[RevistasEnFrancés] Ciencia&Vida_Edición Especial - los100AñosDelAutomóvil
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7/28/2019 [RevistasEnFrancs] elMensajeroInternacional - 2012 Courrier_International_suplemento especial sobre los EEUU d
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3:HIKOMC=YU]ZUZ:?a@a@o@m@f;
M 04224 - 42 H - F: 8,50 E - RD Afrique CFA : 6 000 FCFA - Allemagne : 9 Antilles-Runion : 9,50 - Autriche : 9 - Canada : 12,90 $ CAN
Espagne : 9 - Etats-Unis : 13,50 $ US - Grce : 9 - Italie : 9
Japon : 1 400 - Liban : 18 000 LBP - Maroc : 85 MADPays-Bas : 9 - Portugal cont. : 9 - Suisse : 12 CHF
TOM avion : 1 800 XPF - Tunisie : 15 DT
Hors-srie Octobre-dcembre 20128,50
De lArizona la Floride,la presse amricaine dressele portrait dun pays qui veutse rinventer aprs la crise
LAMRIQUEDOBAMA
LE RVE EN
MOINSn partenariat avec
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Espoir etcrispation
Diversit, cest le mot-clpour comprendrelAmrique dObama.
Diversit dmographiquedabord, avec linexorablecroissance des minorits :la monte en puissancedes Latinos ou lessordes Asiatiques, qui constituentdsormais le plus groscontingent de nouveauxarrivants aux Etats-Unis.LAmrique dObama, cestaussi le mtissage en hausseet une plus grande tolrance,
envers les gays notamment.Mais larrive au pouvoirdObama a galementprovoqu une raction.De nombreux conservateurs ontpeur de voir [leur] paysdisparatre. Face larc-en-cielde la diversit, ces opposantsau prsident au seindu mouvement Tea Party oudes milices dextrme droite voudraient revenir un mondeen noir et blanc. Le mandatdObama sest aussiaccompagn dune polarisation
croissante de la vie politique. AuCongrs, les rpublicains onttent de faire obstacle toutesles rformes dObama sant,immigration, rgulationfinancire, fermeture deGuantnamo. Cette crispationsexprime galement au niveaudes Etats, par le refus des loisfdrales et un fort sentimentantilatino dans les Etatsfrontaliers avec le Mexique, enparticulier en Arizona. A lheuredu bilan, les critiques nemanquent pas, droite bien sr,
mais aussi gauche. La crisefinancire de lautomne 2008est venue renforcer lesingalits de revenus et lesclivages entre riches et pauvres.Du mouvement Occupy WallStreet la communautafricaine-amricaine,lamertume est palpable.Porteur de trop despoir en2008, Obama tait condamn dcevoir et termine son premiermandat en demi-teinte.
Brangre Cagnat
et Eric Pape
Editorial
Draghi va-t-il sauver leuro ?
Portolio4.Brooklyn/Manhattan.Les Amricains dErica McDonald
Repres
10.Cartes.LAmrique dObama lpreuve de la crise
Draghi va-t-il sauver leuro ?
1/Une Amrique plusdiverse
13. Dmographie. Des minoritsmajoritaires14. Socit. Les mariages mixtessimposent dans le Sud16. Tolrance. Comment la causegay a triomph17. Exode. Les Grandes Plainespassent lheure hispanique18. Politique. LObama latino ?19. Prjugs. Lessordes Asiatiques-Amricains.20. Immigration.Les immigrants ne changentplus de nom22. Racisme. Une prsidence
pas vraiment postraciale23. Intolrance. LAmriquea toujours peur du noir26. Discrimination.Les Africains-Amricains laissspour compte
Draghi va-t-il sauver leuro ?
2/Ltat de lUnion29. Vermont-Caroline du Sud.Snobs contre ploucs :le foss slargit30. Illinois. La pauvreturbaine, flau durable34. LouisianeDans le Sud profond,les prisonniers rapportent gros37. Californie. La Silicon Valleybichonne ses employs40. Minnesota-Virginie.Qui a tu le rve amricain ?44. Texas. Le ptrole se remet
couler flots46. Nevada. Cline Dionsauvera-t-elle Las Vegas ?49. Gorgie. A Kennesaw,un bon citoyen est arm52. New York. Commentje suis devenu lun des 99% New York
raghi va-t-il sauver leuro ?
3/Obamaphilie,obamaphobie
59. Obamania. Jacobet les cheveux du prsident60. Tmoignage. Une question
de vie ou de mort60. Rcit. Diamond White,digne rejetonne de la gnrationObama64. Art. Un bien triste tableaude la prsidence66. Extrmisme. Lextrmedroite prospre dansle Nord-Ouest67. Milices. Ces militairesqui veulent la peau dObama69. Tea Party.Les conservateursprennent la rue70. Portrait. Joe Arpaio,le shrif de la peur
4/La doctrine Obama
75. Politique trangre.
La mauvaise rputation76. Stratgie. Washington orientses forces vers lAsie78. Vu dAustralie. LAsie-Pacifique pige par la rivalitsino-amricaine80. Vu du monde arabe. Unetrop grande faiblesse face Isral81. Vu du Kenya.Obama victimdu racisme rpublicain82. Vu de Cuba. Les pays latinossmancipent83. Guerre. La grande dbcledAfghanistan85. Antiterrorisme.Comment
Obama a appris tuer88. Vu du Pakistan. Le granddivorce
Draghi va-t-il sauver leuro ?
5/Le verdictdes crivains
90. Maya Angelou. Obama :un symbole despoir91. Paul Auster. Un moindremal92. Tariq Ali. Pas mieux
que Bush93. Cornel West. Jai perdula foi
Draghi va-t-il sauver leuro ?
Obama dans tousses tats
94.Le prsident amricain la une des magazines97. Sources
Sommaire
En couverture :Sara dans unsalon decoiffure deBrooklyn.Photo Erica
McDonald.
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4.
PORTFO
LIO
BROOKL
YN/
MANH
ATTAN
SUR LE WEB
Le site Internet
de la photographe
Erica McDonald
(ericamcdonaldphoto.com)
N
e dans lOhio et ayant grandi dans leMassachusetts, Erica McDonald sest
installe New York il y a six ans. Plusprcisment Brooklyn, o, instinctivement,elle sest mise photographier ses voisins dePark Slope, un quartier en pleine mutation.Influence par la photographie documentaire,les portraitistes et le mouvement de lastreet pho-tography(photographie de rue), elle explique :Je voulais prendre un instantan du quartier parceque je savais que tout cela allait disparatre, commetoute chose.
La srie de portraits que nous publions, prisdans les rues de Brooklyn et de Manhattan, sins-pire de cette phrase tire de la pice Coriolan deShakespeare : What is the city but the people ?(Quest-ce que la ville sinon ses habitants ?)
Ce travail, qui sest tal sur les cinq derniresannes, est centr sur la diversit des habitantsde New York. //
Les New-Yorkais vuspar Erica McDonald
Jess se repose aprsune manifestation pourle droit des immigrs
Manhattan.
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PORTFOLIO.
Portrait de Venus New York.
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6. PORTFOLIO
Lhomme au chien,Westminster Dog Show,Manhattan.
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PORTFOLIO.
Aprs la parade.
Babe chez elle, Park Slope,Brooklyn.
John devant sa maisonde Park Slope, Brooklyn.
Emily aprs le dfilportoricain, Central Park,Manhattan.
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8. PORTFOLIO
Jeune skateuse Brooklyn.
Ahmad au terrain de jeux,Park Slope, Brooklyn.
Attente, Park Slope, Brooklyn.
Billy, la rue, New York.
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PORTFOLIO.
Dayna avant sa premirecommunion, Park Slope,Brooklyn.
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LAmrique
dObamalpreuvedela
crise
Laconjonctureconomique
samliorepeupeuetlescratio
nsdemploisrepartentauxEtats-Unis.Maisletauxdechmage
nationalresteautourde8%
etlenombredepersonnespauvr
escontinuedaugmenterdansde
nombreuxEtats.
ALASKA
HAWAII
WASHINGTON
MONTANA
DAKOTA
DUNORD
DAKOTA
DUSUD
OR
EGON
IDAHO
NEVADA
CALIFORNIE
ARIZONA
UTAH
NOUVEAU-
MEXIQUE
COLORADO
WYOMING
TEXAS
LOUISIANEMI
SSISSIPPI
ALABAMA
MISSOURI
OKLAHOMA
KANSAS
ARKANSAS
NEBRASKA
ILLINOIS
INDIANA
IOWA
MINNESOTA
NEWYORK
NEWJERSEY
DELAWARE
MARYLAND
11,2
12,9
10,1
Washington,
districtfdral
deColumbia
VIRGINIE
CONNECTICUT
VERM
ONT
RHODEISLAND
MASSACHUSETTS
NEWHAMPSHIRE
GORGIE
FLORIDE
CAROLINE
DUSUD
CAROLINEDUNORD
MICHIGAN
WISCON
SIN
VIRGINIE
OCCID.
KENTUCKY
TENNESSEE
OHIO
PENNSYLVANIE
MAINE
Niveaudevie
Pourcentagedelapopulationdontle
revenuestinfrieurauseuildepauvret
parEtat,moyennesurlesannes
et
LapauvretperduredanslesEtatstrsconservateurstraditionagricoleduSudprofondoce
rtainesfamillesvivent
danslaprcaritdepuisdesgnrations.Faceceflau,cesEtatsn'ontpasdepolitiquetrsvolon
taire.Onobservegalement
destauxlevsdanslEtatdeNewYorketenCalifornieolepourcentagedepersonnesvivantsousleseuildepauvret
aconsidrablementaugmentpuisquilestpassde12,6%e
n200716,6%e
n2011,
dufaitdela
crise.
LesEtatspeupeuplsduNord-EstetduCent
reaffichentdestauxdepauvretbienmoinsimportants.
Lestoutdernierschiffressurlapauvret(
finseptembre,AmericanCommunitySurvey,U.S.Cen
sus)montrentune
stabilisationdansdenombreuxEtats,maisla
situations'estaggravedansleSud(Texas18,5%,No
uveau-Mexique21,5%,
Mississippi22,6%).Lapauvretafaitunbonddansl'Utah(13,5%)demmequedansleNebraska
(13,1%)etlOregon(17,5%).
Cesaugmentationssontnotammentdueslarriveenfindedroitsdenombreuxchmeurs.
