaire, toutes deuxresponsables de la formation de la plaque d’athérome.

Figure III.17. Mécanisme d’action des œstrogènes sur lafibre musculaire lisse

Figure III.18. Progestéronémie pendant le cycle

Synthèse et mode d’action de la progestérone

Pendant la lutéinisation, la synthèse des ARNm desrécepteurs aux lipoprotéines est augmentée, la StARest capable d’augmenter le flux de cholestérol et letaux de LDL augmente fortement dans le corps jaune.L’étape limitante de la synthèse de la progestérone estle transport du cholestérol vers l’enzyme de conversionen pregnénolone. Dans un premier temps, cette con-version est dépendante de l’AMPc, puis elle devientautoentretenue La 3ßHSD est présente dans les cellulesde la thèque et de la granulosa du follicule préovula-toire, et dans les cellules du corps jaune. Le type d’hor-mone synthétisé (progestérone, androgènes, ouœstrogènes) dépendra alors des enzymes présentes.Ceci induit des spécificités de cellule et d’organe. Latransformation des cellules de la thèque et de la granu-losa pendant la lutéinisation, induit une augmentationde synthèse de progestérone. La synthèse de pro-gestérone a lieu majoritairement dans des cellulesayant un déficit en CYP 17, en particulier les cellulesde la granulosa (Figure III.20). L’apoptose des cellulesde la granulosa est nécessaire à la limitation desembryons. Pendant l’apoptose, la sécrétion de pro-gestérone continue du fait d’une barrière d’actine quidélimite le compartiment apoptotique et stéroï-dogénique.

Figure III.19. Progestéronémie pendant la gestation

Figure III.20. Synthèse de progestérone par l’ovaire

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Le complexe recepteur-progestérone est transloqué,atteint le noyau et induit une activation transcription-nelle qui permettra la synthèse protéique. L’effet estdonc décalé contrairement aux hormones protéiquesqui agissent par des seconds messagers. Le RU486,antagoniste de la progestérone, se fixe à son récepteurmais ne permet pas l’activation transcriptionnelle(Figure III.23).

Pendant la gestation, la synthèse de progestérone est lerésultat des sécrétions du corps jaune ou du placenta.On parle dans ce cas de relais placentaire à la synthèsede progestérone. Dans ces espèces, une ovariectomiependant la gestation n’induit pas d’avortement. Lecholestérol apporté par la mère est converti par le pla-centa en pregnénolone puis progestérone (FigureIII.21).

Figure III.21. Synthèse de progestérone par l’unitéfœto-placentaire

Pendant la phase folliculaire, la progestérone s’accu-mule dans le liquide folliculaire ou bien sert deprécurseur aux cellules de la granulosa pour la produc-tion des œstrogènes. Pendant la phase lutéale, elle estprésente dans la circulation sous forme libre ou liée àl’albumine, la globuline ou la transcortine. Cesmolécules ont une forte affinité pour la progestérone,mais leur concentration plasmatique est faible. Lemode de sécrétion est une simple diffusion du fait de lalipophilie. Des connections microtubulaires s’établis-sent entre le cumulus oophorus et l’oocyte. De mêmeles anastomoses entre veine utéro-ovarienne et artèreovarienne permettent des transferts d’hormone. Lecatabolisme hépatique est rapide, la progestérone estréduite, ce qui augmente sa solubilité et permet uneélimination urinaire sous forme de pregnone diol.

La progestérone pénètre dans les cellules sous formelibre, se lie à un récepteur cytosolique (Figure III.22).La forte affinité des récepteurs induit une action pro-longée. Quand la concentration plasmatique en pro-gestérone chute, il y a séparation du récepteur. Il y aune boucle de régulation de la progestérone sur sonrécepteur. Au cours du cycle sexuel des singes, onobserve des modifications d’expression de deux iso-formes de récepteurs A et B dont le ratio varie pendantla phase lutéale. Sachant que l’isoforme A agit princi-palement sur l’endomètre et l’isoforme B sur l’ovaire,les réponses à la progestérone peuvent varier.L’Epidermal growth factor (EGF) induit la synthèse derécepteurs à progestérone via une action sur les récep-teurs à œstrogène.