Moyenne
dupays:
15,1
De2022
De17,5
20
De15,1
17,4
De12,5
15
De1012,4
De7,110
Les5Etatsayant
letauxdepauvret
leplusfort
Les5Etatsayant
letauxdepauvret
leplusfaible
SOURCE:U.S.CENSUSBUREAU(CURRENTPOPULATIONSURVEY,20
09TO2012ANNUALSOCIALANDECONOMICSUPPLEMENTS)
12,1
14,3
16,6
12,1 1
2,2
16,0
14,8
15,5 1
0,1
10,5
18,0
20,21
2,7
11,3
14,1 1
0,2
14,4
15,1
17,9
10,4
10,4
15,2
17,0 2
1,3
20,0
11,6
14,1
15,3
15,9
16,8
16,5
16,3
18,6
15,4
18,0
16,4
19,7
11,0
17,2
12,4
16,0
11,2
13,0
15,2
9,3
7,1
13,710,7
REPRES.
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14. UNE AMRIQUE PLUS DIVERSE
The New York Times(extraits) New YorkDe Hattiesburg (Mississippi)
Ici, dans le Sud profond, on a
respect pendant des gn-rations le tabou portant surlamour interracial. Il y a moins
de quarante-cinq ans, le mariageentre Noirs et Blancs tait illgalet, mme aprs la leve de linter-diction, il est rest trs longtempsmal considr. Cest pourquoiJeffrey Norwood, entraneur debasket-ball universitaire, a hsit rpondre une offre demploi. Alpoque, Jeffrey Norwood, qui estnoir, frquentait une mtisseblanche et asiatique. Vous comptezvo us in st al le r da ns le su d du
Mississippi ?lui a demand son predun ton sceptique, se souvenant dutemps o le simple fait dtre vu encompagnie dune femme duneautre couleur faisait courir un Noirun danger mortel. Vous tes srs ?
Mais, aprs plusieurs visites Hattiesburg, Jeffrey Norwood sestdit rassur de ce quil y avait vu :
une diversit grandissante. Aussisy est-il install aprs avoir pousson amie. Puis le couple a eu unbb, une petite fille qui, lors durecensement de 2010, a t dcla-re noire, blanche et asiatique.[Depuis le recensement de lan2000, les Amricains ont la possi-bilit de se dclarer comme appar-tenant une ou plusieurs races.]Taylor Rae Norwood, 3 ans, faitpartie des milliers denfants mtisqui ont fait du Mississippi un desEtats ayant enregistr lune des plusfortes croissances de population
Etats comme le Mississippi aient enre-gistr une trs forte progression dunombre de personnes se considrant la fois comme blanches et comme noires
en dit long. Cest quelque chose que lonnaurait jamais prdit il y a encore dixou vingt ans.
Les changements nont pas tuniformes. Dans des Etats commela Californie, Hawaii ou lOklahoma,o les mtis reprsentaient dj unpourcentage important de la popu-lation, la progression a t plus lenteque dans des endroits comme leMississippi, o ils taient bienmoins nombreux au dpart. AHawaii, par exemple o les mtisreprsentent 23 % de la population,soit la plus forte proportion du
SOCIT
Les mariages mixtes simposent dans le SudLongtemps mal perus, ces couples et leur progniture sont de mieux en mieux accepts, en particulier dans
les Etats au pass sgrgationniste. Ce qui reflte un profond changement des mentalits.
multiraciale, une progression de70 % entre 2000 et 2010, selon lesderniers chiffres du Bureau durecensement.
Une tendance lourde. Le grandrecensement de 2010, qui a permispour la premire fois un dcompteprcis des Amricains mtis, montre
que cette population a augmentbien plus vite que ne lavaient prvude nombreux dmographes, en par-ticulier dans le sud du pays et danscertaines rgions du Midwest. Ellea doubl en Caroline du Nord. Ellea cr de plus de 80 % en Gorgie etde presque autant dans le Kentuckyet le Tennessee. Dans lIndiana,lIowa et le Dakota du Sud, elle a faitun bond denviron 70 %. Toutes lesaugmentations suprieures 50 % sontimpressionnantes, souligne WilliamFrey, sociologue et dmographe dela Brookings Institution. Que des
Sonia et Michael Peeples,un couple mixte du Mississippi.Photo : Nicole Bengiveno/The New York Times
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pays , la croissance de cette popu-lation depuis 2000 na t que de23,6 %. A Hawaii, la combinaisonprdominante est Asiatique, Blancet autochtone/originaire dune ledu Pacifique, tandis quen Okla-
homa le mlange le plus courant estAmrindien et Blanc. Dans le Mis-sissippi, la combinaison majoritaireest Blanc et Noir correspondantaux deux groupes qui ont le moinsde probabilits de se marier entreeux, par le pass comme de nosjours, si lon en croit les sociologues, cause de la persistance des diff-rences socio-conomiques (et, jus-quen 1967, de la loi).
Ingalits. Pendant la majeurepartie de la dernire dcennie, leMississippi a caracol en tte des
Etats quant au nombre de ses ma-riages mixtes, souligne M. Frey.Reste que les mtis reprsententencore une infime partie de la popu-lation de lEtat : 34 000 individus,soit environ 1,1 %. Par ailleurs, denombreux habitants du Mississippise plaignent des ingalits racialespersistantes. En 2010, le gouverneurrpublicain de cet Etat, Haley Bar-bour, a soulev un toll en suggrantque, malgr des frictions parfoismeurtrires, lpoque de la luttepour les droits civiques au Missis-sippi [qui a dur de 1955 1965 et
pendant laquelle les pratiques sgr-gationnistes taient toujours envigueur] navait pas t une priodesi terrible.
Cependant, beaucoup de per-sonnes constatent des avances. Lescomportements changent progressive-ment, note Marvin King, professeurde sciences politiques luniversitdu Mississippi. Il est noir, mari une Blanche, et ils ont une petite fillege de 2 ans. Lhostilit, qui tait largle il y a des annes, nest plus aussiostensible. Cela se traduit par des rela-tions interraciales plus frquentes, les
UNE AMRIQUE PLUS DIVERSE. 1
Les parents amricains dclarent
de plus en plus souvent leurs
enfants comme tant issus deplusieurs races.
Le nombre denfants mtis sest
envol ces dix dernires annes,
rvle lanalyse des donnes
du recensement de 2010.
Une tendance qui tmoigne de la
multiplication des couples mixtes,
mais aussi dun bouleversement du
regard que portent les parents sur
leurs enfants dans cette socit
pluriethnique que constituent les
Etats-Unis. Ainsi, sur les 3,5 millions
de naissances enregistres dans
lanne qui a prcd lerecensement, plus
de 7 % taient issues de deux races
ou plus, contre peine 5 %
dix ans plus tt. Le nombre
denfants ns de couples noir et
blanc ou asiatique et blanc
a mme doubl sur cette priode.
Pourtant, si les enfants mtis sont
de plus en plus nombreux,
les parents jugent encore parfois
dlicat dvoquer avec eux
les questions raciales. Thien-Kim
Lam, mre de deux enfants
Silver Spring (Maryland),
est une Vietnamienne-Amricainemarie un Africain-Amricain.
Leur fille de 6 ans commence
se demander pourquoi elle ne
ressemble pas sa mre. Au tout
dbut, jai pens que, si je nen
parlais pas, les prjugs raciaux lui
seraient tout simplement
trangers,raconte Thien-Kim Lam.
Sur son blog, baptis Im Not the
Nanny[Je ne suis pas la nounou]
la phrase quelle lance aux
inconnus qui la voient pour
la premire fois avec ses enfants ,
elle sinterroge sur lducation des
petits mtis dans un mondesi attentif aux couleurs de peau.
Mais il est important de leur
apprendre tre fiers de ce quils
sont, ajoute-t-elle. Jy vois une
chance dapprendre ma fille
accepter ces deux parties de son
identit, cet assemblage original :
moiti moi, moiti son papa,
la couleur intermdiaire parfaite.
En rgle gnrale, les Amricains se
dclarant dune seule race sont
plus gs. Ils sont encore le reflet
dune socit qui interdisait les
mariages mixtes et o certains
Etats, comme la Virginie, avaient
institu la one-drop rule,
en vertu de laquelle quiconqueavait une seule goutte de sang
noir, un seul anctre africain-
amricain, tait considr comme
noir. Barack Obama a ainsi coch
une seule case sur son formulaire
de recensement, Noir, bien que
sa mre soit blanche. Lisa
Rosenberg, mtisse ayant grandi
dans un quartier cosmopolite de
New York dans les annes 1960
et 1970, se souvient quelle avait
beaucoup damis ns de parents
de races diffrentes. Mais son pre,
qui tait africain-amricain, lui
avait recommand de toujoursse prsenter comme tant noire,
mme si sa mre est juive.
Je crois que ctait dans lide
de me protger quil disaitPour
le monde extrieur, tu es noire,
explique Lisa, qui vit aujourdhui
Montclair, dans le New Jersey.
Devenue thrapeute, elle
intervient souvent dans les coles
pour voquer les questions
ethniques avec les enfants.
Lisa Rosenberg coche aujourdhui
plusieurs cases sur son formulaire
de recensement, et elle en fait
autant pour ses deux enfants.Mais elle sattend ce que sa fille
multiplie les questions insistantes
partir de son entre au collge.
Aujourdhui, les jeunes
Amricains, en particulier
les moins de 15 ans, sont bien plus
souvent identifis comme
appartenant plusieurs groupes
ethniques. Ainsi, 17 % des moins
de 1 an ns de parents se dclarant
exclusivement noirs sont inscrits
au recensement comme tant
mtis ; il y a dix ans, cette
proportion ntait que
de 9 %.Thien-Kim Lam, elle,est pare pour rpondre
aux questions de sa fillette.
Ses camarades lui ont demand
pourquoi elle navait pas la mme
couleur de peau que moi. Nous
parlons de races avec nos enfants
ds que la question se pose, par
exemple quand des gens font des
remarques. Au bout du compte,
il sagit pour nous tous de faire
de nos enfants des gens bien.
Carol Morello
The Washington Post(extraits) Washington
RecensementUne nouvelle identit : mtis
gens en ont moins peur. On na plusbesoin de se cacher.A la diffrence dece qui se passe dans de nombreuxautres Etats, la population du Mis-sissippi na que peu augment depuis
dix ans. Les chercheurs en ont dduitque lvolution des mentalits ntaitpas due la prsence des nouveauxvenus. La population a cr de 3,8 %dans le Mississippi depuis 2000,contre 18,46 % en Caroline du Nord.La Caroline du Nord doit cette fortecroissance aux Latinos et aux Noirs,ainsi quaux personnes venant dail-leurs, souligne William Frey. Dans leMississippi, en revanche, le changementsest opr de lintrieur.
Identit multiple. Dans cet Etat,la proportion de jeunes de moins de
18 ans est plus forte parmi les mtisque dans le reste de la population,toutes races confondues, ce quimontre que la croissance de la popu-lation mtisse rsulte de naissancesrcentes. Mais, ici comme dansdautres Etats, elle est sans doutegalement imputable aux Amri-cains plus gs qui, auparavant, sedclaraient noirs ou dune seule raceet qui voient aujourdhui leur iden-tit sous un angle plus large. En ra-lit, les relations entre Noirs et Blancsne datent pas dhier simplement, jadiselles ne se manifestaient pas ouverte-
ment, affirme Matthew Snipp, pro-fesseur de dmographie la facultde sociologie de luniversit Stan-ford. A propos des enfants mtisissus de ces relations, il prcise que,depuis quon leur a donn le choix, en2000, les gens ont eu une dcennieentire pour rflchir la question deleur identit. Certains chiffres sontmoins le reflet de changements que descorrections. En un sens, ils brossent unportrait plus exact de lhritage racial,qui tait autrefois occult.
Susan Saulny
Paru dans CI n1066, du 7 avril 2011
Les relations entre
Noirs et Blancsne datent pas dhier simplement,jadis elles nese manifestaientpas ouvertement
DANS NOS ARCHIVEScourrierinternational.com
LAmrique postraciale dObamase compte. Les recensements voient
merger de plus en plus de mtis,qui ne se reconnaissent pas dansles anciennes catgories - blancheou noire. Paru dans CI n 1013,
du 1eravril 2010.
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16. UNE AMRIQUE PLUS DIVERSE
Los Angeles Times(extraits) Los Angeles
E
n 1958, quand linstitut desondage Gallup a demandaux Amricains sils approu-vaient ou non le mariage
entre Noirs et Blancs, la rponse at on ne peut plus claire : 94 % despersonnes interroges ont rponduquelles y taient opposes. Il a falluplus de quarante ans pour quunemajorit dAmricains juge accep-table le mariage entre personnes decouleurs diffrentes.
En revanche, lattitude vis--visdes gays et des lesbiennes a radica-lement chang en dix ans. A la mi-mai, Gallup a rapport quun peuplus de la moiti des Amricainsconsidre dsormais qutre gayest moralement acceptable, que les
relations homosexuelles devraienttre licitesou que les couples gaysou lesbiens devraient avoir le droitde se marier. En 1996, quand Gallupa sond pour la premire fois lapopulation sur les mariages homo-sexuels, 68 % des Amricains y
taient opposs.Sur le plan politique, le prsi-dent Obama a jug quil ne pre-nait pas un grand risque en seprononant officiellement enfaveur du mariage homosexuel aubeau milieu de la campagne poursa rlection. Quelques jours plustard, Jan van Lohuizen, un stra-tge rpublicain, a prvenu sonparti que sopposer au mariagehomosexuel le plaait contre-courant de lair du temps.
Si larc de lunivers moral estlong mais tendu vers la justice,
comme la dclar un jour MartinLuther King, il va plus vite et tendplus dans la direction des droitsdes gays et lesbiennes quen faveurde nimporte quel autre mouve-ment de lutte pour la reconnais-sance des droits avant lui. Cela neveut pas dire que les homosexuels
jouissent dune galit ou duneprotection juridique totales. Lemariage homosexuel reste interditdans la plupart des Etats [seulssix Etats amricains lont lgalis,voir ci-dessous] et dans nombredentre eux, les gays et lesbiennesne jouissent pas de la mme pro-tection en matire de discrimina-tion face lemploi et au logementque celle qui est accorde auxfemmes, aux Latinos et aux Noirs.
Il nen reste pas moins que ce quenous avons accompli en moins de cin-quante ans est assez extraordinaire,
confie Cleve Jones, militant de lacause homosexuelle depuis lesannes 1970. Le comportementhomosexuel lui-mme tait un dlitpresque partout, se souvient-il. Il y
avait des lois qui nous empchaient denous runir dans les bars et les restau-rants. Il y avait dans chaque ville desunits spciales de la police dont le tra-vail tait de nous piger, de nous arrteret de nous emprisonner Il y a eu desprogrs normes, stupfiants.CleveJones, comme beaucoup, dtestecomparer les divers mouvementspour la reconnaissance des droits.Mais il nen demeure pas moins vraique les Noirs ont jet les bases desmouvements sociaux aux Etats-Unis,souligne Gary M. Segura, qui dirigele programme dtudes sur les Chi-
canos de luniversit Stanford.
Une avance remarquable. Lesavis divergent quant lorigine deces mouvements. Pour ce qui est dumouvement de lutte pour les droitsciviques, certains considrent quila dbut ds la fin de la guerrede Scession, en 1865, alors quedautres estiment quil date de lafondation de lAssociation nationalepour la promotion des personnesde couleur (NAACP) en 1909. Pourles gays et les lesbiennes, certainscitent le mouvement homophile
des annes 1950, alors que dautresvoquent lexplosion du militan-tisme qui a suivi les meutes de Sto-newall, New York, en 1969.
Il ny a pas non plus de consensussur la faon de mesurer les progrs.Est-ce le progrs conomique ? Est-ce la possibilit de se marier pourles gays et lesbiennes ? Ou limpos-sibilit pour les hommes noirs depouvoir hler un taxi la nuit danscertaines villes mme avec un pr-sident noir la Maison-Blanche ?Quoi quil en soit, en faisant voluerlopinion publique de faon si spec-
taculaire et en changeant la dyna-mique politique si rapidement, lemouvement pour les droits deshomosexuels a connu un succsremarquable une vitesse sansprcdent. Plusieurs raisons expli-quent cette russite. La commu-naut homosexuelle est en gnralrelativement aise et peut donc fairedes dons gnreux aux candidats, cequi se traduit par une influence poli-tique significative au niveau local,national et jusqu la Maison-Blanche. Ses dirigeants sont verssdans le fonctionnement du pouvoir,
TOLRANCE
Comment la causegay a triomphDans lhistoire du pays, jamais un mouvement de lutte
pour la reconnaissance des droits na connu un succsaussi rapide que celui des homosexuels.
SIX TATSont lgalis le mariage homosexuel :
le Massachusetts pionnier
en 2004 , le Connecticut, lIowa, le
New Hampshire, lEtat de New York
et le Vermont, ainsi que la capitale
fdrale, Washington.
Dans le Maryland, le Maine et lEtat
de Washington, la lgalisation sera
soumise rfrendum lors des
lections de novembre prochain.
Mariage
Clbration dun mariage gay New York en juillet 2011.Photo : Erica McDonald
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EXODE
Aprs des annes de recul dmographique,les communes rurales du centre de lAmriquese repeuplent grce larrive des Latinos.
mexicain, un restaurant mexicain etun restaurant mexicain.Aprs lafermeture, en 2010, du dernier ta-blissement tenu par un Blanc, ilincombait lun des nouveauxvenus latinos dassurer la survie dupatrimoine hamburger-frites. LuzGonzlez a mme demand sesvoisins de lui apprendre prparerdes plats plus exotiques [pourelle], par exemple la salade depommes de terre [un classique dela cuisine amricaine].
Une vie paisible. Depuis des
gnrations, cette petite villerurale des Grandes Plaines estplace sous le signe de lexode. Sonhistoire est marque par les fer-metures dentreprises, le reculconstant des effectifs scolaires etle dprissement de communau-ts, le nombre des arrives tantinfrieur celui des dparts, et letaux des naissances celui desdcs. Le combat continue, maisune nouvelle tendance dmogra-phique confre un second souffle la rgion. Les Hispaniques arri-vent en nombre suffisant pour
UNE AMRIQUE PLUS DIVERSE. 1
The New York Times(extraits) New YorkDUlysses (Kansas)
Dans les petites villes, lechangement peut sur-prendre. Mais, rcem-ment, dans cette tranquille
localit agricole, avec son horizonfamilier barr de silos grains etde clochers, Luz Gonzlez, la pro-pritaire dun nouveau restaurant,a dcid de prendre acte de ladiversit de la ville en ajoutantquelques plats moins traditionnels
sa carte, comme des cheesebur-gers, des frites et des escalopes depoulet panes. De la cuisine am-ricaine, comme le dit Luz Gonz-lez. Pour illustrer sa nouvellestratgie commerciale, elle a bap-tis son restaurant mexicain dunnom typiquement amricain : TheDown-Town Restaurant.
Ce genre de plat avait pratique-ment disparu Ulysses. Il taitdevenu coutumier pour ses habi-tants de dire sur le ton de la plaisan-terie, en maugrant un petit peu :On a le choix entre un restaurant
compenser, et mme plus, le dclide la population dans la plupardes endroits. Les nouveaux habtants transforment en piceriemexicaines des commerces qui on
mis la cl sous la porte, remplissent les coles avec des enfantdont la langue maternelle est lespagnol et, pour le moment dmoins, prolongent la vie de communauts qui semblaient vivrleurs dernires heures.
Ville fantme. Ce changemendmographique, reflt par lrecensement de 2010, nest patoujours bien reu dans des localits o la tradition est considrcomme le principal charme de lvie la campagne. Certains hab
tants de longue date dUlyssedont la population de 6 161 mese compose dsormais pour moitidHispaniques, se plaignent dediffrences culturelles.
Nanmoins, les Latinos maintiennent depuis longtemps unforte prsence dans les Etats deGrandes Plaines, o les emploidifficiles ne manquent pas danles usines de conditionnement dviande, les exploitations agricoleles parcs dengraissement dbtail et les champs de ptrole [ceemplois pnibles sont gnrale
ment occups par des immigrlatinos aux Etats-Unis]. Mais, cedix dernires annes, alors quleur nombre dans les GrandePlaines rurales a fait un bond d54 % un chiffre comparable auaugmentations dans les zoneurbaines de la rgion , les hispanophones ne se concentrent pludans les villes voisines de DodgCity, Garden City et Libera[toutes situes au Kansas], maisinstallent dans des localits toujours plus petites. Ils sont attirpar les prix bon march des ma
sons et la perspective dune vipaisible dans un cadre qui leur rappelle leur jeunesse.