Figure III.22. Récepteur de la progestérone

Figure III.23. Fonctionnement des antagonistes de la progestérone

Actions biologiques de la progestérone

Les fonctions de la progestérone ont notamment étéprécisées en étudiant une souris invalidées (KO) pourle gène du récepteur à la progestérone. Cette sourisprésente un taux sérique normal de progestérone, maisun certain nombre de caractéristiques mettant en évi-dence le rôle de la progestérone :

• Actions sexuelles

GonadesLa différenciation sexuelle primaire des sourismutantes est normale pour les deux sexes. Les femellesadultes sont en revanche infertiles, des coupes d’o-vaires montrent des follicules antraux mais pas de corpsjaunes. Un protocole de stimulation ovarienne induitune accumulation de follicules préovulatoires mais pasd’ovulation ni de corps jaune. La progestérone est doncimpliquée dans l’ovulation pendant laquelle elle règle

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l’activité protéolytique et favorise la rupture follicu-laire. Elle est aussi nécessaire pour la lutéinisation descellules de la granulosa.

L’utérus de cette souris présente un amincissement dela paroi lié à la diminution du stroma, une inflamma-tion, et une désorganisation de l’épithélium glandu-laire. La progestérone joue donc un rôle anti-inflam-matoire et un rôle de prolifération du stroma. Elleassure en outre la formation de replis de l’endomètre.Une stimulation déciduale par lésion d’une corneutérine, mimant l’implantation, n’induit pas chez lasouris mutante l’hyperplasie stromale. La progestéronepermet donc la nidification. Sur le myomètre la pro-gestérone aboli les contractions spontanées et inhibel’effet stimulant de l’ocytocine en séquestrant le calci-um. La progestérone permet aussi l’involution vagi-nale.

La glande mammaire de la souris mutante pour lerécepteur, sous une imprégnation en stéroïdes sexuelséquivalente à celle de la gestation, ne produit nibranchement des canaux, ni formation des alvéoles. Laprogestérone stimule donc la mammogénèse.

Axe hypothalamo-hypophysaireEn fin de phase folliculaire, la progestérone est indis-pendable à la décharge ovulante de LH. En phaselutéale, elle exerce en revanche une action inhibitricesur la sécrétion de GnRH et donc sur la sécrétion deshormones gonadotropes. Elle participe ainsi à la for-mation du corps jaune. Au moment de la décharge ovulante de LH, la stimula-tion des œstrogènes sur les neurones GnRH pourraitfaire intervenir les récepteurs à la progestérone. Deplus le gène FSHß contient des éléments de réponse aurécepteur à la progestérone. La progestérone agit principalement sur des tissuspréalablement stimulés par les œstrogènes. Elle a uneaction synergique mais aussi antogoniste.

• Actions non sexuelles

Les actions métaboliques de la progestérone regroupentun anabolisme de gestation surtout protidique, un effetnatriurique (effet anti-aldostrérone, elle augmente doncl’élimination du Na+ par le rein et la rétention du potas-sium), un effet variable sur les lipides, une diminutionde la tolérance aux glucides, une modification duréglage des centres thermorégulateurs par sonmétabolite, le prégnandiol, d’où une élévation ther-mique pendant la deuxième partie du cycle et la gesta-tion.Enfin d’autres actions ont été mises en évidencenotamment des actions non génomiques, incluant unrôle dans la transmission neuronale, le comportement,ou le cycle cellulaire.

Utilisation de la progestérone

Les progestagènes de synthèse sont utilisés notammentpour la contraception, ou en cas de risque d’avorte-ment. Son antagoniste, le RU486 est utilisé pourprovoquer un avortement ou pour induire artificielle-ment la lactation.Le rôle dans la contraception est de maintenir les con-ditions de la deuxième partie du cycle. La pillule agiten mimant le blocage de la décharge ovulante de LHobservé lors de l’activité du corps jaune, et donc endiminuant la concentration sérique en LH. Elle agitaussi sur le mucus cervical, qui bloque la remonté desspermatozoïdes. Elle a un effet direct négatif sur ledéveloppement des follicules.Chez la chienne, une injection unique de Proligestoneou médroxyprogestérone acétate (MPA) de préférencependant l’anoestrus et 1 mois avant la phase follicu-laire, recule le 1er oestrus à 1 à 3 mois. Oralement pen-dant 21 jours maximum, il recule l’œstrus de 2 à 9mois. Les effets secondaires sont fonction de la dosecumulée, ils incluent une hypersécrétion d’hormone decroissance, un diabète, et des tumeurs mammaires.