Dans la moiti occidentale dKansas, peu peuple, tous lecomts lexception dun seul onconnu un dclin de la populatioblanche non hispanophone. Parallement, la grande majorit de celocalits a enregistr une croissance deux chiffres de la population hispanique, ce qui fait plus qucompenser les baisses dans sepcomts et dans de nombreusepetites villes. Les endroits
un savoir durement acquis pendantles annes passes sensibiliser laclasse politique la lutte contrelpidmie de sida.
Les experts et les dfenseurs de
la communaut saccordent cepen-dant dire quil y a une raison quiprime sur toutes les autres : la proxi-mit.Les gens ont fini par comprendreque nous existions, prcise CleveJones. Ils travaillaient avec nous, ilsnous connaissaient, des membres de leurfamille taient gays. Cela a dmystifila question et ils ont eu plus de mal nous har distance.
Ctait l une chose impossiblepour les Noirs. Les Blancs nallaientpas saperce voir tout coup quilsavaient des enfants ou des membres deleur famille qui taient noirs, dclare
Kenneth Sherrill, un militant homo-sexuel de longue date qui enseigneau Hunter College de New York.Les gays et les lesbiennes naissentdans des familles htros, vivent dansdes quartiers htros, vont dans descoles htros et travaillent dans desentreprises htros. Une telle proximitest moins vidente entre communautsethniques.
Fiction et ralit. La culturepopulaire et les mdias de masseont, en outre, contribu faire chan-ger les mentalits, de mme que les
informations tlvises ont permisde faire avancer la cause du mou-vement de lutte pour les droitsciviques des Africains-Amricains.Sauf que, cette fois, ce ne sont pasdes images de canons eau et dechiens policiers lancs contre desinnocents qui ont jou un rle maisles personnages gays et lesbienssympathiques qui ont fait leur appa-rition en prime time la tlvision.
Will & Grace, la srie comique dif-fuse sur NBC de 1998 2006, a pro-bablement fait davantage pour duquerla population amricaine que tout ce
quon avait tent auparavant, a ainsidclar le vice-prsident des Etats-Unis, Joe Biden, dans un entretientlvis au cours duquel il sest pro-nonc en faveur du mariage gay.Cest peut-tre exagr, mais le vice-prsident a sans doute touch dudoigt quelque chose dimportant :en accueillant chez eux des person-nages de fiction homosexuels, lesgens ont pu plus facilement lesaccepter dans la vie relle.
Mark Z. Barabak
Paru dans CI n 1126, du 31 mai 2012
Une famille latino sur un champde courses Dodge City au Kansas.Photo : Piotr Malecki/PANOS-RA
Les Grandes Plaines
passent lheurehispanique
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La Nacin(extraits) Buenos Aires
I
l incarne le rve amricain,mais son histoire est crite avecla grce et la beaut mtisse deceux qui ont la langue espagnole
dans le sang. Sa grand-mre Victoriatait analphabte. Fuyant le Mexiquepour un avenir meilleur, elle devintcuisinire et femme de mnage auxEtats-Unis. Elle apprit seule lireet crire, dabord lespagnol, puislanglais. Elle donna naissance, aux
Etats-Unis, une fille, Rosita, qui son tour mit au monde et levaseule deux enfants, des jumeaux
qui se ressemblent tellement quondirait deux moitis dun mme
rve. Ils ont reu chacun unprnom commenant par lalettre j : Julin et Joaqun.
Insparables, sympathi-ques et entreprenants,les deux frres ont rus-si bien au-del de ceque leur grand-mre au-rait pu imaginer. Aprsleurs tudes Harvard
et Stanford, les deuxmeilleures universits dupays, ils se sont lancs en
politique dans le camp d-mocrate, qui nest pas trs
puissant au Texas, un Etat forte tradition rpublicaine. Et ils
sont devenus deux figures ma-jeures : Julin en tant que maire
de San Antonio, la septi-me ville des Etats-Unis,et Joaqun en tant quedput de lEtat [de-puis 2003].
Mon histoire na rien
dextraordinaire, cest cepays qui est extraordi-naire, rpte sans
cesse Julin Castro. Car Julin, lepetit-fils de la cuisinire qui sestfray un chemin grce son cou-rage, est devenu en 2009, 37 ans,le maire le plus jeune de lhistoire
des Etats-Unis et lun des quaranteresponsables politiques de moinsde 40 ans les plus influents, selonle magazine Time.Aujourdhui, ilest galement une toile montantedu Parti dmocrate, et le prsidentBarack Obama lobserve avec lat-tention, la curiosit et la bien-veillance qui surgissent lorsquoncroit voir un reflet de sa propreexprience.
Nombreux sont ceux qui le con-sidrent comme un contrepoidspotentiel au rpublicain MarcoRubio [dorigine cubaine], snateur
de Floride la popularit croissante,pressenti un temps pour tre le vice-prsident du candidat Mitt Romney.Julin Castro a ainsi t dsigncomme principal orateur de laconvention nationale du Partidmocrate qui sest runie du 3 au6 septembre 2012 dans la ville deCharlotte en Caroline du Nord, aucours de laquelle Barack Obama at officiellement dsign candidat sa rlection.
Cest la premire fois que lesdmocrates confient cette tche une personnalit dorigine hispa-
nique. Cest un homme cl, pour unposte cl, un moment cl. Sil russit simposer, il est probable que noussoyons face lhomme qui pourraitdevenir le premier prsident ou vice-prsident dorigine latino dans lhistoiredu pays, a dclar La NacinWalter Clark Wilson, professeur ensciences politiques luniversit duTexas San Antonio.
Cet homme, qui sest soudaintrouv sous les feux de la rampe,incarne lhistoire collective dunpays qui a dj lu un prsident noir,mais qui est encore orphelin de
leaders hispaniques lchellenationale. Car le monde politiquecommence reconnatre le pouvoirgrandissant du vote latino. Les deuxpartis dmocrate et rpublicain cherchent attirer les Hispaniques
sans que cela fasse fuir dautreslecteurs. En choisissant
Julin Castro, les dmo-crates parient sur son
potentiel de dirigeant.Silvia Pisani
Paru dans CI n 1138,du 23 aot 2011
POLITIQUE
LObama latino ?Jeune, dmocrate, prometteur et mexicain-amricain.
Julin Castro, lactuel maire de San Antonio, pourraitbien se retrouver un jour la Maison-Blanche.
forte population latino affi-chent gnralement les moyennesdge les plus jeunes et les taux denaissances les plus levs.
Je ne sais pas ce que ces localits
feraient sans les Mexicains, souligneOscar Rivera, un immigr du Hon-duras qui vit dans un village dequelques centaines dhabitants etsillonne les zones rurales danslouest du Kansas pour vendre descartes tlphoniques prpayes ser-vant appeler ltranger.Elles res-sembleraient des villes fantmes.
Acceptation. A Ulysses, quiconnat une modeste augmentationdmographique de 3 % depuis dixans, rien ou presque na chang.Rachel Gallegos [une sexagnaire]
se souvient de lpoque o elle taitla seule lve hispanophone de saclasse et o le restaurant mexicainde ses parents tait lunique com-merce latino en ville. De nos jours,les Hispaniques reprsentent lesdeux tiers des lves des coles. Et,alors que la rgion continue desouffrir de lexode rural, la famillede Rachel Gallegos sest, elle, enra-cine Ulysses. Parmi ses neuffrres et surs et leurs quelquevingt enfants, seule une famille aquitt le village.
Ginger Anthony, directrice du
Historic Adobe Museum, un musequi consigne lhistoire de cetteancienne ville de pionniers, se ditconsterne par les changementssurvenus. Elle sinquite particu-lirement de larrive de sans-papiers. Mais les Latinos assurentpour la plupart avoir t bienaccueillis, mme si les autres com-munauts gardent parfois leurs dis-tances. A en croire Jos Olivas, lundes dirigeants de Mexican Ameri-can Ministries [lorganisation quichapeaute les dispensaires delEglise mthodiste unie mexicaine-
amricaine du Kansas], il a falludes annes de pressions pour queles tablissements scolaires etcertaines entreprises embauchentdes Hispaniques. Maintenant, lesemployeurs prennent des coursdespagnol et affichent leurs pr-frences lembauche pour lescandidats bilingues. Il fut un tempso il fallait faire attention, se sou-vient Jos Olivas.Mais les mentalitsont vraiment chang.
A. G. Sulzberger
Paru dans CI n 1100, du 1erdcembre 2011
Julin Castro.Dessin dAndr Carrilho(Portugal) pour Courrierinternational.
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PRJUGS
Cette famille de la minorit karen(originaire de Thalande) habite aujourdhuiRochester, dans lEtat de New York.Photo : Paolo Pellegrin/Magnum Photos
Pour cette communaut en pleine croissance,le dfi est de renverser la vision binaire selon laquellesoit on est blanc, soit on est noir.
Lessor desAsiatiques-Amricains
TimeNew York
En juin dernier, le PewResearch Center a publiune tude intitule The Riseof Asian Americans [Lessor
des Asiatiques-Amricains]. Un por-trait premire vue enthousiasmantde cette communaut forte de17 millions de personnes : les Asia-tiques-Amricains sont globalementplus diplms, plus riches et plusheureux que le reste de leurs com-patriotes. Ils sont galement plusattachs aux valeurs familiales et autravail. Et les Asiatiques ont discr-
tement devanc les Hispaniques : ilsconstituent dsormais le plus groscontingent de primo-arrivants surle sol amricain et forment la mino-rit qui crot le plus vite.
Cette tude a fait couler de lencredans la presse nationale, souvent avecde gros titres maladroits tels que :Les Asiatiques numro un des immi-grs. Les principales organisationsreprsentant les Asiatiques-Amri-cains sont restes silencieuses dansun premier temps, avant de dcrierlargement ltude, juge mprisante,creuse, drangeante. Celle-ci
contribuerait perptuer un clichcondescendant sur les Asiatiques,
toujours prsents comme des tra-vailleurs obsessionnels et conscien-cieux, comme une minorit modle.Elle fait limpasse sur la grande diver-sit culturelle de cette population etsur les difficults que rencontrent denombreux Asiatiques aux Etats-Unis.
Loyaut.Mais il est une ventualitque ni ltude du Pew ResearchCenter ni les dfenseurs de la com-munaut asiatique nont envisage :les bons et les mauvais aspects peu-vent tre vrais simultanment.
Bienvenue dans le dbat racial aux
Etats-Unis. On a beau tre en 2012et avoir un prsident noir, ce dbatreste dsesprment binaire. Autre-fois, cette question en Amrique seposait entre le Noir et Blanc et nelaissait aucune place aux autres cou-leurs. Aujourdhui, le dbat tournetoujours autour du noir et blanc,mais au sens figur. Tout notre arc-en-ciel multiculturel en est rduit cette simple alternative : in ou out,dans le courant dominant ou contre-courant, puissant ou impuis-sant. Et lorsque lon parle de blancet de noir, ces mots signifient plus
quune couleur de peau ou un faitdmographique, ils renvoient unepolarit et tout doit tre rattach lun ou lautre de ces ples.
Voil pourquoi les dfenseurs de
la communaut asiatique-amri-caine sestiment devoir condamnerle rapport du Pew Research Center.Contraints par la pression mdia-tique de sidentifier soit une his-toire de russite, soit une histoiredinjustice (de dire, en dautrestermes, si les Jaunes sont des Blancsou bien des Noirs), ils se sententobligs dopter pour la seconde. Etcela se comprend : de la misre desrfugis hmongs [arrivs aux Etats-Unis dans les annes 1970-1980 cause de la guerre du Vietnam] auxseniors oublis de tous les China-
town du pays, en passant par les pro-blmes de sant des Ocaniens, lesAsiatiques-Amricains nignorent nila privation ni linjustice. Et si lesmilitants et membres dassociationssuffisamment privilgis pour avoirvoix au chapitre ne sen servaientque pour verser dans lautosatisfac-tion, ils ne feraient pas leur travail.De plus, les Asiatiques-Amricainsrefusent, juste titre, dtre utilisspar les Blancs pour critiquer dautresminorits juges, elles, moinsmodles.
Reste que ce raisonnement
binaire est source denfermement.Il empche les Asiatiques-Amri-cains de considrer leurs avancescomme telles et de discuter ouver-tement des dfis quil leur reste relever. A cause de ce raisonnement,il est plus difficile de se rendrecompte que, pour les Amricainsdorigine asiatique comme pour len-semble des Amricains, laggravationdes ingalits et le culte de la mri-tocratie suscitent une angoisse crois-sante, tant chez les gagnants quechez les perdants. Et avec ce raison-nement nous continuons tous
aborder les problmes en termes de
races, alors quil sagit au fond dunquestion de classes.
Prenons la principale minoritasiatique aux Etats-Unis : les SinoAmricains. Ltude du Pew Researc
Center nous apprend que parmi le4 millions dAmricains doriginchinoise figurent la fois ceux qurussissent le mieux luniversitceux qui sont plus pauvres que lreste de la population ; la fois ceuqui ont des revenus plus levsceux qui ont une vision moins optmiste des relations interethniqueEt, alors que la Chine ne cesse daccrotre sa puissance, les Sino-Amricains sont en passe dapparatrela fois comme des citoyens crateurde liens etcomme des trangers lloyaut douteuse. Sommes-nou
prts accepter les deux faces dcette mdaille ? Peut-tre bien.
Embrasser la diversit.A la mjuin, au moment de la sortie dltude du Pew Research Centepuis de la controverse qui a suivdeux autres actualits lies la communaut asiatique stalaient danles pages de nos journaux. On clbrait le trentime anniversaire dmeurtre de Vincent Chin, un SinoAmricain battu mort Detroit pades employs blancs de lindustriautomobile qui le prenaient pour u
Japonais [les Japonais taient tenupour responsables du dclin de lindustrie automobile amricaine] equi nont pas t condamns useul jour de prison. Paralllemengrce laction de la dpute sinoamricaine Judy Chu, la Chambrdes reprsentants marquait un pahistorique en prsentant ses excusepour le Chinese Exclusion Act d1882, cette loi sur le pril jaune qupendant des dcennies a interdlimmigration et la naturalisation deimmigrs chinois. Une bonne nouvelle, donc, mais aussi une mauvais
Car la ralit est complexe, et ellnest pas prs de se simplifier. Snous devons vraiment considrer lquestion raciale de faon binaireque la dichotomie se fasse entrceux qui savent aborder cette complexit et ceux qui nen sont pacapables. Et laissons les AsiatiqueAmricains prendre la tte de cpremier groupe, afin quils montrent leurs compatriotes commenembrasser la diversit et les contradictions autrement dit, commentre authentiquement amricains
Eric Li
Les Asiatiquesont devancles Hispaniques :ils constituent le plusgros contingentde primo-arrivantssur le sol amricain
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20. UNE AMRIQUE PLUS DIVERSE
The New York Times(extraits) New York
P
our beaucoup dimmigrantsdu XIXe et du XIXe sicle,changer didentit leur
arrive aux Etats-Unis taitun vritable rite de passage. En1850, le fabricant de pianos dori-gine allemande Charles Steinwegopta ainsi pour le nom commercialde Steinway (entre autres parcequ lpoque les instruments demusique anglais avaient la rputa-tion dtre de meilleure qualit).Le raisonnement de ces immi-grants tait simple : adopter unnom consonance amricainepouvait faciliter leur intgration,leur viter de se faire remarquer,leur permettre dchapper la
discrimination. Ou bien ils esti-maient que, pour le bien de leursaffaires, il valait mieux adopter unenouvelle identit.
Aujourdhui, la plupart des obser-vateurs saccordent dire que cettepratique a quasiment disparu. Laplupart des gens ne changent plus leurnom, constate Cheryl R. David,ancienne prsidente de la branche
new-yorkaise de lAssociation desavocats spcialiss en droit de lim-migration. Il est difficile de trouverdes statistiques comparativesdtailles concernant cette volu-tion, dautant que la transition sestopre progressivement. Cette pra-tique a dclin au cours des der-nires dcennies et lon peut entrouver la preuve (bien quaucunchiffre nexiste ce sujet) dans lesregistres de presque nimporte queltribunal amricain.
The New York Times a tudiles demandes de changement de
nom plus de 50 0 dposes enjuin 2010 auprs du tribunal civilde New York, la ville amricainequi abrite le plus de personnesnes ltranger. Seules une poi-
gne dentre elles semblent avoirclairement pour but dangliciser oudabrger un patronyme ; ellesmanent dimmigrants dAmriquelatine ou dAsie. Quelques Russes etEuropens de lEst ont galementfait cette demande, mais ils sont peu prs aussi nombreux avoirconserv leur nom dorigine.
Etat civil. La plupart des tran-gers ayant demand changer denom lont fait soit aprs un mariage,en prenant celui de leur poux ouen crant un nom compos, soit
IMMIGRATION
Les immigrantsne changent plus de nomLpoque o porter un patronyme tranger tait un frein lintgration est rvolue.Les nouveaux arrivants prfrent mettre en avant leur identit plutt que la taire.
parce que les documents tablis leur naissance ne portaient pas denom mais uniquement la mentiongaron ou fille, soit pour adapterle nom dun de leurs parents.
Iyata Ishimabet Maini ValdeneArchibald, de Brooklyn, est ainsidevenue Ishimabet Makini ValdeneBryce. Mre dune petite fille de5 ans dnomme Star Jing Garcia,Jing Qiu Wu, de Flushing (dans leQueens), a enlev aprs son divorcele nom de son mari de celui de safille, qui sappelle dsormais StarRain Wu. Certains ont abandonnle prnom Mohammed pour le rem-placer par Najmul ou Hayat. Et uncouple de personnes ges a adoptle nom de Khan la place dIslam,mais, selon leurs dires, plutt pour
tre en phase avec les membres lesplus jeunes de la famille que pourviter les discriminations.
Fiert communautaire. Lessociologues y voient un effet dumulticulturalisme croissant desEtats-Unis. De plus, changer sonnom pour se fondre dans la massenest pas une stratgie efficacepour les Asiatiques et les Latinos,qui ne sont pas tous blancs commeltaient gnralement les immi-grants europens du XIXe sicle et dudbut du XXe sicle. La discrimina-
tion positive et autres programmessimilaires ont transform la diff-rence ethnique en un atout potentiel dans certains cas, du moins.
En 1910, la pression sociale taitplus importante, les immigrs devaienttout faire pour sintgrer, expliquelhistorienne Marian Smith, duBureau amricain de la citoyennetet des services dimmigration.Alors quaujourdhui les immigrantsarrivent munis de tous leurs papiersofficiels et de documents didentit, unpermis de conduire et un passeport leur nom en poche. Changer didentit
est devenu beaucoup plus compliqu.Selon Douglas S. Massey, socio-logue luniversit de Princeton,les immigrants et leurs enfants neressentent plus la ncessit dechanger de nom pour sintgrerdepuis les annes 1970 et 1980,poque laquelle limmigration a prisde limportance dans la vie amricaineet o le mouvement des droits civiquesa fait de la fiert communautaire unatout cultiver.
Sam Roberts
Paru dans CI n 1050, du 16 dcembre 2010
Scne de rue Atlantic City,dans le New Jersey.Photo : Vittoria Mentasti
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Politico
(extraits) Arlington
Lors de la campagne histo-rique de Barack Obama en2008, la question racialentait jamais trs loin. Elle
a fait un retour fracassant lap-proche de llection prsidentiellede novembre 2012. Le candidat linvestiture rpublicaine NewtGingrich sest ainsi attir de vivescritiques en janvier pour avoir qua-lifi M. Obama de prsident desbons alimentaires [une doubleattaque contre le gouvernement
fdral et les Africains-Amricainsqui bnficient de ce dispositifdaide alimentaire]. MichelleObama a d se rebeller contre lti-quette de femme noire en colrequon essayait de lui coller. Etlquipe de campagne dObama,base Chicago, sest applique rfuter lide selon laquelle leprsident aurait plus ou moinsrenonc au vote des Blancs.
Mais rien nillustre mieux leffetexplosif de la question raciale quele toll soulev par la scne mon-trant la gouverneure rpublicaine
de lArizona, Mme
Jan Brewer, poin-tant du doigt le premier prsidentnoir des Etats-Unis. Si quelquesillusions subsistaient quant lventualit dassister en 2012 une lection postraciale, elles sesont envoles avec le geste deMme Brewer.
Lincident, qui sest droul surle tarmac de laroport de Phoenixle 25 janvier, ntait quun nouvelpisode du bras de fer opposant lagouverneure la Maison-Blanchesur la question de limmigration.Mais il a scandalis les leaders
ultraconservateur, nient toutearrire-pense raciste dans lhosti-lit manifeste envers le prsident.Selon un sondage AP/Ipsos ralisjuste avant le scrutin de 2008,
M. Obama aurait gagn jusqu sixpoints de pourcentage supplmen-taires sil avait t blanc. Une tudemene ultrieurement par deschercheurs de Stanford et de luni-versit de Caroline du Nord acependant conclu que ce chiffresous-estimait leffet de prjugsimplicites, tout en concdant quonne pourrait probablement jamaismesurer cet impact.
Racisme Insidieux. En 2008,quelques adversaires enrags deM. Obama diffusaient des courriels
haineux contenant des caricaturesgrossires le reprsentant sous lestraits dun musulman, dun singe oupis encore. En 2012, ces outrancesnont plus cours. Mais les partisansdObama redoutent une remise encause plus insidieuse de sa lgitimit occuper les plus hautes fonctions.
Dans notre socit, il est dusage decritiquer les prsidents, mais je naijamais assist quelque chose daussiirrespectueux que les critiques formu-les contre Obama depuis quil a t lu la prsidence, note M. Shelton.
Je vais le dire franchement, sem-
porte le rvrend Al Sharpton,lun des plus ardents dfenseursdObama. Certains dans ce pays nepeuvent pas accepter le fait quunAfricain-Amricain soit lune des per-sonnes les plus puissantes de la plante.Il y a aussi ceux qui, inconsciemment,narrivent pas faire avec.
Pour les partisans de BarackObama, le prsident aurait tout int-rt laisser dautres les discus-sions sur les questions raciales. Poureux, un prsident noir qui dnoncele racisme sexpose un retour debton probablement pire que le
racisme lui-mme. Mary FrancesBerry, ex-prsidente de la Commis-sion des droits civiques, prfreretenir lattitude de M. Obama lorsde lincident en Arizona plutt quesarrter sur les motivations deMme Brewer. Selon elle, le prsidenta eu raison en disant que cela navaitpas dimportance et quil fallait passer autre chose. Sil avait agi autrement,cela aurait sembl bizarre.
Glenn Thrush
et Donovan Slack
Paru dans CI n 1111, du 16 fvrier 2012
22. UNE AMRIQUE PLUS DIVERSE
RACISME
Une prsidencepas vraimentpostracialeQuatre ans aprs son accession la Maison-Blanche,Barack Obama fait toujours lobjet dattaquesaux relents racistes.
africains-amricains, pour qui
limage de Mme
Brewer admones-tant M. Obama rsume tout lemanque de respect dont fontpreuve les adversaires blancs dupremier prsident noir. Jan Brewerrfute cette accusation ainsi quecelle de racisme. Ses diffrendsavec Obama portent strictement surla politique du gouvernement. Leracisme devrait tre totalement exclude la campagne de 2012, soutient-elle. Mais elle a donn plusieursversions de lincident, reprochantune premire fois sa susceptibilit Obama, puis confiant quelle [se
sentait] un peu menace par lattitudedu prsident.Hilary Shelton, vice-prsident de
la NAACP [Association nationale
pour la promotion des personnes decouleur, la plus ancienne organisa-tion de dfense des droits civiques],nen croit pas ses oreilles. Que crai-gnait-elle ? Quil lui arrache son sac ?
dclare-t-il, la voix trangle.Le rvrend Jesse Jackson pense
quil est temps de dchiffrer lesexpressions codes telles que ledoigt brandi par Jan Brewer ou lesinvectives de Newt Gingrich. Ellessont devenues trop frquentes et dan-gereuses, explique-t-il. Nous clbronsle 150e anniversaire de la guerre civileet le pays est de nouveau profondmentdivis, ajoute M. Jackson, qui voitdes motifs peu avouables derrire lediscours sur le primat du droit desEtats, revendiqu par Mme Breweret dautres rpublicains.
La Maison-Blanche a choisidignorer les possibles relents deracisme de ces critiques lgard duprsident. Barack Obama a biendclar le 26 janvier, sur la chane detlvision ABC, que lallusion auxbons alimentairestait une tenta-tive de M. Gingrich de diviser lanation qui [faisait] appel quelques-uns de nos pires instincts, mais il napas prcis de quels instincts ilsagissait.
Hostilit. Que la couleur de lapeau de M. Obama ait jou un rle
lors de la campagne de 2008 est unfait que personne ne peut srieu-sement contester, mme si nom-breux sont ceux qui, dans le camp
Touche pas mon Arizona : ces badgesconservateurs montrent la gouverneureJan Brewer en train dadmonester Obama.Photo : Don Emmert/AFP
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The Atlantic(extraits) Washington
Lhistoire des relations ra-ciales pse sur le prsent desEtats-Unis et notammentsur la prsidence Obama.
Pourtant, pendant le plus clair deson mandat, le locataire de la
Maison-Blanche a refus denparler. Puis en fvrier dernier,George Zimmerman, un souscrip-teur en assurances de 28 ans, a tupar balle un adolescent noir, Tray-von Martin, dans une rsidencescurise Sanford, en Floride.Zimmerman, arm dun pistolet decalibre 9 mm, pensait avoir repr
un intrus. Lintrus sest rvl treun jeune garon en sweat-shirt capuche, qui navait sur lui que dessucreries et une canette de thglac. Dans un premier temps, les
autorits locales ont refus darr-ter Zimmerman, invoquant lauto-dfense. La contestation a alorsexplos lchelle nationale.Skittles et Arizona Iced Tea [lesproduits que Martin venait dache-ter] ont acquis un pouvoir tot-mique. Des clbrits lacteurJamie Foxx, lancienne gouver-neure du Michigan Jennifer Gran-holm, les basketteurs du MiamiHeat ont t photographies ensweat capuche. A la Chambre desreprsentants Washington, ledput de Chicago Bobby Rush a
t expuls pour avoir mis un sweat capuche au milieu dun discoursdnonant le dlit de facis. Dansun premier temps, les ractions la tragdie de Floride sont venuesde tous les bords politiques. Cer-tains conservateurs ont choisi dese taire, dautres dexprimer leurtide soutien une enqute appro-fondie et cest dailleurs le gou-verneur rpublicain de Floride,Rick Scott, qui a nomm la procu-reure spciale qui a fini par inculperZimmerman pour meurtre ausecond degr. Tandis que les mili-
tants de la cause des droits civiquesdescendaient en Floride, la trsconservatrice National Review apubli un article proclamant : AlSharpton a raison [Sharpton est unpasteur baptiste, icne du mouve-ment pour les droits civiques]. Ilsemblait indiscutable quun jeunehomme puisse aller acheter desSkittles et un th glac sans se fairetuer par un vigile de quartier.
Deuil national. Lorsque les jour-nalistes se sont adresss laMaison-Blanche pour recueillir ses
commentaires, le prsident avaitdj, selon toute probabilit, lon-guement rflchi la question.Obama est non seulement le pre-mier prsident noir des Etats-Unis,cest aussi le premier prsidentcapable de donner un cours surlhistoire africaine-amricaine aveccrdibilit. Il connat bien les critsdes romanciers Richard Wright etJames Baldwin, des militants de lacause noire Frederick Douglass etMalcolm X. Les deux autobiogra-phies dObama montrent que lesquestions raciales lui tiennent
INTOLRANCE
LAmrique a toujourspeur du noirCandidat, Barack Obama savait parler de la questionraciale. Prsident, il la vite. Mais le meurtredu jeune Africain-Amricain Trayvon Martin,en Floride, a chang bien des choses
UNE AMRIQUE PLUS DIVERSE. 2
cur. Mais, quelques rares exceptions prs, le prsident a fait touson possible pour viter den parlependant les trois premires annede son mandat. Pourtant, quanTrayvon Martin est mort, Obam
sest exprim en ces termes :Quand je pense ce garon, j
pense mes propres enfants, et je pensque chaque parent aux Etats-Undevrait tre capable de comprendrpourquoi il est absolument impratque nous examinions chaque aspect dla question et que tout le monde travaille dans le mme sens au niveafdral, tatique et local pour dcouvrir prcisment comment cette tragdie sest passe
Mon principal message sadressaux parents de Trayvon. Si javais ufils, il ressemblerait Trayvon. Je pens
quils ont raison dattendre que noutous, en tant quAmricains, nous prenions cette affaire avec tout le srieuquelle mrite, et que nous allions afond de ce qui sest prcisment pass
Ds quObama a pris la parollaffaire Trayvon Martin est sortide sa phase de deuil national poutomber dans un domaine plus sombre et plus familier : elle est devenue la source dun dbat politiquracialis. Lillusion du consensusest effondre.
Le candidat linvestiture rpublicaine Newt Gingrich a aussit
ragi. Le prsident veut-il suggreque, si un Blanc avait t tu, cela nposerait pas de problme parce quil nlui ressemblerait pas ?a-t-il dclarRetrouvant sa vraie nature, lNational Review a dcid que le vraproblme tait que nous nous intressons la mort de jeunes Noiruniquement quand des non-Noirappuyaient sur la gchette.
Lide que Zimmerman pourratre la vraie victime a commenc faire son chemin dans le payaide par la campagne de relationpubliques orchestre par sa
Barack Obama. Dessin de Taylor JonesPoliticalcartoons.com
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Quand je pense
ce garon,je pense mespropres enfants []Si javais un fils,il ressemblerait Trayvon
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pancartes proclamant Je suis Tray-von Martinest une chose. Entendrele commandant en chef de la pluspuissante machine militaire de lhis-toire le dire en est une autre.
Vieux prjugs. Les origines deBarack Obama fils dun Noir etdune Blanche, il a grandi dans descommunauts multiethniques par-tout dans le monde lui ont per-mis de poser un regard particuliersur les relations raciales aux Etats-Unis. Il a fait preuve dune habiletenviable, car il a su naviguer entrelAmrique noire et lAmriqueblanc he, et trouv er un lan gag equi touche une masse critique ausein des deux communauts. Il amerg sur la scne nationale lors
de la convention dmocrate de2004 en tenant un discours quiannonait une nation dbarrassede vieux prjugs et dune histoirehonteuse. Il ny tait pas questiondes consquences du racisme.Obama soulignait, en revanche, laforce du rle parental et condam-nait ceux qui disent dun enfantnoir qui a un livre quil joue auBlanc. Il sest prsent commelenfant dun pre originaire duKenya et dune mre originaire duKansas, et il a affirm : Dans aucunautre pays sur terre mon histoire
naurait t concevable.Le racisme nest pas seulementune haine simpliste. Il correspond,le plus souvent, une grande empa-thie lgard de certains et unscepticisme encore plus grand vis--vis dautres. LAmrique noire vitsous ce regard sceptique. Do cettevieille rengaine : il faut tre deuxfois meilleur.
Do la ncessit davoir uneconversationspciale avec les gar-ons noirs pour leur intimer dtreprudents dans leurs relations avecla police. Llection dun Africain-
Amricain la plus haute fonctiona t prsente comme un triomphede lintgration. Mais, quand le pr-sident Obama a ragi la tragdiede Trayvon Martin, il a montr lalimite de lintgration : parce quelacceptation ne repose pas unique-ment sur le fait dtre deux foismeilleur, mais aussi de ntre noirqu moiti. Et, mme dans ce cas,lacceptation nest pas totale.
Pendant son premier mandat,Obama a d faire face une strat-gie de rsistance massive de la partdes rpublicains de la Chambre des
famille et son quipe dedfenseurs, ainsi que par plusieursractions idiotes comme linitia-tive [du ralisateur] Spike Lee, quia tweet ladresse de Zimmerman
(initiative dautant plus rvoltantequil sagissait de ladresse dunhomonyme), ou encore le montagetrompeur produit par la chane detlvision NBC de lenregistre-ment audio dune conversationtlphonique entre Zimmerman etun agent de police. Le rsultat don-nait limpression que le vigile selivrait un profilage racial de Tray-von Martin. En avril, quand Zim-merman a cr un site Internetpour collecter des dons en faveurde sa dfense, il a rcolt plus de200 000 dollars en deux semaines.
On aurait tort, cependant, dattri-buer le soutien dont a bnficiZimmerman aux gaffes de Spike Leeou dun journaliste de NBC. Avantque le prsident ne prenne la parole,George Zimmerman tait sansdoute lhomme le plus honni de tousles Etats-Unis. Aprs la prise deparole du prsident, il est devenu lesaint patron de ceux qui croientquun vritable incident racistecommence par lhistoire de TawanaBrawley (en 1987) et se termine parcelle de lquipe de lacrosse [sorte dehockey jou avec une crosse filet]
de luniversit Duke (en 2006)[deux cas de fausses allgations deviol de femmes afro-amricaines pardes hommes blancs].
Suprmatie blanche.Le para-doxe concernant Barack Obama estle suivant : il est devenu lhommepolitique noir qui a le mieux russide toute lhistoire des Etats-Unisen vitant daborder les questionsraciales, en tant propre(selonle qualificatif du vice-prsident,Joe Biden) , et pourtant cettenoirceur indlbile irradie tout cequil touche. Ce paradoxe sinscritlui-mme dans ce que le pays a deplus paradoxal. Pendant une bonnepartie de lhistoire des Etats-Unis,notre systme politique sest
construit sur deux faits contradic-toires : dune part, un amour de ladmocratie ; dautre part, unesuprmatie blanche antidmocra-tique prsente tous les niveauxde ladministration publique.
Luttant contre ce paradoxe, lesAfricains-Amricains ont histori-quement t cantonns la contes-tation et lagitation. Or quand leprsident Barack Obama sest en-gag aller au fond de ce qui sestprcisment pass dans laffaire Tray-von Martin,cela ne relevait pas dudomaine de la contestation ou de
24. UNE AMRIQUE PLUS DIVERSE
Lacceptationne repose pasuniquement sur le faitdtre deux foismeilleur, mais ausside ntre noirqu moiti
lagitation. Il ne faisait pas appel aupouvoir fdral, il lexerait. Lepouvoir tait noir et, dans certainsmilieux, il a t peru comme tel.
Le ton du discours, si modr ft-
il, ne pouvait rien y changer. Peuimporte que le prsident se soitadress chaque parent aux Etats-Unis. Le fait quil ait demand ins-tamment que tout le monde travailledans le mme sensnavait aucuneimportance. Son refus de dnigrerles autorits charges de lenqute,ou de spculer sur les vnements,ne voulait rien dire. Obama ne pou-vait apaiser ses opposants, mmeen formulant le plus subtilementpossible son propre lien Martin :Si javais un fils, il ressemblerait Trayvon.Tout compte fait, voir
des contestataires brandir des
Manifestation en mmoire deTrayvon Martin le 27 mars 2012 Austin, au Texas.Photo : Thomas Allison/AP/SIPA
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reprsentants et un nombre re-cord de menaces dobstruction auSnat. Il serait rjouissant que cettesituation ne soit quune ractionaux opinions politiques dObama
ou aux mesures quil a prises quecette rsistance soit vraiment,comme on le prtend gnrale-ment, un signe supplmentaire dela polarisation croissante de notrevie politique. Mais la plus grandedifficult laquelle se heurte BarackObama est toujours venue du faitexistentiel que, sil avait un fils, ilressemblerait Trayvon Martin. Entant que candidat, Barack Obamalavait compris.
Le fait est quun homme noir nepeut pas tre prsident des Etats-Unis,compte tenu de laversion raciale et
du pass qui sont encore bien pr-sents, a dclar Cornell Belcher,un sondeur du camp dObama, lajournaliste Gwen Ifill aprs llec-tion de 2008. En revanche, un jeunehomme talentueux, dou et hors ducommun, qui accessoirement est noir,peut tre prsident.
Par cette formulation, CornellBelcher constate le pouvoir duracisme antinoir et propose denvenir bout en refusant de lereconnatre. Sa dclaration estcaractristique de lre Obama,une poque marque par une rvo-
lution qui ne doit jamais sannon-cer, par une dmocratie qui ne doitjamais reconnatre le poids desquestions raciales, mme si cestce qui la modele. Barack Obamagouverne une nation suffisammentclaire pour envoyer un Africain-Amricain la Maison-Blanche,mais pas assez claire pour accep-ter un Noir comme prsident.
Ta-Nehisi Coates
TA-NEHISI COATESN en 1975, Ta-Nehisi Coatesest journaliste et crivain. Il crit
notamment dans les rubriques
culture, politique et socit
du magazine The Atlantic.
Dans son autobiographie,
The Beautiful Struggle [La lutte
sublime, non traduit en franais],
il raconte ses annes de lyce
Baltimore, une poque trouble
pour la communaut noire,
mais revient aussi sur sa relation
avec son pre, ancien activiste
des Black Panthers.
Lauteur
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The Washington Post
(extraits) Washington
Il fut un temps [lors des primairesdmocrates de 2008] o BarackObama tait distanc par HillaryClinton auprs des lecteurs
noirs et o il se dmenait pour rallierles Africains-Amricains en leur par-lant dinjustice raciale. Depuis lors,il a adopt une politique ainsi quunestratgie lectorale aseptises.
Les questions cruciales pour lesAfricains-Amricains telles que lesingalits du systme de justicepnale, limpact disproportionn
des saisies immobilires et du ch-mage sur la communaut noire et lapersistance du sida nont jamaist mises lordre du jour. Loin dedonner du poids lAmrique noire
dans la politique des Etats-Unis, lar-rive dObama la Maison-Blanchea sign le dclin de la lutte contreles ingalits raciales.
Et les Noirs sont complices de cedclin. Ils ont si peur quun dbatpublic sur la question raciale ne dis-crdite le prsident auprs de llec-torat blanc quils semblent avoirpass un pacte implicite avec lui.Nous le regardons tendre la main dautres groupes marginaliss(comme les gays) et acceptons sonsilence sur les questions qui nousconcernent. Il ne nous reste que la
fiert de voir un prsident noiret une famille noire la Maison-Blanche.
Pour lAmrique noire, son lec-tion na pas t une bonne affaire.
Les disparits en matire demploi,de richesse et de justice continuentde se creuser, une poque que nousimaginons postraciale, mais qui, enralit, est en train de devenir nonraciale cest--dire aveugle auxingalits qui affectent de nombreuxAfricains-Amricains.
Si seulement le prsident Obamaavait cout le candidat Obama !En 2007, luniversit Howard, il aprononc un discours (que tous ontoubli depuis) dans lequel il dtaillaitun programme de rforme de la jus-tice pnale. Il a martel quune fois
prsident il soutiendrait ladoptiondune loi contre la discrimination.Il encouragerait galement les Etats rformer leur lgislation sur lapeine capitale [en y introduisantdes mesures dont lenregistrementvido permettant de certifier quin-terrogatoires et procs ne compor-tent pas de discriminations], pourque des innocents ne finissent pas dansle couloir de la mort.
Mais le prsident na pas men bien les rformes quil avait pro-mises pendant sa campagne. Et la
DISCRIMINATION
Llection, pour la premire fois, dun prsident noir la Maison-Blanche ny a rien chang. Sous son mandat,
les ingalits en matire demploi, de richesse et de justice ont continu de se creuser.
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Les Africains-Amricains laisss pour compte
Maison en ruine dansle quartier de Morningside Detroit.Photo : Chris Maluszynski/Moment/
AgenceVU
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UNE AMRIQUE PLUS DIVERSE. 2
grande refonte du systme judiciairereste accomplir. Un prsident noir,un ministre de la Justice noir [EricHolder] et un prsident de la Com-mission judiciaire de la Chambredes reprsentants noir pendant lesdeux premires annes du mandatdObama [John Conyers] nont pas
suffi faire avancer ces rformes.A cela Obama et ses partisans
rpondent quil se doit dtre le pr-sident de tous les Amricains, et passeulement des Africains-Amri-cains. Mais cest un argument hypo-crite. Dautres groupes dlecteurslui demandent de soutenir leurs ini-tiatives : des associations juives surla question du Moyen-Orient, descollectifs de femmes sur la contra-ception ou la communaut LGBT[lesbienne, gay, bisexuelle et trans-genre] sur le mariage gay. Lima-ginez-vous un seul instant leur
rpondre quil ne peut pas soccuperdeux parce que, en tant que prsi-dent, il doit soccuper de tous lesAmricains la fois ?
Alors pourquoi les lecteurs noirsdevraient-ils se faire tout petits ?
En 2009, lors du dbat sur le plande relance conomique, un journa-liste de la Black Entertainment Tele-vision [BET, la chane de tlvisionnoire amricaine] a demand auprsident sil allait faire quelquechose pour lutter spcifiquementcontre le fort taux de chmage chezles Noirs et les Latinos. Obama a
rpondu : Les mesures que nous pre-nons sont toutes conues pour aidertout le monde.Avant dajouter :Dune faon gnrale, je pense quuneconomie forte [profite tous, de lamme faon quune mare montante]soulve tous les bateaux.Quid deceux qui nont mme pas de bateaupour profiter de la mare ?
Pom-pom girls. Il ne sagit mmepas de savoir pourquoi Obama nenfait pas plus pour la communautnoire en tant que Noir. La vraiequestion est de savoir pourquoi il
le mouvement de dfense des droitsdes homosexuels est parvenu fairepression sur Obama pour quil sou-tienne ses objectifs [comme la sup-pression, en 2010, de la loi dite Dont
ask, dont tell, Ne rien demander, nerien dire, loi qui obligeait les mili-taires homosexuels taire leurorientation sexuelle sous peine derenvoi]. Obama est peut-tre notrepremier prsident gay, comme laaffirm en couverture le magazineNewsweek [ la suite de linterviewtlvise dObama du 9 mai 2012,durant laquelle il a dclar quil sou-tenait le droit des homosexuels semarier], mais nous attendons tou-jours notre premier prsident noir.Ou du moins notre premier prsi-dent noir depuis Lyndon Johnson,
qui a su imposer son projet de GreatSociety [prsident de 1963 1969,Lyndon Johnson a pris de nom-breuses mesures pour favoriser lac-cs lducation, rduire la pauvretet les ingalits, et faire adopter laloi sur les droits civiques].
Marquer lHistoire est important.Et, pour bon nombre dlecteursnoirs, limpact symbolique davoirune famille noire la Maison-Blanchevaut bien le silence prsidentiel surquelques questions cls. LAm-rique noire ouvriers, professeursde grandes universits ou cadres
de Wall Street sest range mas-sivement derrire Obama. Aux yeuxde nombreux Noirs, les Africains-
Amricains qui osent publiquemencritiquer Obama sont, peu dchose prs, des tratres.
Fiert. Il y a un temps pour le
symboles. Et il y a un temps pouvoir au-del. Les symboles peuvenouvrir la voie, mais ils peuvent galement lgitimer un tat de fait. Cdont il sagit aujourdhui, ce nesplus tant de fiert, dhistoire odune socit postraciale imaginairqui serait devenue aveugle la couleur de la peau. Il sagit de mettre eplace des politiques qui non seulement profitent tous, mais cblent efficacement les ingalitraciales. La fiert ne peut rien contrun taux de chmage qui atteinle niveau de la Grande Dpressio
[des annes 1930], contre les saisieimmobilires qui frappent en premier lieu la communaut noirecontre les ravages du sida ou pounous convaincre quune marmontante profitera tous. Sil nle fait pas de lui-mme, il faudrfaire pression sur Obama pour quagisse et tienne les quelques promesses quil a faites lAmriqunoire en 2008.
Fredrick Harris
* Directeur de lInstitut de recherche sur les
tudes africaines-amricaines de luniversit
Columbia et auteur du livre The Price of the
Ticket: Barack Obama and the Rise and
Decline of Black Politics(Le prix payer :Barack Obama ou lessor et le dclin de la
lutte politique des Noirs).
nen fait pas davantage pour llec-torat le plus loyal du Parti dmo-crate, un lectorat qui se trouvetre noir et qui a besoin de poli-tiques universelles comme de poli-
tiques cibles pour combattre desingalits trs anciennes.
Dans lagitation de la vie politiqueamricaine, faire pression sur lesprsidents pour quils se penchentsur des problmes particuliers narien dinhabituel. Il serait mmecontre-productif pour nimportequel groupe dintrts de rester assisles bras croiss en attendant que leprsident veuille bien soccuper delui mme sil partage ses objectifset sa couleur de peau. Hlas, la peurque la droite ne reproche Obamadtre trop radical a entran cette
situation et entrave la lutte contreles ingalits raciales. Au lieu defaire pression sur Obama pour quilagisse, tels des joueurs prts alleren dcoudre sur le terrain, les diri-geants et les lecteurs noirs se com-portent en pom-pom girls. Et, tandisquils applaudissent le premier capi-taine noir, lautre quipe est en trainde marquer des points.
Les militants noirs doiventprendre exemple sur le mouvementgay, qui, ironie du sort, sest lui-mme inspir du mouvement de lalutte pour les droits civiques des
annes 1960. En alliant protestationet pressions, et surtout en laborantune plate-forme politique claire,
Les Africains-
Amricainsattendent toujoursleur premierprsident noir
Des jeunes jouent au basketdans lest de Detroit.Photo : Chris Maluszynski/Moment/
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hommage aux soldats du Massachu
setts qui, dit la plaque, ont assur lcohsion de lUnion, annihil lesclavaget prserv la Constitution. Dans leEtats du Sud, les monuments rappelant la guerre de Scession sontout aussi nombreux.
A Charleston, en Caroline du Sudans un parc du port, face lle ose dresse le fort Sumter [o retentirent les premiers coups de feu qudclenchrent la guerre], une desstrs semblable se tient derrire lstatue dun homme musculeux portant une pe et un bouclier : le touest ddi aux dfenseurs confdr
de Charleston.
Seattle contre Dallas. Ces deumonuments reprsentent deuconceptions diamtralement opposes. Lun clbre les hommes quont lutt pour le changement, poula libert et pour lautorit du gouvernement fdral ; lautre renhommage ceux qui se sont battucontre lhypertrophie de lEtat et lbouleversement dun mode de vtraditionnel. Aujourdhui, un siclet demi aprs la guerre de Scessiondurant laquelle les Amricains s
sont entre-tus par dizaines de miliers, cest une mme fracture phlosophique qui court travers lpaysage politique amricain.
Au lieu des bleus [luniforme deyankees] contre les gris [luniformdes confdrs], du Nord contre lSud, ce sont les Etats bleus [dmocrates] contre les Etats rouge[rpublicains]. Le Vermont et lMassachusetts contre la Carolindu Sud et le Kansas. San Francisccontre Birmingham (AlabamaSeattle contre Dallas.
Llection prsidentielle va avo
lieu le 6 novembre prochain. Quequen soit le vainqueur, prs de lmoiti de llectorat aura le sentment que le pays lui a t vol. Lediffrences rgionales sont tolrables, charmantes mme ; mais lediffrences politiques deviennent profondes que ceux de lautre camfinissent par apparatre non plucomme des concitoyens, maicomme des ennemis.
David Horse
Paru surCourrierinternational.comle 28 juin 2012
le rle de lEtat sont devenus autant
de pommes de discorde.En effet, chez les rpublicains et
les lecteurs indpendants qui par-tagent leur sensibilit, une tendanceconservatrice bien plus uniforme estapparue, marque par une mfiance lgard de lEtat, des rglementa-tions environnementales, des ser-vices sociaux et des politiquesdimmigration tolrantes. De leurct, les dmocrates et les indpen-dants sympathisant avec leurs idesdfendent des positions parfaite-ment inverses. Seule une frangeinfime dlecteurs indpendants se
rvlent sans attaches idologiques,mais cest surtout parce que la plu-part dentre eux ne sintressent pas la politique.
Pour rsumer, les rpublicainssont dans leur immense majoritblancs et de droite, tandis que lesdmocrates forment une mosaquede minorits ethniques et de Blancsprogressistes ou modrs.
Dans ce foss bant, je vois desfantmes vieux dun sicle et demi.
Mmoire. Un peu partout au Ver-mont et dans le reste de la Nouvelle-
Angleterre, sur les places et dans lescimetires, les monuments lammoire des soldats unionistessont omniprsents. Ainsi, sur unecolline au bout du parc de BostonCommon, Boston, se dresse uneimposante colonne que surmontela desse de la Dmocratie : elle rend
une affaire de proximit, plutt
oriente gauche et conduite pardes militants locaux. Au Festival desgnisses, jai ainsi vu le snateurlocal, Bernie Sanders, dambulerdans la foule comme M. Tout-le-monde. Or Bernie Sanders est toutde mme lunique snateur socialistesigeant au Congrs de Washington.Et son immense popularit ici estune preuve supplmentaire de laplace part quoccupe le Vermontparmi les 50 Etats.
Un abme bant. En cet an 236 denotre rpublique, le Vermont fait
partie de ces endroits qui, un peupartout dans le pays, montrent queles Etats-Unis ne forment toujourspas une nation totalement homo-gne. Si lon observe le paysage poli-tique amricain, force est mme deconstater que les divergences semultiplient. Selon une rcentetude du Pew Research Center, lefoss idologique entre Bernie San-ders et, mettons, le snateur rpu-bli cai n de Car oli ne du Sud J imDeMint est tout aussi grand quecelui qui spare la plupart des lec-teurs amricains et il sagit dun
abme bant. A propos de questionssur lesquelles les partis dmocrateet rpublicain se rejoignaient il y avingt-cinq ans, le terrain dententesest aujourdhui considrablementrduit : limmigration, la politiquesociale, la protection de lenviron-nement et, plus particulirement,
LTAT DE LUNION. 2
Etatsprogressistes
Etats progressistes
Etats conservateurs
VERMONT
CAROLINE DU SUD
Nouvelle-Angleterre
COURRIER INTERNATIONAL
Etats qui ont vot en 2008 pour Barack Obama pour John McCain
Dimportantes lignes de fracture
Le point commun entre
les habitants du Vermontet ceux de Carolinedu Sud ? Ils se dtestent.Un sicle et demi aprsla guerre de Scession,les divisions politiqueset culturelles perdurent.
Los Angeles Times
Los Angeles
Rcemment, un dimanchematin, jai pris mon petitdjeuner dans un petit cafalternatif de Brattleboro
qui tire une grande fiert de ses pro-duits bio et de la lenteur de leur pr-paration. L, ayant tout le tempsdobserver les alles et venues, jaieu une rvlation sur ce qui fait dece petit coin vert de lAmrique unendroit si particulier : le Vermont,au fond, cest ce que seraient tousles Etats-Unis si les idaux hippies
des annes 1960 et 1970 avaient pumrir et prosprer.Je ne veux pas dire par l que cet
Etat du Nord-Est est une vaste com-munaut baba cool. Mais, contrai-rement dautres gens dans bien desendroits, les habitants du Vermontsemblent tolrer lexcentricit, voirelencourager. Brattleboro est unebourgade o jai dcouvert une dis-cipline baptise la contra-dance,sorte danctre de lasquare danceamricaine, dans laquelle deshommes longue barbe peuventparfaitement porter une jupe sans
rien perdre de leur coolitude. Etcest encore ici quau dbut du moisde juin jai assist une grande ftede lagriculture biologique trsanime avec son dfil de gnissesnonchalantes.
Installs dans de petites villesloves dans les plis dun paysage decollines boises, les habitants duVermont semblent prfrer une v